Ouverture de la 70e session de l'AP-OTAN à Montréal avec la participation du Conseil de la nation    "Les jeunes entrepreneurs... pari de l'Algérie triomphante", thème d'une journée d'étude à Alger    Loi de Finances 2025: promouvoir l'économie nationale et améliorer le cadre de vie du citoyen    Le président de la République préside une réunion du Conseil des ministres    Travaux publics: coup d'envoi du 20e SITP avec la participation de 232 exposants    Rencontre entre les ministres de l'Education nationale et des Sports en prévision du Championnat national scolaire des sports collectifs    Examens de fin d'année session 2024 : début des inscriptions mardi    Manifestations massives dans plusieurs capitales du monde réclamant la fin de l'agression sioniste contre Ghaza    Tous les responsables sionistes doivent être poursuivis par la CPI pour leurs crimes à Ghaza    Palestine: 144 colons sionistes prennent d'assaut l'esplanade de la mosquée Al-Aqsa    Kayak/Canoë et Para-Canoë - Championnats arabes 2024 (1re journée): l'Algérie décroche 23 médailles dont 9 en or    Le procureur de la Cour pénale internationale exhorte tous les pays à coopérer sur les mandats d'arrêt    La Chine exprime son soutien au mandat d'arrêt contre Netanyahou et Gallant    Génocide en Palestine occupée : L'OCI salue les mandats d'arrêt de la CPI contre deux responsables de l'entité sioniste    L »importance de la stabilité des marchés pétroliers et énergétiques soulignée    Les six nations qui n'iront pas à la CAN-2025    CAN féminine 2024 : L'Algérie dans un groupe difficile en compagnie de la Tunisie    Le huis clos pour l'ASK, l'USMAn, le CRT, et le SCM    Foot/Jeux Africains militaires-2024: l'équipe nationale remporte la médaille d'or en battant le Cameroun 1-0    Les cours du pétrole en hausse    Les pratiques frauduleuses de certaines marques de charcuterie dévoilées    Conférence sur l'importance de l'expertise scientifique    Arrestation de deux individus pour trafic de drogue dure    Les auteurs du cambriolage d'une maison arrêtés    Timimoun commémore le 67e anniversaire    Générale du spectacle «Tahaggart… l'Epopée des sables»    Irrésistible tentation de la «carotte-hameçon» fixée au bout de la langue perche de la francophonie (V)    Tunisie: ouverture des Journées Théâtrales de Carthage    Tlemcen: deux artistes d'Algérie et du Pakistan lauréats du concours international de la miniature et de l'enluminure    Décès du journaliste Mohamed Smaïn: la Direction générale de la communication à la Présidence de la République présente ses condoléances    Lancement de la seconde phase de l'opération de dotation des foyers de détecteurs de monoxyde de carbone à Jijel et Annaba    Kayak/Para-Canoë - Championnats arabes 2024(1re journée): l'Algérien Brahim Guendouz en or    Nâama: colloque sur "Le rôle des institutions spécialisées dans la promotion de la langue arabe"    Le président de la République préside la cérémonie de prestation de serment de la nouvelle Directrice exécutive du Secrétariat continental du MAEP    L'ANP est intransigeante !    Les ministres nommés ont pris leurs fonctions    L'Algérie happée par le maelström malien    Un jour ou l'autre.    En Algérie, la Cour constitutionnelle double, sans convaincre, le nombre de votants à la présidentielle    Tunisie. Une élection sans opposition pour Kaïs Saïed    Algérie : l'inquiétant fossé entre le régime et la population    BOUSBAA بوصبع : VICTIME OU COUPABLE ?    Des casernes au parlement : Naviguer les difficiles chemins de la gouvernance civile en Algérie    Les larmes de Imane    Algérie assoiffée : Une nation riche en pétrole, perdue dans le désert de ses priorités    Prise de Position : Solidarité avec l'entraîneur Belmadi malgré l'échec    Suite à la rumeur faisant état de 5 décès pour manque d'oxygène: L'EHU dément et installe une cellule de crise    Pôle urbain Ahmed Zabana: Ouverture prochaine d'une classe pour enfants trisomiques    







Merci d'avoir signalé!
Cette image sera automatiquement bloquée après qu'elle soit signalée par plusieurs personnes.



