De notre correspondant à Paris Merzak Meneceur Ce n'est pas encore un tsunami mais une secousse tellurique sensible qui secoue le gouvernement français depuis quelques semaines sous le tir croisé des médias, surtout, et de l'opposition accusant plusieurs ministres de conflits d'intérêts ou d'utilisation illégale et abusive des deniers publics. Pour faire face à ce climat malsain, et en vue de désamorcer les «bombes» qui couvent, le président Sarkozy, qui comptait ne remanier son gouvernement qu'en octobre, a dû précipiter les événements en délestant l'Exécutif de deux secrétaires d'Etat. Le secrétaire d'Etat à la coopération, Alain Joyandet, et le secrétaire d'Etat au développement du Grand Paris, Christian Blanc, ont quitté le gouvernement presque simultanément dimanche dernier. Le premier était déjà accusé dès mars d'avoir loué un jet privé afin de se rendre en Martinique pour la somme de 116 500 euros. En plus de cette indécence en période de crise, un journal a révélé dernièrement qu'il agrandissait sa maison dans le sud de la France sans permis de construire. Le cas de Blanc a soulevé un tollé médiatique et populaire pour avoir utilisé les deniers publics afin de s'offrir 12 000 euros de cigares ! Il n'est cependant pas acquis qu'avec ces départs le gouvernent retrouvera l'accalmie des attaques qu'il escompte recevoir car le grand dossier des polémiques et des révélations de la presse concerne le ministre du Travail, Eric Woert, qui dirige actuellement l'une des réformes phares du quinquennat de Sarkozy, celle des retraites. M. Woert fait l'objet d'une grande offensive pour son passage au ministère du Budget. Il est suspecté de conflit d'intérêts dans le traitement du dossier fiscal de la dame la plus riche de France (une fortune de 17 milliards d'euros), Liliane Bettencourt, l'héritière de L'Oréal. Celle-ci a fraudé avec le fisc en ne déclarant pas 78 millions d'euros déposés dans une banque suisse et une île qu'elle possède dans les Seychelles. Et Mme Woert était jusqu'à ces derniers jours une des gestionnaires de la fortune de Mme Bettencourt. D'ailleurs, le procureur de Nanterre, Philippe Courroye, s'apprête à relancer son enquête préliminaire visant le ministre, qui répète sans cesse son innocence, et son épouse désormais dans le collimateur. En outre, il est reproché à Woert d'être à la fois ministre et trésorier de l'UMP dont l'un des donateurs fidèles est… Mme Bettencourt. En sacrifiant ces deux secrétaires d'Etat, Sarkozy n'est pas sûr d'obtenir le résultat escompté, c'est-à-dire l'arrêt de l'offensive médiatico-politique contre son gouvernement, protéger son ministre du Travail et mettre fin à la grogne de l'opinion publique. Des réactions très vives se sont manifestées lundi dernier, comme celle du socialiste Cambadellis qui souligne : «Soit la démission des deux ministres est une tentative de l'Etat de jeter du lest, c'est tardif et pose plus fortement la question d'Eric Woert, soit ces démissions sont ‘‘spontanées'' et c'est l'image d'un délitement qui appelle un changement du gouvernement.» Dès hier, ce résultat est apparu vain car une nouvelle révélation donnée par le journal en ligne Médiapart est perçue comme un coup de tonnerre préjudiciable à Woerth et à Sarkozy. L'ancienne comptable de Liliane Bettencourt a, selon son avocat et le parquet, déclaré à la police que 150 000 euros en espèces avaient été versés à l'actuel ministre du Travail pour la campagne électorale de Sarkozy en 2007, ce qui est strictement interdit par la loi… L'Elysée comme Woerth nient les faits qui ont rendu la situation politique explosive au point que le président du groupe des députés UMP, Jean-François Copé, et l'ancien Premier ministre Jean-jPierre Raffarin ont demandé à Sarkozy de parler, voire de remanier son gouvernement.