Les entreprises françaises tentent de revenir en Algérie qui renoue avec la sécurité et où le climat des affaires tend à s'améliorer ,La volonté de se positionner sur le marché algérien est du reste perceptible à travers les foires et autres manifestations économiques auxquelles elles sont de plus en plus nombreuses à participer ,Le plan de soutien à la croissance économique, son budget quinquennal de 55 milliards de dollars et les besoins d'importations croissants de l'Algérie ne sont évidemment pas étrangers à ce regain d'intérêt pour le marché algérien. A travers des manifestations économiques comme la Foire internationale d'Alger et le Salon du bâtiment, on constate un net regain d'intérêt des entrepreneurs français pour l'Algérie ; mais sur le terrain, on voit malheureusement peu d'affaires se concrétiser, notamment en termes de partenariat avec les entreprises algériennes éligibles à la privatisation où on les attendait le plus. Que faut-il faire, selon vous, et quel rôle peut jouer une représentation diplomatique comme la vôtre pour que les investisseurs français s'impliquent davantage en Algérie ? Je crois que, en termes de privatisation, le programme du gouvernement est extrêmement dynamique et volontariste. Ce qu'il faudrait faire de plus, c'est renforcer la communication sur ce programme pour diffuser auprès des milieux d'affaires français les opportunités les plus importantes. A cet égard, la Mission économique de l'ambassade de France a un important rôle à jouer en partenariat avec les autorités algériennes, en particulier le ministère de la Participation et de la Promotion de l'investissement. Nous allons organiser dans les prochaines semaines et dans les prochains mois un certain nombre de réunions de sensibilisation à Paris et dans le reste de la France pour diffuser les principales listes d'entreprises qui sont proposées à la privatisation par le ministère de la Participation. Je crois donc qu'il faut des réunions très ciblées auprès des entreprises françaises pour mieux faire connaître ce programme. C'est certainement une des priorités de la Mission économique aujourd'hui. L'intérêt pour le marché algérien est affirmé par de nombreuses sociétés françaises. En matière d'investissement, on ne voit rien, ou en tout cas très peu, venir. Qu'est-ce qui explique, selon vous, leur réticence lorsqu'il s'agit de passer à l'acte ? Je crois en effet que les entreprises françaises qui sont de plus en plus nombreuses à prospecter le marché algérien, à travers notamment les foires et salons, attendent beaucoup de l'Algérie dans un processus marqué par une croissance économique très dynamique, par un besoin très important et un plan de relance disposant de moyens financiers considérables. Mais je crois aussi que cette attraction de l'Algérie se manifeste aussi, comme vous l'avez sans doute remarqué, par leur participation plus forte aux salons. A la prochaine Foire internationale d'Alger, elles seront environ 340 et, pour 40% d'entre elles, ce sera leur première participation à une foire organisée en Algérie. Je crois que certaines entreprises, en particulier les petites et moyennes, n'ont pas encore une image suffisamment précise et exacte de ce qu'est l'Algérie de 2005 dans la mesure où le pays a beaucoup changé. Il est important que la Mission économique, en partenariat avec la Chambre de commerce française en Algérie et avec les autorités et le patronat algérien, contribue à forger une image plus exacte de ce qu'est l'Algérie moderne. Une Algérie qui se réforme mais qui ne peut pas tout bouleverser du jour au lendemain. C'est en étant présentes en Algérie que les entreprises françaises pourraient impulser efficacement une nouvelle dynamique au processus de réforme... Tout à fait. Il faut que nos entreprises soient très présentes. Il faut qu'elles soient de plus en plus nombreuses dans les salons, qu'elles étudient les projets d'investissement, qu'elles se positionnent sur les grands projets du Plan complémentaire de soutien à la croissance (PCSC), à la fois sur l'ingénierie lorsqu'il s'agit de bureaux d'études et sur les réalisations d'équipements. Il faut également que nos entreprises soient mobilisées sur le programme de privatisation car leur rôle ne doit pas consister uniquement à vendre, mais à bâtir de véritables partenariats avec les entreprises algériennes. Elles sont déjà très présentes et leurs efforts se renforcent. On constate que les chambres