« Armstrong est certes ami de Bush. Je sais qu'il a voté pour lui. Mais je reste son fidèle supporter car ce qu'il fait est plus fort que la politique. » John Kerry Adversaire malheureux de G. Bush La veille de son arrivée triomphale aux Champs-Elysées, Armstrong avait réglé tout son monde, en remportant l'étape contre la montre. Non pas pour se rassurer, puisqu'il a fait le vide autour de lui, mais pour terminer en beauté, comme il l'a souligné devant la presse. Entouré de son clan, de ses enfants, il laissa éclater sa joie. « C'est un rêve pour moi, c'est ce que je voulais pour cette fin de course ». Dans le public, John Kerry admiratif, ne s'empêcha pas d'approcher le héros du jour, pour le féliciter. « Armstrong est quelqu'un d'incroyablement fort. C'est historique de gagner sept tours d'affilée. Sur le plan mental et des sacrifices, cela doit être bigrement éprouvant. Lance est allé au-delà des limites humaines. Moi qui suis régulièrement le Tour de France, j'en suis particulièrement impressionné », a avoué l'ex-rival de Bush, qui doit, à l'instar des puristes, regretter la fin d'une aventure, puisque le cycliste américain a décidé de mettre un terme à sa carrière et de tirer sa révérence. « Aujourd'hui, je suis convaincu plus que jamais d'arrêter. J'ai gagné le tour sept fois de suite, après ma maladie. Sur le plan financier, jamais je n'aurais pensé que ma vie, ma famille et mes enfants seraient dans une position aussi confortable. Je n'ai aucune raison de continuer. Je n'ai pas besoin de plus. Désormais, il faut laisser l'histoire suivre son cours. Vraiment, je n'ai pas de regrets... » Comment peut-on en avoir lorsqu'on a accompli une carrière aussi fantastique, que les aléas de la vie ont failli pourtant briser à jamais. Car Lance Armstrong a un palmarès impressionnant. Ce Texan, né le 18 septembre 1971, commence le cyclisme à 14 ans. Il signe son premier contrat professionnel en 1992. Il finit 152e au classement mondial. En 1993, il commence à être connu des amateurs de cyclisme, puisqu'il remporte sa première étape sur le Tour de France à Verdun. Il est aussi champion des Etats-Unis et 3e du tTour de Suède. Il grimpe à la 21e place du classement mondial. En 1995, il se spécialise dans les épreuves contre la montre. Fin 1996, il est 9e mondial et à son meilleur niveau depuis le début de sa carrière. Rongé par le cancer, il s'en sort par miracle Malheureusement, il contracte un cancer, juste après avoir signé avec l'équipe Cofidis et est écarté de la compétition pendant un an. Sa vie a failli basculer. Tout a commencé en octobre 1996. Il comptait alors parmi les plus grands cyclistes mondiaux. Il était l'heureux propriétaire d'une maison de rêve au bord d'un lac, d'une Porsche et d'une fortune qu'il ne devait qu'à lui-même. Lance a sans doute négligé les premiers symptômes du mal et a tout mis sur le compte de l'épuisement, jusqu'au moment où il s'est écroulé et que le diagnostic est tombé : cancer des testicules avec des métastases importantes au poumon. Chimiothérapie et opérations se succèdent. Ses sponsors le lâchent, sa carrière semble ruinée, on ne lui donne que peu de chance de survie. Sorti de l'hôpital, très affaibli, Lance Armstrong tente de reprendre l'entraînement. C'est catastrophique. Il est seul avec sa solitude, et personne dans le monde sportif ne lui accorde plus la moindre chance. Il s'acharne et redouble d'efforts. Sa mère, quelques amis irréductibles, une infirmière à laquelle il ne cesse de rendre hommage, et bientôt celle qui deviendra sa femme Kristin Richard sont à ses côtés lorsqu'il organise la première course des roses, afin de récolter des fonds pour la fondation caritative qu'il