La Constitution européenne est peut-être décédée à Paris. Les Français n'en veulent pas. Jugé trop libéral, le traité constitutionnel a été rejeté sans ambiguïté. Plusieurs pays européens semblent vouloir emboîter le pas à la France. Le réveil a été douloureux. Les Français ont rejeté massivement le traité constitutionnel. Il régnait lundi une ambiance de fête et de résignation à Paris. La victoire du non est plus que nette avec 54,87% de suffrages exprimés. A Matignon, le Premier ministre et ses collaborateurs font déjà leurs valises. L'avenir politique de Jean-Pierre Raffarin est scellé depuis hier. Le vote a fait deux victimes : le président Jacques Chirac et la direction du Parti socialiste. Le désaveu est cinglant pour les partisans du oui. Le gouvernement et le chef de l'Etat paraissent très discrédités. L'intervention télévisée de Jacques Chirac n'a pas convaincu grand monde. Plusieurs voix, essentiellement les souverainistes de droite et des leaders de gauche, ont demandé au président de tirer les conclusions, en plus clair de démissionner et de dissoudre l'Assemblée nationale. A moins de deux ans des présidentielles, ils ont peu de chances d'être écoutés. Jacques Chirac avait anticipé cette défaite en dissociant son sort personnel du résultat du référendum. Pour le chef de l'Etat et pour M. Raffarin, c'est le troisième échec électoral en quinze mois, après les régionales et les européennes. Dans son discours, le président de la République avait souligné le besoin d'une nouvelle impulsion, une dynamique qui passe nécessairement par le départ du Premier ministre qui a battu tous les records de l'impopularité. Sa démission est imminente. D'ailleurs, les prétendants à Matignon n'ont pas cessé de défiler à l'Elysée. Les pronostics donnent l'actuel ministre de l'intérieur, Dominique de Villepin, comme favori, à égalité avec le président de l'UMP, Nicolas Sarkozy. Les conséquences du non A gauche, la victoire du non est aussi un séisme politique. La direction du PS se trouve dans une crise. Selon les sondeurs, 60% de ses sympathisants ont rejeté le traité constitutionnel. Un congrès devrait permettre à l'automne de solder les comptes entre le premier secrétaire François Hollande et les adversaires du non, en particulier le numéro 2 du parti Laurent Fabius. La guerre au leadership semble inévitable. Le non français donne des sueurs froides à Bruxelles. Les représentants des institutions européennes ont mis le drapeau en berne, prenant acte « avec tristesse ». « Le traité n'est pas mort », tente de se rassurer le président de l'Union européenne en exercice, le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker. L'exemple français peut faire tache d'huile en Europe. La Hollande, qui doit voter demain, a pris le chemin du refus. Tous les sondages indiquent la victoire du non à 60%. Tony Blair, Premier ministre anglais, a décidé de « réfléchir » sur le référendum qu'il a promis pourtant à ses concitoyens. Pour lui, la Constitution européenne est morte avec le refus français. Et sera enterrée avec celui des Pays-Bas.