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Empreinte
L'écriture de la nuit
Publié dans El Watan le 28 - 04 - 2005

Les photographes coloniaux qui ont repris la suite des peintures orientalistes ont mis en branle l'encerclement des corps, des architectures et des scènes de la vie quotidienne fantasmés, en les bourrant de leurs propres signes, plutôt pitoyables et maussades jusqu'à l'éclatement de l'autre - l'indigène - dans un étourdissement mécanique démuni de tout ésotérisme et de toute métaphysique.
Poussant l'exaspération jusqu'à l'intolérable désagrégation du sens, dans une ellipse chaotique, burlesque et chargée de sous-entendus et de malentendus dramatiques ; faisant fi du chagrin et du malheur du sujet convoité ; à travers une vision stéréotypique, grâce à une intériorité fallacieuse et emberlificotée et une extériorité cannibale et vorace. La première photographie coloniale a été réalisée en Algérie en 1857 Par F.-J. Moulin, à la demande de Napoléon III ; mais c'est bien plutôt, en 1827, que Nicéphore Niepce inventa la photographie qu'il appela, à ce moment-là, l'héliographie, c'est-à-dire l'écriture par le soleil. C'est aussi l'année où le dey d'Alger donna un coup d'éventail au consul de France en Algérie ; ce qui allait être à l'origine de la longue nuit coloniale durant laquelle les photographes orientalistes vont s'acharner à oublier la définition même de leur art. Ce n'est pas là un hasard. En effet, les deux dates (naissance de la photographie et début de la conquête de l'Algérie) coïncident parfaitement, parce que, comme l'écrit Itzhak Goldberg : « L'appareil photo est un outil qui permet d'enregistrer les traces du voyage. » Et donc les traces du crime odieux commis dans cet Orient trop présent et trop absent et qui est surtout une image mentale, un fantasme et une perversion - tout en même temps - qui préexistent à la vraie découverte de l'Autre. Ce fatras de choses qui encombrent la tête du photographe colonial débarqué à Alger fausse et rature constamment le corps signifiant où se fondent et s'enchevêtrent plusieurs figures qui sont des défigurations, en réalité, aboutissant toujours à une tautologie désastreuse et à une contradiction dramatique que révèle avec beaucoup de finesse Itzhak Goldberg : « Faisant ses débuts avec l'histoire, la photographie coloniale finit par l'évacuer complètement. » En effet, les premiers photographes français ont été envoyés en Algérie pour des missions précises dont le but est de constituer une iconographie officielle et essentiellement militaire et dont le cas le plus flagrant est celui d'Eugène Delacroix, peintre de génie, qui mit son talent au service des généraux, de la conquête de l'Algérie et, plus tard, du Maroc. En regardant ces photographies d'Alger, on est frappé par le dépassement permanent du sujet réel par le fantasme à la fois débridé et effrité du faiseur d'images et qui aboutit à un renversement paradoxal et à une incarnation perverse instituant et reconstituant une réalité avec son espace-temps chamboulé, voire détraqué et parfois même - génocidaire (telles certaines cartes postales représentant des Algériens pendus, et envoyées par les Européens à leurs parents et amis en France, avec ce commentaire générique : « Bons baisers d'Algérie » !). Dès lors, nous ne sommes donc pas impressionnés (comme le devrait être une plaque ou une pellicule) mais nous avons, plutôt une impression que toutes ces belles maisons, ces structures urbaines, ces femmes à la fois cloîtrées, dénudées, mises à nu et donc violées, sont fausses et qu'elles sont mises en scène d'une façon désopilante, si ce n'était l'horreur de la réalité coloniale. Alger apparaît, à travers cette symbolique lamentable, comme forclose, flouée et faussée parce que le photographe s'obstine, en vain, à ouvrir un monde qui lui est irrémédiablement fermé et où s'incisent les lacis verglacés, les traits marbrurés et les nuances imperceptibles du mouvement de la vie réelle qui échappe, donc, complètement au regard de l'intrus, du voyeur et de l'envahisseur. Absence alors du signe algérien dont on fait une périphérie très vague, un ailleurs exotique qui échappe à toute tentative de mainmise ou de violation, parce que les empreintes digitales de la ville sont effacées et, du coup, elles ne renvoient plus qu'à une fausse identité, à une sorte de pseudonyme allégorique et fantasmatique qui n'a aucune prise sur le réel. Comme si les photographes européens voulaient enfermer la ville et les gens qui l'habitent dans une sorte de temps irrattrapable, figé, mort, déjà ! Avant la première prise. Ainsi l'utopie versatile et perverse du réalisateur est prise à son propre piège, elle devient « atopique » selon Itzhak Goldberg, parce que noyée dans une nostalgie facile et poisseuse qui évacue dès lors toute la douleur du monde colonisé et tout le malheur d'une ville que la colonisation a coupé de sa mer pour des raisons, à la fois militaires et mercantiles. Le photographe français n'a plus, dès lors, aucun talent à restituer ce monde tel qu'il est parce qu'il est démuni de tout remords, de toute compassion, de toute complexité et de toute complicité. Alger, ainsi prise, n'a aucune capacité de nous émouvoir, parce qu'elle est défigurée par les fantasmes et les chimères du voyeur colonial, l'œil glauque, voire aveugle, égrillard, trivial et surtout malveillant, dépravé et prédateur. En effet, ces faiseurs d'images ont oublié, en chemin, que l'histoire est un palimpeste qui s'efface et se réécrit, éternellement et d'une façon illimitée, avec la clarté et l'acuité de la conscience impitoyable crue et cruelle que nous impose la réalité du monde.

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