Le scénario est rodé à force d'être répétitif. Il a été payant lors de la dernière présidentielle. Alors, le président est déjà candidat à sa propre succession et récidive. Après le mouton dans la baignoire, l'excision, la France tu l'aimes ou tu la quittes, place à la causalité délinquance-immigration. Du FN pur jus. Donc, le candidat Sarkozy lance une polémique, la presse amie fait des « reportages » pour illustrer le bon sens de ses propos, sa garde rapprochée et les aboyeurs en chef font dans la surenchère, la gauche et les associations s'indignent. Et comme cette fois-ci le gouvernement est pris dans l'incendie des affaires et la crise de confiance, et à moins de deux ans des élections, la droite française allume des contre-feux grossiers et sort la grosse artillerie. Soudainement, tous les problèmes seraient d'origine exogène. Il y aurait d'un côté les bons indigènes et ceux qui sont venus s'y greffer, les allogènes, qui sont menacés d'être déchus de leur nationalité. Ce week-end, la droite s'est lâchée sur les étrangers. Le gouvernement et l'UMP emboîtent le pas à Nicolas Sarkozy sur le thème de l'insécurité, en proposant d'étendre les motifs de déchéance de la nationalité et de mettre en prison des parents de mineurs délinquants. Le chef de l'Etat a ainsi menacé de déchoir de la nationalité française toute personne d'origine étrangère qui porterait atteinte à la vie d'un représentant de l'autorité publique. Le ministre de l'Intérieur, Brice Hortefeux, condamné pour injures raciales, estime ainsi que la déchéance de la nationalité doit pouvoir être prononcée « aussi en cas d'excision, de traite d'êtres humains ou d'actes de délinquance grave ». N'hésitant pas à aller plus loin, le député Eric Ciotti, « monsieur sécurité » de l'UMP, annonce qu'une future proposition de loi doit permettre d'imposer aux mineurs condamnés un plan de probation sous la responsabilité des parents, qui s'exposeraient à des peines allant jusqu'à deux ans de prison et 30 000 euros d'amende en cas de violation. Déchéance morale La maire de Montreuil, Dominique Voynet (Verts), dénonce « les amalgames qui ne font que souffler sur les braises déjà fumantes du racisme », concernant les Roms et les gens du voyage, jugeant l'attitude de Nicolas Sarkozy d'« irresponsable ». « On peut parler de déchéance morale de la part du président de la République, il est totalement irresponsable de montrer du doigt de la sorte des communautés entières sans faire la moindre distinction », dénonce l'ancienne ministre de l'Ecologie. Pour le parti socialiste, cet écran de fumée a pour objectif de sauver le soldat Eric Woerth, ministre du Travail, et à masquer le bilan de la droite. « La dureté des mots et la dérive des propositions n'ont d'égal que l'ampleur des échecs de Nicolas Sarkozy en matière économique et sociale, comme en matière de sécurité. Il ne faut pas chercher ailleurs cet affolement de la droite. Nous ne laisserons pas stigmatiser les étrangers, pas plus que les Français issus de l'immigration ou les gens du voyage, comme l'ont fait honteusement le président de la République et sa majorité », a déclaré Martine Aubry, secrétaire générale du PS, qui promet que son parti ne laissera « pas masquer ces échecs, comme les affaires qui touchent aujourd'hui la droite, par un écran de fumée jouant sur les peurs ». La Cimade, de son côté, estime que le président Sarkozy « tient un discours qui peut être celui de la droite extrême ». « J'ai du mal à comprendre le lien entre les problèmes de violence à Grenoble et les étrangers sans papiers. C'est de la manipulation de l'opinion. Les annonces de Sarkozy sur les sans-papiers ne seront pas suivies d'effet, puisque les droits des sans-papiers ont déjà été rabotés », estime Jérôme Martinez, secrétaire général de l'ONG d'aide aux immigrés.