L'instauration du semi-week-end en Algérie depuis un an a amélioré incontestablement la productivité de l'économie nationale en général et du système bancaire et financier en particulier. Tel est du moins la conviction profonde de Abderrahmane Benkhalfa, délégué général de l'Association des banques et établissements financiers (ABEF), que nous avons contacté hier. Cependant, tient-il à préciser, « ce n'est qu'un élément qui concourt au renforcement de la productivité et des gains réels ». Pour notre interlocuteur, il n'y a pas eu de changement majeur sur le plan du fonctionnement puisque les banques avaient adopté déjà cette formule. Le réaménagement des journées de repos a supprimé le double week-end qui désavantageait les 40 000 agents bancaires. « C'est un problème social qui a été réglé », nous dit-il. Par ailleurs, Il n'y a plus de distinction entre les secteurs économique et bancaire. L'optimisation du jeudi a permis une meilleure intégration : « Un gain de 50% de productivité », le quantifie Benkhalfa. Le fait d'homogénéiser est un élément important. Au niveau national, désormais, la clientèle a les mêmes plannings et journées de travail avec les différentes banques. En réalité, le week-end du vendredi-samedi était déjà en vigueur depuis des décennies pour le secteur bancaire et les assurances, qui n'auraient pas pu supporter une interruption de quatre jours sur sept dans leurs relations avec l'étranger. Réelle avancée ou demi-mesure Les banques avaient reçu une dérogation pour un repos hebdomadaire « spécial ». Selon la Société financière internationale (SFI), filiale de la Banque mondiale, chargée des opérations avec le secteur privé, l'Algérie perdait jusqu'à 1 milliard de dollars, soit 700 millions d'euros, par an en raison du décalage entre le week-end local et le week-end universel en place dans les pays occidentaux et avec lesquels l'Algérie réalise l'essentiel de ses échanges commerciaux. Cette organisation particulière de la semaine, adoptée en 1976 sous le président Boumediène, ne laissait que trois jours de travail commun à l'Algérie et à l'écrasante majorité de ses partenaires commerciaux. Les services gouvernementaux algériens ont, de leur côté, estimé les pertes à 150 millions d'euros par an. L'Algérie était l'un des rares pays à avoir gardé un week-end décalé par rapport au reste du monde avant de prendre, l'année dernière, la décision de réaménager ce week-end suivant les nouvelles données économiques. Le Conseil des ministres a entériné cet état de fait le 21 juillet, avec entrée en vigueur le 14 août, mais a tenu à conserver le vendredi « jour de congé officiel » puisque jour sacré de la grande prière. La décision du gouvernement ne répond pas aux attentes des partisans du week-end universel, qui estimaient que faire du vendredi une journée ouvrable ordinaire constituait un gain au plan de l'économie. Le week-end universel est une affaire exclusivement économique et sociale, un mode d'organisation harmonisant les jours de travail et de repos pour permettre aux acteurs économiques et sociaux de différents pays de s'adonner aux échanges dans les meilleures conditions possibles. Faire autrement, comme c'est le cas de l'Algérie et de quelques rares Etats islamiques, revient à s'offrir le luxe de faire perdre à l'économie nationale, qui entretient des relations d'affaires avec le reste du monde, plusieurs jours ouvrables. En Algérie, le retour au week-end universel a de tout temps buté sur l'opposition des milieux islamo-conservateurs pour qui le repos du jeudi-vendredi fait partie des « constantes identitaires nationales ». Plusieurs entreprises privées ont basculé vers le semi-week-end universel bien avant la décision du gouvernement. On peut citer Siemens Algérie, ArcelorMittal Annaba (filiale du géant mondial de l'acier), la Nouvelle conserverie algérienne (NCA), Schneider Electric, Air Liquide, Djezzy et Nedjma. Ces changements s'expliquent, selon toute vraisemblance, par des impératifs économiques. Les filiales algériennes des sociétés étrangères installées en Algérie sont contraintes de se rapprocher un tant soi peu du week-end universel pour mieux travailler avec leurs entreprises mères. Les entités économiques algériennes, quant à elles, veulent réduire le décalage existant avec leurs fournisseurs étrangers. Il s'agit ainsi de décisions qui visent à défendre l'intérêt de ces entreprises dans une économie de marché à forte concurrence. Une année après son entrée en vigueur, les avis restent partagés sur son efficacité entre ceux qui la considèrent comme une réelle avancée et ceux qui l'expliquent comme une demi-mesure.