La décision a surpris et déçu plus d'un. La licence d'interprétariat et de traduction est gelée sine die. Les nouveaux bacheliers ont découvert avec étonnement l'absence, dans la liste des filières qui leur sont proposées, du choix « 803 » qui désigne d'ordinaire cette branche. Les étudiants n'ont pas été seuls à être mis devant le fait accompli ; même les responsables de ce département ont été surpris. D'ailleurs, le chef du département d'interprétariat et de traduction, M. Boughambouz, l'avoue ; il dit avoir appris la nouvelle « comme Monsieur tout le monde ». « Nous n'avons pas été officiellement saisis par le ministère de l'Enseignement supérieur ou par le rectorat de l'université de Bouzaréah », déplore-t-il. Et d'ajouter : « Nous l'avons appris lorsque, à l'instar des autres structures universitaires, nous avons été destinataires de la liste concernant l'ouverture des spécialités. L'interprétariat n'y figurait plus. » La filière est-elle définitivement sacrifiée ? « Non, loin de là ! », tente de rassurer le recteur de l'université de Bouzaréah, Abdelkader Henni. Selon lui, « cette suspension n'a rien de définitive, puisqu'il ne s'agit que d'un gel » afin de laisser le temps aux responsables d'effectuer un « nettoyage ». « Une mise à niveau est en fait plus appropriée », tempère-t-il. La décision du ministère – injoignable durant la journée d'hier – est motivée par le piètre niveau enregistré sur les bancs de cet institut. « Il a été décidé de repousser cette formation spécialisante en transformant ce cursus en post-graduation. Cependant, la formule définitive n'a toujours pas été adoptée », explique M. Henni. Plusieurs options sont envisageables. « La première, dont je suis partisan, est que cette spécialité soit dorénavant un mastère qui sera ouvert aux détenteurs d'une licence en langues arabe ou étrangères. Ces diplômés devront naturellement passer un concours d'accès, car les places y seront limitées, contrairement à ce qui s'est fait au cours des années précédentes », expose-t-il. Ce qui, prédit M. Henni, conférera à ces étudiants la base requise de connaissances, de compétence, de maîtrise des langues et de culture. L'une des autres « renaissances » proposées est de faire de cet institut une école supérieure. « Cette solution est la plus appropriée », juge quant à lui M. Boughambouz. Des pôles d'excellence pour un niveau en déperdition « La solution est d'ouvrir, par exemple, trois écoles régionales d'interprétariat et de traduction, puis d'en ouvrir l'accès, sur concours toujours, à toutes les licences », énumère-t-il. Et de poursuivre : « L'avantage est que ces pôles pourront former des professionnels généralistes, mais aussi et surtout des interprètes et traducteurs spécialisés en droit ou en histoire, par exemple. » Mais quel que soit le sort réservé à ce qui était il y a quelques années encore un prestigieux institut, les avis des professionnels du domaine et même des novices en la matière sont unanimes. « C'est une excellente initiative qui permettra de séparer le bon grain de l'ivraie », insiste M. Boughambouz, conforté dans ce sens par le recteur Henni. « La capacité d'accueil de cet institut est, idéalement, de 150 nouveaux étudiants chaque année. Toutefois, par la force des choses et la pression publique, il enregistre plus de 800 inscriptions à la rentrée », avance-t-il. Capacités dépassées, encadrement insuffisant et mal formé, détérioration des conditions d'enseignement ont eu raison de l'instruction réputée dispensée naguère. « Toutes ces défaillances ont inévitablement eu des répercussions plus que négatives sur la formation des diplômés. Et, au fil des années, le niveau n'a eu de cesse de chuter », déplore-t-il.