Pour la presse européenne, comme pour la présidence de l'Union, le principal responsable de l'échec du sommet de Bruxelles n'est que « le perfide Albion » Tony Blair. Le Premier ministre britannique n'a trouvé soutien qu'en Angleterre. Les poncifs sont de retour, les caricatures aussi. On invite de nouveau l'histoire pour trouver des explications au refus de Tony Blair de céder le moindre centime à la ristourne accordée à l'Angleterre par l'Union européenne. Vilipendé comme le principal responsable de l'échec du sommet européen de Bruxelles, le Premier ministre britannique tente de se rattraper. Les nouveaux pays entrants, l'Allemagne, le Luxembourg et surtout le président en exercice de l'Union européenne, le Premier ministre luxembourgeois Jean-Claude Juncker, parle de « crise profonde » et Tony Blair d'avoir voulu cet échec en exigeant une remise à plat des finances communautaires. Très remonté, il a affirmé qu'il sera absent le 23 juin à Bruxelles, date à laquelle la Grande-Bretagne détaillera son plan pour l'Europe. Le Premier ministre britannique, qui va hériter le 1er juillet, en pleine crise, de la présidence de l'UE, veut apaiser la colère de ses partenaires, sans pour autant céder sur la ristourne. Un exercice très difficile depuis son refus de la position consensuelle proposée par le Luxembourg, le gel du rabais à 5,5 milliards d'euros. Le couple franco-allemand, soudé de nouveau, ne cache pas son mécontentement. L'Europe politique, en crise depuis la victoire du non en France et en Hollande, est moribonde. L'intransigeance britannique au cours des négociations sur le budget 2007-2012 est perçue comme une volonté d'imposer le modèle anglo-saxon, plus libéral. « Les gens en Europe ne sont pas satisfaits de la direction prise par l'Europe. Nous devons changer de vitesse pour nous adapter au monde dans lequel nous vivons. Si nous voulons supprimer le rabais britannique, nous devons supprimer la raison pour ce rabais. C'est une anomalie à cause d'une anomalie », explique Tony Blair en rappelant que 40% du budget européen étaient engloutis par la politique agricole commune (PAC). Selon lui, les nouvelles priorités sont la pression de la mondialisation, les questions « de sécurité, de criminalité et d'immigration ». En clair, il s'attaque à la France et à l'Allemagne, principales bénéficiaires. Le chancelier allemand Gerhard Schröder a lui aussi imputé au Royaume-Uni, et aux Pays-Bas, l'échec du sommet : « L'UE n'a rien gagné, du fait de l'attitude des Pays-Bas et surtout de la Grande-Bretagne. » La presse française n'était pas tendre samedi vis-à-vis de Tony Blair. Ils évoquent les batailles militaires napoléoniennes et relancent le duel du « coq gaulois raillant la perfide Albion ». Waterloo et Trafalgar sont conviés à la table des insultes. L'analyse politique est étayée par un lexique militaire. Le quotidien régional Union fustige cet « intransigeant et intraitable Tony Blair, pétulant travailliste radin et profiteur, dans un costume thatchérien du plus mauvais goût ». La presse anglaise n'est pas en reste. Elle fait corps avec le Premier ministre et qualifie Jacques Chirac « de tueur politique sans conscience ». La présidence britannique ne peut pas plus mal commencer...