La Fédération nationale des travailleurs du textile et du cuir (FNTTC/UGTA) décide d'une grève générale à la rentrée sociale. « La situation du secteur se détériore de plus en plus et les dirigeants refusent de prendre langue avec le partenaire social. C'est grave. Cette grève sera l'expression collective du mécontentement des 15 000 travailleurs et une dénonciation commune des dérives enregistrées dans le secteur », souligne le secrétaire général de la FNTTC, Amar Takdjout. La date et la durée de cette grève seront fixées en septembre. Le débrayage, qui concernera Texmaco (groupe textile), C & H (confection), Wood Manufacture (groupe industriel bois) et Leather Industry (groupe industriel cuir), sera accompagné de rassemblements à Alger, au niveau de la direction générale du groupe Texmaco et de la SGP du secteur pour dénoncer « leur mauvaise gestion ». « Nous allons également adresser une lettre ouverte au président de la République pour l'informer de la situation du secteur et lui faire part des doléances des travailleurs », ajoute M. Takdjout, qui accuse les SGP d'avoir agi à contresens des orientations du gouvernement qui prône une relance de l'économie. Les actions de protestation ont été décidées, hier, lors d'une réunion au niveau du siège de la fédération à Alger, ayant regroupé les responsables syndicaux des différentes filiales du groupe Texmaco. Au cours de cette réunion, qui a duré plusieurs heures, les responsables syndicaux ont vertement critiqué la politique des SGP et dénoncé le silence des hautes autorités du pays sur ce qui se passe dans le secteur. Les quelque 24 filiales du groupe Texmaco connaissent toutes les mêmes problèmes : instabilité managériale, blocage administratif, problèmes d'approvisionnement en matière première, non-application de la nouvelle grille des salaires… La décision prise en juin dernier de centraliser l'achat de la matière première pour l'ensemble des filiales du groupe en créant l'Union du textile, a été battue en brèche par les syndicalistes. « Cette décision va paralyser les entreprises, car l'opération de l'achat de la matière première n'a pas été encore lancée », relève Abdelhamid Chikouche. Certaines entreprises ayant conclu des marchés avec l'armée ou avec le ministère de la Solidarité nationale, pour la confection de 350 000 tabliers pour les écoliers, se plaignent déjà du manque de matière première et craignent de perdre leur marché. Pour M. Takdjout, cela démontre l'absence de stratégie de développement et le sens de la gestion par anticipation. « Priver les entreprises de matière première, c'est les condamner à fermer », dénonce-t-il, tout en soulignant que la plupart des entreprises du secteur fonctionnent à peine à 30% de leurs capacités productives en raison de cette contrainte et de bien d'autres. « S'il y avait eu une meilleure régulation du marché et des incitations à l'investissement, on aurait pu se maintenir et même créer des emplois », a-t-il soutenu. M. Takdjout pose, dans ce sillage, le problème de la gestion des entreprises et surtout de la ressource humaine qui fait de plus en plus défaut. « Lorsqu'on place à la tête d'une entreprise une personne qui n'a aucune connaissance dans le secteur, c'est en quelque sorte la pousser à mettre la clé sous le paillasson », souligne-t-il. Un représentant syndical de Soietex (Tlemcen) a, de son côté, indiqué que le secteur du textile se vide d'année en année de ses cadres compétents, entre techniciens, ingénieurs et managers. « Nous avons beaucoup subi. Il est temps de réagir et d'exprimer tous ensemble notre mécontentement », lance-t-il à l'endroit des autres syndicalistes. Boualem Battache, secrétaire général du syndicat de Sotradal de Boufarik, spécialisée dans la confection des drapeaux, a vivement dénoncé l'importation du drapeau national de mauvaise qualité et aux couleurs non conformes à celles définies par la Constitution. « La fabrication de drapeaux est un travail minutieux qui nécessite la plus grande rigueur et un savoir-faire. Nous fabriquons le drapeau national et tout autre drapeau pour la Présidence et le ministère de l'Intérieur. Nous utilisons du taffetas, alors que le drapeau importé est fait en polyester sans le respect ni de la forme ni de la couleur. C'est grave », fulmine-t-il, affirmant que si on la laissait travailler, la Sotradal a toutes les capacités de répondre aux besoins du marché national. Ces dernières années, la tendance est à la fermeture des entreprises plutôt qu'à la relance de la production. Pourtant, la demande existe. Il suffit de créer les conditions nécessaires au développement des entreprises. C'est ce que demandent les travailleurs du secteur.