C'est un été orageux pour le gouvernement français. Des « affaires » en cascade touchant des membres de l'Exécutif discréditent les responsables politiques aux yeux des Français. Paris De notre bureau La démission de deux secrétaires d'Etat ne suffit pas à calmer les polémiques autour du train de vie des ministres français et de leur implication présumée dans des affaires politico-judiciaires qui ne cessent d'enfler depuis plusieurs semaines. Mercredi dernier, en recevant les députés de son parti, le président Sarkozy avait promis de tirer « sévèrement » les conséquences de ces affaires et annoncé qu'il remanierait son gouvernement en octobre. La démission des secrétaires d'Etat, Alain Joyandet et Christian Blanc, annoncées dimanche dernier, n'a pas eu l'effet escompté. 64% des Français estiment que « les dirigeants politiques sont plutôt corrompus », selon un sondage Viavoice publié lundi dans Libération. Pour sa part, Nicolas Sarkozy est tombé à 26% d'opinions favorables dans un baromètre TNS-Sofres, au plus bas depuis trois ans. Christian Blanc fait les frais des 12 000 euros de fonds publics dépensés pour payer ses cigares, et Alain Joyandet se voit reprocher la location d'un jet privé pour 116 500 euros et un permis de construire contesté pour sa résidence secondaire en Côte d'Azur. Toutefois, c'est le ministre du Travail, Eric Woerth, qui fait figure de principal accusé : il est soupçonné de « conflit d'intérêt » lorsqu'il était ministre du Budget (2007 à mars 2010), époque où son épouse gérait une partie de la fortune de l'héritière de L'Oréal, Liliane Bettencourt, soupçonnée de possibles fraudes fiscales. Eric Woerth reste soumis à l'évolution de la procédure judiciaire visant les enregistrements clandestins de Liliane Bettencourt et leurs révélations. « La peopolisation du système et le bling-bling de Nicolas Sarkozy avaient déjà montré une contradiction entre les principes affirmés et l'exercice effectif du pouvoir », indique Erwan Lecœur, sociologue, interrogé par Libération. « Tant qu'il s'agissait du chef de l'Etat, cela pouvait passer... Mais quand on découvre que la femme du ministre chargé de mettre en œuvre des mesures de rigueur pour réformer les régimes de retraite a été embauchée pour défendre les intérêts de la femme la plus riche de France, là c'est le grand écart », poursuit-il. Une République « peopolisée » L'opposition de gauche a estimé lundi que les départs du secrétaire d'Etat à la Coopération, Alain Joyandet, et de son homologue chargé du Grand Paris, Christian Blanc, étaient une diversion pour protéger l'artisan de la réforme des retraites, Eric Woerth, et n'avaient pas mis fin à la crise politique.L'ancienne candidate socialiste à la présidentielle de 2007, Ségolène Royal, qualifie la décision prise de « très insuffisante ». Elle demande au gouvernement la suppression du bouclier fiscal et une réforme plus profonde. « C'est le système qu'il faut réformer de fond en comble. Pourquoi est-ce que le système est corrompu ? Parce qu'on voit qu'à la base, il y a une connivence entre les grandes fortunes et les décisions politiques », a-t-elle dit sur RTL. « Avec une démocratie et une République abîmées, on a bien besoin d'une rénovation ! » « On est très, très loin de cette République irréprochable vantée par le candidat Nicolas Sarkozy en 2007 ! », a affirmé le maire de Lille devant quelque 500 militants et délégués, lors de la convention du parti réuni au Carrousel du Louvre, samedi dernier. Martine Aubry a pointé les ministres « qui ont oublié les exigences et les devoirs d'exemplarité qui vont avec leur charge », l'UMP qui « abîme la démocratie ». Martine Aubry a fustigé le « régime des excès et des confusions des rôles ».