Chercher le «oui» dans le «non», telle est l'incroyable posture à laquelle est réduit le pouvoir en place au lendemain d'un référendum qui a attiré dans les centres de vote moins d'un électeur sur quatre. Bancal et improvisé, tout l'échafaudage politique mis en place ces derniers mois par les décideurs s'effondre avec ce bruit sourd que renvoie le boycott sans précédent de la consultation électorale destinée à valider une révision constitutionnelle qui avait fait l'économie d'un processus constituant. Le plan était trop ambitieux et trop spectaculaire pour un régime qui n'en finit pas de réaliser l'ampleur de son anachronisme et de son obsolescence. Inauguration de la Grande et nouvelle Mosquée d'Alger, organisation d'un référendum voulu déterminant, coïncidant de concert avec le 66e anniversaire du déclenchement de la Guerre de Libération nationale. C'est, en bout de course, un hôpital aux moyens médicaux les plus développés qui s'est imposé devant un lieu de culte surdimensionné et le rendez-vous électoral décidé unilatéralement ne pouvait pas être jumelé avec la célébration d'une date qui marque une rupture avec l'ordre établi et un changement du cours de l'histoire. La démarche erratique des autorités a ramené la crise politique à la case départ et prolonge le règne d'un système qui épuise ses forces dans le maintien d'un statu quo dangereux pour le pays. Jusqu'au jour du vote, dimanche, le déni de la réalité a été cultivé jusqu'à son paroxysme, alors que le verdict des électeurs était criard et sans équivoque. Tirés de leur retraite pourtant méritée, les représentants de l'autorité des élections, devenue prématurément une relique de l'ancien système, transformaient la défiance en engouement. Les signes avant-coureurs de cet affaissement politique étaient précédemment livrés par des ministres en exercice qui affichaient, à des tribunes prétendument électorales, l'étendue du fossé qui sépare les citoyens des gouvernants. Nombre de voix, à l'intérieur et à l'extérieur du régime, ont parié sur l'autorité pour reprendre une voie constitutionnelle d'apparence consensuelle et une vie politique régulière. Elle s'avère insuffisante et contreproductive, à part obtenir des résultats d'élections, autrefois d'un niveau totalitaire et à présent infinitésimaux, et qui ne peuvent pas s'inscrire dans une réelle œuvre de construction nationale. Le maître-mot qui s'impose aujourd'hui est l'ouverture, en direction de la société et des forces politiques de l'opposition, lesquelles, même en subissant les coups de boutoir des autorités, restent des organisations qui ont une véritable capacité de structuration et d'expression des aspirations citoyennes. Les joutes politiques ne peuvent plus avoir pour cadre, ni épilogue, des salles d'audience, encore moins la prison. La réhabilitation du politique, donc de la citoyenneté, est la plus grande urgence que dicte l'issue du scrutin de dimanche. Avec comme corollaire la levée de ce climat lourd et délétère inhibant toute expression d'une opinion opposée, qui, comme le dit la rue, n'est pas un délit. Advertisements