60e anniversaire de l'assassinat de Roger Gavoury : Le premier fonctionnaire français tué par l'OAS
EXCLUSIF
Publié dans El Watan le 31 - 05 - 2021

Je vous le rappelle au nom du droit des morts à la parole et à la mémoire : l'OAS m'a tué !
C'était il y a soixante ans jour pour jour.
C'était surtout quarante jours après le putsch d'Alger : Alger, où j'avais la charge du maintien de l'ordre et de la sécurité publique.
Sur le moment, les autorités civiles, militaires et judiciaires ont fait les choses en grand :
– j'ai bénéficié d'une cérémonie d'obsèques solennelle en l'Ecole de police d'Hussein Dey ;
– on a déposé sur mon cercueil, outre la croix de la Valeur militaire avec étoile d'argent qui m'avait été attribuée à la date du 21 avril 1961 (!), la médaille de chevalier de la Légion d'honneur et la médaille d'honneur de la police, décernées ces dernières à titre posthume ;
– j'ai été cité à l'ordre de la nation ;
– on m'a promu contrôleur général de la Sûreté nationale ;
– une fois ma dépouille transférée en métropole, le ministre de l'Intérieur, Roger Frey, s'est rendu sur le lieu de ma sépulture et a assisté à mon inhumation ;
– les participants à mon assassinat ont été identifiés, recherchés, interpellés, traduits en justice et, pour trois d'entre eux, condamnés à mort et exécutés ;
– mon nom est inscrit sur une stèle présente depuis juin 2005 dans l'enceinte de l'institution qui forme les commissaires de police à Saint-Cyr-au-Mont-d'Or ;
– il est également gravé sur deux monuments aux morts, car mon acte de décès a été revêtu en novembre 1961 d'une mention marginale : «Mort pour la France».
Nombre de mes collègues, de hauts fonctionnaires, de journalistes, d'historiens m'ont consacré quelques pages de leurs ouvrages, contribuant ainsi à l'entretien de mon souvenir, au détriment cependant de la considération due à tant d'autres policiers de tous grades et membres des forces de l'ordre abattus par l'OAS et soumis à la loi de l'oubli.
Le sort particulier qui m'a été réservé, je le dois à la date de mon assassinat davantage qu'à l'émotion suscitée par les circonstances dans lesquelles il a été commis.
J'ai en effet été la première victime causée par cette organisation dans les rangs de la fonction publique de l'Etat.
Mais que reste-t-il aujourd'hui de tout cela ?
Je laisse au plus jeune de mes fils, devenu orphelin de guerre à l'âge de onze ans, le soin de vous l'exposer, investi qu'il est depuis une quinzaine d'années dans la défense, contre vents mauvais et marées brunes, de la mémoire de l'ensemble des victimes de l'OAS. Roger Gavoury


