Chaque juillet, l'Algérie vibre de convulsions renouvelées de son histoire. Avec, comme problème chronique, un déficit criant de l'enseignement de la matière histoire dans les programmes de l'Education nationale. Juste après l'annonce faite enfin par le chef de l'Etat de la nécessité de bonifier sa place, un responsable du ministère a répercuté à la radio le projet d'augmenter son temps à la matière, même de quelques minutes, au détriment de la géographie. Mais cela n'est que contingence de forme à comparer au travail soutenu et souterrain qui a éradiqué toute volonté et vitalité en mesure d'asseoir les bases d'une école algérienne d'Histoire - et d'abord à l'université - ouverte aux principes universels de travail de la science. Parce que la bureaucratie et les partis pris sur les figures du combat de libération ont dicté les contenus, avec échelle dûment normée de la dose d'orthodoxie des acteurs et des héros, en jeux de miroir de légitimation des dominants du moment. Une historiographie qui a tendu réellement à réviser ou/et nier des faits saillants, exigeants d'examen critique. Histoire de faire oublier au bon peuple toutes les traces qui marquent objectivement les divisions, y compris fratricides, qu'a connues l'Algérie sur les chemins des libertés. La fabrique de versions triturées du passé algérien ne fonctionne pas seulement ici bien sûr. Des intérêts vitaux, de mémoire et d'image du pays, mais aussi de promotion académique personnelle, sont exacerbés en France, ancienne puissance coloniale. Il est sain pour l'histoire que M. Bouteflika pointe la charge de négationnisme et de révisionnisme contenue dans la loi française du 23 février dernier en ce qu'elle absout les crimes de la colonisation en « mission civilisatrice ». Mais ne nous leurrons pas encore ce lendemain de 5 Juillet : négationnisme et révisionnisme n'ont pas qu'une seule patrie géographique. L'Algérie officielle vient de baptiser (après le musée) une promotion d'officiers de la prestigieuse Académie de Cherchell du nom d'un ancien chef controversé de l'ALN. L'histoire, déjà ancienne, a gommé les questions sur ses responsabilités dans les massacres de Melouza ; la plus immédiate est aphone sur son activisme solidaire des promoteurs de la barbarie intégriste et ses miasmes d'aujourd'hui.