Les mots sont acérés et le constat en dit long sur un pays sans perspective ni avenir. El Hachemi Chérif, de sa maison à Alger où, diminué, est cloué au lit en otage d'une maladie, a adressé un long message aux participants du précongrès du MDS, qui s'est tenu jeudi dernier au Centre international de presse, dans la capitale. Lu par Saïd Kateb, membre du conseil national du MDS et président du précongrès, le message - du secrétaire général du MDS - est une philippique dressée contre les tenants du système en place, en premier lieu le président Bouteflika. « Le système actuel a largement épuisé tout son potentiel de progrès », a-t-il souligné dans le message. Ainsi pour lui, la crise socioéconomique s'aggrave de plus en plus au moment où il n'y a pas de « pilote pour suppléer aux défaillances du tableau de bord virtuel qui commande les affaires du pays ». El Hachemi Chérif soutient ainsi l'idée selon laquelle le pouvoir en place, et de tous les temps, n'a pas de projet de société et n'en aura jamais. Selon lui, la société aspire, bien entendu, à un projet d'avenir, « or Bouteflika n'en ressent pas le besoin ». Il reste convaincu que la force du système demeure, comme toujours, la rente pétrolière. A ses yeux, le président Bouteflika ne fait que « désunir, démobiliser et désorienter » comme il « impose la division » au moment où « l'Algérie a besoin d'union et de cohésion sociale ». En résumé : « Tout est bâti sur la ruse, la fraude, le mensonge, l'hypocrisie et la duplicité du discours. » Le leader du MDS estime, en outre, que l'Alliance présidentielle souffre et risque de tomber victime de ses contradictions. « Son alliance (l'Alliance présidentielle) triple ou quadruple, si l'on y ajoute l'UDR, en pâtit », a-t-il souligné, avant de se demander comment peuvent se rencontrer « les prétentions anti-intégristes de l'UDR - fussent-elles encouragées par le noyau du pouvoir pour phagocyter le RCD et le MDS - et celles islamistes du Hamas ». Ainsi, El Hachemi Chérif pense que Bouteflika trouve « sa » force et la capacité d'initiative dans son « caractère débridé, dont on disait dès le début de son premier mandat qu'il lui donnait la possibilité de tendre la main aux islamistes ». Dans le même ordre d'idées, le leader du MDS estime qu'il y a « une accélération de l'obsolescence de toute la classe politique », islamistes compris, tout en admettant qu'il s'agit là d'un processus entamé bien avant, sous la direction de Liamine Zeroual, alors président de la République. Il considère que le FLN et le RND ne pèseraient rien « s'ils n'étaient pas portés à bout de bras par les appareils et les moyens du Pouvoir ». Pour lui, Bouteflika, en s'entêtant dans sa stratégie, a fini par « abîmer les partis liés au système », lequel est « resté indemne ». El Hachemi Chérif, qui a fait un grand effort pour signer sa contribution à ce précongrès, ne doute pas que les militaires restent les principaux acteurs du jeu politique, que les cartes sont toujours distribuées par les mêmes mains et que l'anarchie et le désordre y règnent encore. A ses yeux, tout changement commencera par « le chaos (...) incontournable ». Ce qui veut dire un changement radical. Autrement dit, une rupture définitive avec le système en marche. Possible ? A partir de là, il invite les participants au précongrès à ouvrir le débat sur tout cela en vue d'aboutir à une approche bien réfléchie qui permettra au MDS de mieux jouer son rôle sur la scène politique. Hocine Ali, secrétaire général par intérim depuis que El Hachemi Chérif est tombé malade, a souligné, dans une introduction à l'ouverture du précongrès, l'opportunité qu'offre ce rendez-vous « pour répondre à la question de savoir quel congrès nous voulons tenir ». L'enjeu des élections Dans le sillage des préparatifs du 3e congrès du MDS, dont la date a été fixée pour les 22 et 23 décembre prochain, Hocine Ali a insisté sur la nécessité d'éviter de figer les orientations dégagées. L'essentiel pour lui est qu'on reste fidèle au patrimoine de réflexions et de luttes dont dispose le parti.De son côté, Hocine Ali a brossé un tableau noir de la situation politico-socio-économique du pays. « Jamais auparavant le pays n'a été aussi riche et jamais le peuple n'a été aussi pauvre », a-t-il indiqué. Pour lui, l'après-8 avril a créé deux parties. La première est « une coalition sans principe constituée de partis-Etat et d'islamistes agrégés au pouvoir autour d'intérêts étroits ». La deuxième est une opposition « tétanisée par les résultats de l'élection présidentielle (qui) se focalise sur des questions secondaires, se trompe d'ennemi, peine à retrouver ses marques et louvoie pour éviter de se prononcer sur les grands problèmes socioéconomiques ». A ses yeux, cette situation empêche l'émergence d'une classe politique démocratique « digne des sacrifices consentis par la société ». Evoquant l'amnistie générale, Hocine Ali a insisté sur « la nécessité absolue de rétablir la vérité ». Pour lui, il ne saurait être question « ni de pardonner, ni d'absoudre, ni d'amnistier les responsables et les exécutants des actes terroristes qui ont ensanglanté le pays ». En définitive, le MDS, comme le précise Hocine Ali, accorde un intérêt particulier aux prochaines élections locales et nationales. Il compte sans doute, suivant sa nouvelle orientation (ou stratégie) politique qui sera entérinée lors du prochain congrès, entrer dans la bataille électorale pour la première fois depuis sa création en 1999.