de commerce françaises n'associent pas, ou en tout cas rarement, les hommes d'affaires français d'origine algérienne. Ils sont pourtant très nombreux et pour certains à la tête de prospères entreprises pouvant constituer un atout considérable pour le retour de l'investissement français en Algérie. Cet aspect-là est tout à fait pris en considération car, comme vous le soulignez, il y a un certain nombre d'Algériens ou de binationaux, nés en France ou qui y ont fait leurs études, qui reviennent aujourd'hui pour travailler, notamment dans des filiales de sociétés françaises ou de sociétés multinationales. Comme le nombre de filiales françaises augmente considérablement, il s'agit d'une catégorie de population qui peut légitimement se positionner pour prendre des postes de responsabilité dans ces sociétés. La question est tout à fait bien appréhendée par les chambres de commerce françaises qui organisent des séminaires et autres rencontres pour effectuer un travail de sensibilisation. Des hommes d'affaires français nous ont affirmé hésiter à investir en Algérie en raison de l'archaïsme du système bancaire. Faut-il attendre que la réforme bancaire aboutisse pour qu'ils décident enfin de s'installer ou ne pensez-vous pas plutôt qu'ils pourraient sans crainte commencer avec ce qu'il y a, d'autant plus que des banques françaises susceptibles de les accompagner sont déjà installées en Algérie ? La réforme du système bancaire algérien devrait connaître une accélération en 2005 et 2006 au plan de la monétique et de la télé-compensation. De même, les banques françaises développent un important réseau d'agences, avec des plans de développement substantiels particulièrement pour les groupes français BNP Paribas, Société Générale et Natexis Banque Populaire. De ce fait, il faut que les entreprises françaises, notamment les PME avec les chambres de commerce qui les accompagnent, progressent en parallèle à ce mouvement. Il ne faut surtout pas qu'elles attendent jusqu'à ce que la réforme bancaire ait été menée suffisamment loin ; car si elles attendent trop longtemps, les concurrents prendraient leurs places sur un marché particulièrement attractif et devenu très concurrentiel. Que peut apporter de positif, selon vous, l'intégration des pays maghrébins à l'espace économique euroméditerranéen eu égard à leur incapacité à s'unir dans leur propre espace qu'est le Maghreb ? La question de l'intégration économique au sein des pays du Maghreb est très importante pour la croissance économique au sein de l'UMA. Les pays du Maghreb échangent très peu entre eux puisqu'ils représentent moins de 5 % du volume global du commerce extérieur de chacun des pays. On sait qu'il y a quelque chose à faire pour surmonter cette situation. Un élément qui peut effectivement aider les pays du Maghreb à surmonter l'obstacle est peut-être le processus euroméditerranéen qui connaît une dynamique réelle au plan économique à condition de créer à terme une zone de libre-échange entre les pays européens et ceux de la rive sud de la Méditerranée. On peut espérer que ce processus allant vers la constitution d'une zone de libre-échange régionale exerce un effet d'entraînement sur l'union du Maghreb pour forger lui-même son propre espace économique. Et il n'y a rien de mieux que l'intensité des relations d'affaires entre entreprises maghrébines pour donner un caractère concret à cette union aujourd'hui encore à l'état de projet. Vous me donnez là l'occasion de dire quelques mots sur le 4e Symposium d'El Oued auquel nous assistons. Il a été très positif en permettant notamment de poser la problématique des alliances stratégiques interentreprises de manière globale et de manière plus particulière entre les entreprises du Maghreb. Je tiens à remercier MM. Djillali Mehri et Brahim Benabdesslem de MDI-Alger qui l'ont organisé avec beaucoup de brio. Je crois que ce 4e Symposium a mis en valeur la question-clé qui se pose aujourd'hui dans le secteur privé. Faut-il un partenariat stratégique ; et si la réponse est oui, à quelles conditions ? Faut-il qu'il soit durable ou uniquement pendant le temps du démarrage ? Les propositions qui ont été présentées contiennent beaucoup d'enseignements que je ne manquerai pas de transmettre à un certain nombre d'entreprises françaises, afin qu'elles puissent réfléchir sur ce concept d'alliance stratégique, avec l'espoir qu'il trouve une application avec les entreprises algériennes.