Il y a soixante ans, jour pour jour, deux des membres du «quarteron de généraux en retraite», Maurice Challe et André Zeller, étaient condamnés par le Haut Tribunal militaire à quinze ans de détention criminelle pour s'être rendus «coupables l'un et l'autre d'avoir, en avril 1961, et notamment les 21 avril et jours suivants, en tout cas depuis temps non prescrit, sciemment dirigé et organisé un mouvement insurrectionnel».
Il y a soixante ans, jour pour jour, l'OAS assassinait à coups de poignard de parachutiste le commissaire central d'Alger, Roger Gavoury, faisant de mon père le premier fonctionnaire de l'Etat tué par cette organisation. Celle-ci s'était signalée quatre mois auparavant en poignardant dans le dos un avocat libéral algérois, Me Pierre Popie : c'était le 25 janvier 1961, quelques jours avant l'acte de naissance officiel de ce groupe armé qui ne tardera pas à s'ériger en authentique partie belligérante dans le cadre de ce conflit entre la France et sa colonie algérienne.
Dans les quarante-huit heures suivant la mort de mon père, Le Monde écrira : «Commissaire central à Casablanca et, après l'indépendance marocaine, principal conseiller français du gouvernement chérifien pour les questions concernant la police, M. Roger Gavoury avait pu attirer sur lui, au Maroc ou à Paris, la haine d'éléments extrémistes.»
En poste au Maroc d'août 1955 à février 1959, il aura connu, en effet, le changement de statut de ce pays et en aura techniquement assisté les responsables pour ce qui concerne l'organisation de la direction générale de la sûreté nationale (fondée le 16 mai 1956 et confiée à M. Mohammed Laghzaoui) ainsi et surtout que pour la mise en place de la relève des fonctionnaires de police français (3822 au 2 mars 1956) par des personnels marocains (1774 à la même date).
Mais il ne connaîtra pas l'indépendance de l'Algérie, alors même qu'en prenant ses fonctions de commissaire central le 23 mai 1961, il s'était adressé à ses collaborateurs en ces termes : «L'horizon commence à blanchir et bientôt, je l'espère, luira sur l'Algérie l'aube de la paix. Je voudrais, de toute mon âme, être le Central de la pacification, la vraie cette fois, celle des esprits. Je rêve d'une Alger où les hommes s'entr'aiment enfin, sans plus être séparés par des races, des religions ou des mers.»
Survivant à une blessure contractée lors d'une opération de maintien de l'ordre au Maroc grâce à l'un de ses collaborateurs secouriste, payant de sa personne en se portant constamment aux endroits où la violence des manifestations algéroises de décembre 1960 prenait la forme la plus dangereuse, afin de limiter les heurts entre les communautés, visé par un attentat au plastic commis dans son studio le 14 avril 1961, mon père se croyait protégé par le sort. Mais la baraka ne vaut pas assurance contre la mort.
Privé dès l'enfance du droit à la vie ou à la vue, privé d'un bras, d'une jambe ou du membre le plus proche de leur famille, tel a été le sort des victimes de la guerre d'Algérie. Respectueux de leur devoir filial de mémoire, les descendants de victimes civiles et militaires de l'OAS ont dû assister, impuissants, à l'absence de devoir de mémoire de l'Etat et se résoudre à se passer de la reconnaissance officielle par la Nation de leur souffrance si singulière.
C'est en vain que j'ai attendu, quatre longues semaines durant, l'annonce par le président de la République d'un geste à l'occasion du 60e anniversaire de l'assassinat de mon père : cf. infra le texte de la correspondance dont je l'ai rendu destinataire le 1er mai (extraits).
Pour l'honneur retrouvé de l'Etat face aux nostalgiques du putsch d'Alger.
Dans le cadre d'une cérémonie associative encadrée par des partisans du putsch des généraux et d'anciens jusqu'au-boutistes de l'Algérie française, Madame la ministre Geneviève Darrieussecq a déposé en votre nom, le vendredi 26 mars, une gerbe de fleurs devant le Mémorial national des
«Morts pour la France» en AFN, quai Branly à Paris.
Dans le prolongement immédiat de ce geste en leur direction, un ancien officier de gendarmerie ayant appartenu au «SO» du Front national et un général radié des cadres de l'armée à titre disciplinaire par décret du 23 août 2016 se sont attelés à la rédaction d'un pronunciamiento, puis à la recherche de soutiens y compris parmi les militaires d'active, et ils ont fait publier leur texte dans un hebdomadaire le jour même du 60e anniversaire du putsch d'Alger le 21 avril 1961.
Dans l'exercice de ses fonctions à la tête des services de maintien de l'ordre républicain dans le Grand Alger, mon père, Roger Gavoury, commissaire central adjoint puis commissaire central, a dirigé la lutte contre l'OAS, dont il a été la première victime dans les rangs de l'Etat, le 31 mai 1961 : il a été cité à l'ordre de la Nation et la mention «Mort pour la France» a été apposée sur son acte de décès. Trois des dix participants à son assassinat ont été condamnés à mort et exécutés.
Il me paraît y avoir lieu de lever toute ambiguïté sur le sens à donner à votre contribution à la commémoration de la manifestation algéroise du 26 mars 1962 intervenue sur appel de l'OAS à l'insurrection ; il importe également d'exprimer votre désapprobation à l'égard de ceux qui, aujourd'hui, déshonorent la République en rompant ce pacte de neutralité et de loyauté auquel ils sont légalement tenus.
C'est dans cette double perspective que je vous propose de bien vouloir vous recueillir avec moi, le 31 mai, devant la première stèle érigée par une collectivité publique «En hommage à toutes les victimes de l'oas en Algérie et en France, civils, militaires, élus, magistrats, fonctionnaires, défenseurs des institutions et des valeurs de la République» : Elle a été dévoilée le 6 octobre 2011, au cimetière du Père-Lachaise, par M. Bertrand Delanoë, alors maire de la capitale.
Rien n'est venu, alors même que sa présence en ce lieu et à cette date aurait pu consacrer sa conception conciliatrice des mémoires de la guerre d'Algérie en en élargissant le champ.
La proposition que je m'étais permis de lui soumettre ne tendait pas à obtenir un geste compensatoire ou de réparation de l'erreur ayant consisté à honorer le souvenir d'alliés objectifs de l'OAS sans s'être soucié au préalable des quelque 2700 victimes de cette partie belligérante dans le conflit entre la France et l'Algérie.
Il s'agissait, en effet, d'une demande positive, visant à ce que soit posé un acte ayant valeur de symbole d'un sursaut mémoriel au bénéfice des serviteurs loyaux des institutions de la République à l'époque où celle-ci vacillait.
Bien entendu, l'intervention entendait également montrer à Monsieur Emmanuel Macron l'état de vigilance et le niveau d'exigence des familles de victimes de l'OAS au regard du respect du principe de pluralité dans la gestion de la politique publique de mémoire concernant la guerre d'Algérie.
Que M. Benjamin Stora reçoive ici l'expression de ma vive gratitude, puisqu'il était disposé à prendre part à cet hommage aux côtés du chef de l'Etat et de représentants de deux associations de victimes.

Par Jean-François Gavoury , Sur procuration paternelle
Advertisements


Cliquez ici pour lire l'article depuis sa source.