Rapatriement, fermeture des frontières, autorisation de voyager, rapatriement des dépouilles des Algériens décédés à l'étranger, émigration clandestine, le député à l ́Assemblée populaire nationale (APN) Noureddine Belmeddah nous révèle, dans cet entretien, certaines vérités concernant les nouveaux défis qu'affrontent les Algériens établis à l ́étranger, surtout depuis l ́apparition de la pandémie de Covid-19. – Le programme de rapatriement effectué depuis cinq pays, à savoir la France, l'Allemagne, l'Espagne, le Canada et les Emirats arabes unis, lancé le 23 décembre 2020 et prévu jusqu'au 31 janvier 2021 a été subitement suspendu. Pourquoi, à votre avis ? Croyez-moi, je n'ai pas cessé, à travers le courrier, de sensibiliser les hautes autorités du pays, dont le président de la République et le Premier ministre, leur demandant d'ouvrir les frontières pour permettre à nos concitoyens bloqués de pouvoir rentrer au pays. Au départ, il y a eu un écho favorable à nos sollicitations et une promesse que l'opération de rapatriement allait être facilitée et surtout qu'elle n'allait pas être stoppée. Malheureusement, nous avons été choqués par la décision de suspension des vols de rapatriement sans préavis et sans explications de la part des services concernés. Il a été ainsi décidé de ne garder que trois vols à partir de Paris dans le sillage de la troisième vague de Covid-19 qui touche plusieurs pays. J'ai alors saisi, avec mon collègue le sénateur Abdelouahab Benzaim, le président de la République lui demandant d'ouvrir des dessertes à partir de tous les pays et sans inscription préalable et d'autoriser nos ressortissants à rentrer au pays via d'autres compagnies aériennes. – A combien estimez-vous le nombre d ́Algériens coincés aux quatre coins du monde ? Je n'ai personnellement pas de données exactes, mais je sais qu'il y a beaucoup de nos concitoyens qui avaient dûment quitté le territoire national avec des visas touristiques et qui sont bloqués à ce jour, notamment en Turquie où ils sont des milliers. C'est-à-dire qu'il y a un nombre considérable d'Algériens attendant avec impatience de rentrer au pays pour différentes raisons, dont la scolarité des enfants et les malades. Il y a hélas des cas tragiques qui nécessitent urgemment d'êtres rapatriés. Figurez-vous que certains avec qui nous avons échangé éclatent en sanglots quand ils racontent leur souffrance de ne pouvoir rentrer en Algérie. – Le gouvernement a fait machine arrière sur l'engagement de l'Etat à prendre en charge les frais de rapatriement des dépouilles des Algériens décédés à l'étranger. Une disposition de la loi de finances complémentaire (LFC) 2020 vient d'annuler une loi dont vous êtes justement à l ́origine, en revenant aux dispositions de l'article 92 de la loi de finances 2016 disposant que l'Etat prend en charge les frais de rapatriement seulement des «personnes nécessiteuses». Que s'est-il passé exactement ? Le transfert des dépouilles des Algériens décédés à l'étranger est un sujet qui tient en haleine notre communauté depuis des années. En tant que député de l'émigration, j'ai évidemment pris à bras-le- corps cette épineuse question. Je rappelle ainsi que j'étais à l'origine de la disposition relative à la prise en charge par l'Etat des frais de rapatriement des dépouilles introduite dans la loi de finances 2014 et qui a été rejetée par le gouvernement, la commission des finances et la majorité des partis politiques. Il a fallu attendre le mois d'avril 2016 pour que cette disposition entre en vigueur après la promulgation des textes d'application, qui expliquaient que cette facilitation profitera uniquement aux ressortissants dont les ressources ne suffisent pas pour rapatrier leurs proches décédés. Depuis, des dizaines de milliers de dépouilles ont été rapatriées jusqu'à l'arrivée du président Tebboune, qui a élargi cet avantage à tous les Algériens décédés à l ́étranger, quel que soit leur statut social, c'est-à-dire exactement comme je l'avais proposé dans la première mouture. Mais coup de théâtre, cette disposition a été une nouvelle fois amendée avant son adoption en mai 2020, dans le cadre de la loi de finances, quand le gouvernement avait invoqué les effets de la double crise financière et sanitaire. On est revenu à la formule de 2015, qui limite la prise en charge des rapatriements des dépouilles aux seules personnes nécessiteuses. – Depuis quelques mois, 4 jeunes harraga observent un sit-in devant le consulat d'Algérie à Alicante pour demander des laissez-passer pour revenir en Algérie. Que savez-vous de cette histoire ? Oui, en effet, c'est la triste réalité que vit un nombre important d'Algériens qui ne disposent pas de documents de résidence ni de passeports, parmi eux, ceux qui étaient arrivés ces derniers mois en Espagne à bord de ces embarcations de la mort. J'ai renc ontré ces malheureux qui regrettent leur aventure, et j'ai transmis leurs préoccupations au consul qui les a reçus et les a informés qu'il a sollicité l'autorisation des autorités algériennes pour leur remettre des laissez-passer pour pouvoir rentrer au pays. A l'heure actuelle, le consul dit n'avoir pas encore reçu de réponse d'Alger, au prétexte que la priorité des rapatriements est donnée aux ressortissants qui disposent de documents de résidence. J'ai également saisi, dimanche dernier, le ministre des Affaires étrangères au sujet de l'application de la loi relative au transfert des dépouilles des personnes de conditions modestes et j'en ai profité pour l'informer sur le problème des harraga bloqués ici, en Espagne, sans papiers. Advertisements