Serine est jolie comme un cœur, mais elle risque de mourir si on ne tente rien pour la sauver. C'est une irrésistible petite poupée blonde aux yeux bleus de 14 mois qui souffre depuis sa naissance d'une grave maladie cardiaque. Une cardiopathie congénitale cyanogène complexe (CCCC). Une malformation du cœur qui fait que le sang bleu et le sang rouge se mélangent. Son père est marin pêcheur, il trime toute la semaine et c'est tout juste pour nourrir sa famille. C'est donc sa mère, épuisée, qui se démène comme une folle depuis des mois pour éviter à son enfant un sort qu'on lui dit fatal. Avec l'aide de l'Association des femmes de pêcheurs et d'âmes charitables, elle arrive à payer des radiographies et à se rendre à Annaba pour faire examiner Serine par un grand spécialiste qui vient régulièrement de la capitale. C'est grave, Serine peut toutefois vivre mais il faut une prise en charge urgente et des soins à l'étranger. Mais il faut pour cela passer les écueils de l'administration. Le secteur sanitaire d'El Kala a apporté une aide précieuse lorsqu'il s'est arrangé pour que la maman et la petite Serine puissent, en octobre dernier, se rendre à Bou Ismaïl (Tipaza) où se trouve la seule clinique chirurgicale du pays qui peut statuer dans ce genre de cas. Mais alors que l'on croyait avoir franchi le plus dur, on renvoie Serine et sa maman après la consultation, avec l'engagement, non écrit, de les rappeler dans moins de deux mois ! Les praticiens de la clinique avaient manifestement fait un diagnostic différent et, c'est plus probable, on a donc renvoyé Serine avec la certitude qu'elle n'en avait plus pour longtemps et qu'il était inutile d'entreprendre quoi que ce soit. Mais Dieu va lui prêter vie et lorsque, il y a quelques semaines, nous avons appelé cette clinique pour nous enquérir des suites réservées au dossier de la petite Serine, on nous a répondu qu'il y a 3500 cas qui attendent. Ce qui confirme les appréhensions du médecin traitant. Et en plus c'est faux, nous affirment des familles de Annaba, Guelma et Skikda qui ont connu les mêmes soucis et avec lesquelles nous sommes entrés en contact. « Si la petite malade d'El Kala était fille de ministre ou de wali, il y a longtemps qu'elle serait définitivement guérie. » Aujourd'hui, Serine est à l'hôpital d'El Kala où l'on tente tout ce qu'il est possible de faire pour la maintenir en vie. Son état est désespéré. Elle pèse seulement 6 kg et son corps bleuit chaque jour un peu plus. On vient d'informer sa maman qu'elle est convoquée à la clinique de Bou Ismaïl pour le 16 juillet prochain. Dans deux mois et demi ! La petite ne tiendra pas, dit son médecin, il faut vite l'évacuer à l'étranger. Mais pour cela, il faut de l'argent, beaucoup d'argent. Le plus dramatique dans l'histoire, c'est que les associations caritatives internationales ne peuvent pas prendre en charge les algériens car, répondent-elles, « l'Algérie est un pays considéré comme n'étant pas dans le besoin ».