Coup de théâtre hier au Conseil national économique et social (CNES) : son président Mohamed Salah Mentouri a déposé sa démission auprès du chef de l'Etat. Dans sa lettre de démission, révèle une source proche de l'organisation, la détérioration des rapports entre le chef du gouvernement Ahmed Ouyahia et Mohamed Mentouri a atteint le point de non-retour, poussant le premier responsable du CNES à remettre son tablier. Refusant de faire de son organisation « une caisse de résonance du gouvernement » ou de « jouer aux utilités » Mohamed Salah Mentouri, ajoute la même source, a préféré sortir par la grande porte depuis que le chef du gouvernement « s'emploie à lui chercher un remplaçant » et « fait tout pour mettre au pas le CNES ». « Le gouvernement ne veut pas d'un CNES autonome et veut réduire toutes les voix discordantes au silence », ajoute-t-elle. Les reproches exprimés dans la lettre de démission se focalisent sur la personne du chef du gouvernement et épargnent curieusement le président de la République. Contrairement au chef du gouvernement, indique notre source, le Président a parrainé la 8e rencontre des associations internationales des conseils économiques et sociales (AICES) tenue dernièrement à Alger et durant laquelle le président Bouteflika avait prononcé un discours. « Les chiffres du CNES agacent le chef de l'Exécutif » alors que le conseil « ne prétend pas être un contre-pouvoir, mais ne veut pas aussi être un appendice du Pouvoir », clame un membre qui veut garder l'anonymat, pour qui « la droiture du président du CNES contrarie les desseins du chef de l'Exécutif ». Connue pour ses publications et analyses pertinentes sur divers secteurs d'activité et ses rapports critiques sur les conjonctures économiques et sociales du pays, le CNES est un organe consultatif régi par les dispositions du décret présidentiel n°93-225, du 5 octobre 1993 portant sa création. Mohamed Salah Mentouri, à la tête du conseil depuis 1996, a assuré pendant deux années (2001-2003) la présidence de l'AICES. Investi par décret présidentiel, le président du conseil a pour missions notamment « de veiller au respect de l'application du règlement intérieur du conseil, de diriger ses délibérations et d'exercer son autorité sur les services administratifs et techniques du conseil » entre autres. Le CNES rassemble, en son sein, les représentants de neuf groupes socioprofessionnels (syndicat de travailleurs, groupements professionnels, patronaux, agriculteurs, associations à vocation sociale...), et bénéficie de l'apport d'experts et autres personnes qualifiées. Mohamed Salah Mentouri considère que « sa composante plurielle le prédispose à s'ériger en segment structuré, voire en pont avancé de la société civile en formation dans notre pays ». Pour Mentouri, le CNES ambitionne de « s'affirmer comme élément actif et composante majeure de la démocratie sociale, accompagnant et amplifiant le vaste processus de démocratisation en cours en Algérie, au sein duquel il ambitionne d'être le creuset de la citoyenneté économique en gestation ». Une tâche qui échoira désormais à son successeur, à moins d'une « OPA » de l'Exécutif sur cette institution, comme le craint son désormais ex-premier responsable.