Le président brésilien, Jair Bolsonaro, a menacé vendredi de retirer son pays de l'Organisation mondiale de la santé (OMS) pour protester contre son «parti pris idéologique», rapportent des médias. «Je vous le dis ici, les Etats-Unis sont partis de l'OMS, nous y songeons, à l'avenir (…). Soit l'OMS travaille sans parti pris idéologique, soit nous la quittons aussi. Nous n'avons pas besoin de gens de l'extérieur pour donner leur sentiment sur la santé ici», a-t-il déclaré à la presse à Brasilia. Tout au long de la crise du coronavirus, J. Bolsonaro a imité son homologue américain, Donald Trump, en minimisant la gravité de la maladie, en exhortant à maintenir une activité normale et en vantant l'efficacité d'un traitement qui divise les scientifiques, l'hydroxychloroquine. S'exprimant sur ce dernier sujet, le président brésilien s'est dit peu étonné qu'une étude dans la revue médicale The Lancet, qui concluait à l'inutilité du traitement, ait été fortement remise en cause puis retirée. Cette rétractation a poussé l'OMS à reprendre les essais cliniques sur la molécule. «Trump leur a retiré l'argent et ils sont revenus sur tout», a relevé Bolsonaro. «La chloroquine est de retour», a-t-il ajouté. Dans son dernier bilan publié vendredi soir, le ministère brésilien de la Santé a cessé de donner le nombre total de morts, qui atteint 35 026, pour ne révéler que celui des dernières 24 heures (1005). Jeudi, ce total était devenu le troisième le plus élevé dans le monde, derrière les Etats-Unis et le Royaume-Uni, mais devant l'Italie. Le Brésil a recensé plus de 645 000 cas, un nombre que bien des spécialistes considèrent comme largement sous-évalué, faute de tests en nombre suffisant. Par ailleurs, la Cour suprême du Brésil a interdit vendredi les descentes des forces de sécurité dans les favelas de Rio de Janeiro pendant la pandémie de Covid-19, après des critiques contre des incursions policières meurtrières. Durant la crise sanitaire, les opérations de police dans les zones pauvres de la ville ne devront avoir lieu que dans des cas «absolument exceptionnels» et avec une autorisation préalable du bureau du procureur, a décidé le juge Edson Fachin. «Des incidents récents ont rendu plus préoccupantes les opérations armées de l'Etat dans les communautés de Rio de Janeiro» et «la pandémie qui oblige les gens à passer la majeure partie du temps chez eux (…) en accroît les risques», selon un communiqué de la Cour suprême. Le juge Fachin a mentionné le cas d'un adolescent noir de 14 ans, Joao Pedro Mattos Pinto, tué le 18 mai dans la maison de son grand-père durant une opération de la police fédérale avec des agents d'élite de la Police civile à Sao Gonçalo, banlieue pauvre de Rio. Selon ses proches, les policiers à la poursuite de suspects ont fait irruption en tirant par rafales et en lançant des grenades dans la maison où l'adolescent jouait avec ses cousins. Plus de 70 impacts de balles ont été retrouvés sur les murs, les fenêtres ou les appareils électro-ménagers. La police dit avoir transporté Joao Pedro en hélicoptère pour tenter de le secourir, mais sans prévenir sa famille qui n'a retrouvé le corps que 17 heures plus tard, à la morgue. «Rien ne peut justifier qu'un enfant de 14 ans reçoive plus de 70 tirs», a estimé le juge. Malgré la pandémie, cet incident et d'autres similaires ont déclenché dans les favelas de Rio des protestations contre les violences policières. Le 15 mai, 13 personnes ont ainsi été abattues lors d'une même opération policière au Complexo do Alemao, ensemble de favelas du nord de Rio. La police a justifié ces morts en affirmant avoir réagi à une attaque de narcotrafiquants lourdement armés. En avril, les forces de l'ordre de l'Etat de Rio ont tué 177 personnes, 43% de plus que lors du même mois de l'année dernière, selon les derniers chiffres officiels. Et les incursions policières meurtrières ont continué en mai. Le Paraguay refuse de rouvrir les frontières avec son voisin Par ailleurs, le Paraguay a affirmé vendredi se refuser à rouvrir sa frontière avec le Brésil, tant que son voisin serait confronté à une «vague» de contaminations par le coronavirus. Des commerçants paraguayens privés de leurs clients frontaliers ont plaidé pour cette réouverture, mais d'après le directeur de la veille sanitaire, Guillermo Sequera, elle serait prématurée. «La situation au Brésil est assez chaotique… Nous allons attendre que passe la vague au Brésil pour commencer à parler de réouverture de la frontière», a-t-il déclaré à la presse à Asuncion. «Cela dépend beaucoup de ce qui se passe à Foz de Iguazu», ville frontalière brésilienne, a-t-il ajouté. «Nous, nous nous protégeons de Sao Paulo et Rio de Janeiro», deux foyers très importants de la maladie. Depuis fin mai, quelque 6000 Paraguayens émigrés sont revenus dans leur pays, et le nombre de ceux qui souhaiteraient encore le faire pourrait dépasser 25 000, a indiqué le ministre des Relations internationales, Federico Gonzalez. Tout entrant est contraint à une quarantaine de 14 jours dans l'un des plus de 50 hôtels réservés à cette fin dans le pays.