a créée - gagné par le doute, il décide même à un moment d'abandonner le cyclisme. Et puis, petit à petit, il se réapproprie sa forme et revient au plus haut niveau et gagne le Tour de France 1999. « Aussi bizarre que cela puisse paraître, je préfère le titre de vainqueur du cancer à celui de vainqueur du Tour, à cause de tout ce que cette expérience m'a apporté en tant qu'être humain, en tant qu'homme, mari, fils et père », conclut-il dans un témoignage émouvant. Le plus jeune champion du monde C'est que l'homme a dû batailler dur avec un courage exemplaire. John Wikockson, rédacteur en chef du magazine américain Velo News témoigne : « Je connais Armstrong depuis dix ans, alors qu'il était dans l'équipe nationale amateurs. Après, il est devenu le plus jeune champion du monde sur route professionnelle en 1993 à 21 ans et demi. A l'époque, il ne s'intéressait pas à la diététique, buvait et mangeait n'importe quoi. Il avait dix kilos de plus et était persuadé qu'il ne pourrait jamais briller en haute montagne. Les doutes seraient permis si Armstrong s'était révélé seulement après sa maladie. Or ce n'est pas le cas, il avait quand même gagné la Flèche Wallone. Avec le recul, il est d'ailleurs persuadé que le cancer le minait depuis plus longtemps. » Son corps s'est affiné et les kilos superflus ont disparu, à la grande joie de son entraîneur Carmichael. « Il est aussi fort mentalement. Il a battu le cancer et pour lui, tout est plus facile. Il me dit souvent : ‘‘Je voulais montrer qu'un type qui a eu le cancer, peut revenir au sommet.'' C'est vrai qu'il a voulu revenir trop vite et c'est la seule période au cours de laquelle, je l'ai entendu parler de tout arrêter. Il a aussi puisé sa force dans les déboires de son enfance. Sa mère a été abandonnée tôt par son père, qu'il n'a plus revu. Sa mère Linda, qui s'est remariée, est restée proche de lui. » Le témoignage du champion cycliste n'a rien de romanesque. Il n'évoque guère les envolées vers les sommets ou les victoires somptueuses, pour ne parler que de la pénibilité des tours de roue donnés l'un après l'autre, malgré toutes les adversités, des heures durant, dans la douleur extrême. D'ailleurs, il n'attribue sa victoire contre la maladie qu'à un « phénoménal coup de chance ». Et s'il avoue n'avoir pas encore tout compris de ce qui lui est arrivé - pourquoi il est tombé malade et pourquoi il a survécu - il sait qu'il est sorti de l'épreuve différent et plus riche humainement. C'est en 1999 que commence la formidable série qui le fera entrer dans la légendaire histoire de la petite reine. Après avoir remporté le prologue, Lance Armstrong gagne le contre-la-montre à Metz en rejoignant le spécialiste Abraham Olano. Il prend le maillot jaune qu'il ne quittera plus jamais à Paris. Il écrase ses rivaux dans la première grande étape de montagne à Sestrières. Il ne lui reste plus qu'à défendre ses positions dans les Pyrénées face aux attaques des Espagnols. A Paris, il devient le second vainqueur américain après Greg Le Mond, et ce, malgré un contrôle anti-dopage positif aux corticoïdes. Il échappe aux sanctions, en présentant a posteriori un certificat médical. Particulièrement nerveux, il s'illustre aussi en poussant le jeune coureur Bassons à abandonner le tour, en reprochant de clamer haut et fort son opposition au dopage et son statut de « coureur propre ». Depuis, entre Lance Armstrong et le Tour de France, c'est une fabuleuse histoire d'amour qui s'est achevée hier. Le dopage qui a éclaboussé le tour reste l'une des taches noires de cette épreuve sportive. Armstrong, à travers ses succès retentissants, n'a pas laissé indifférents les puristes qui soupçonnent le coureur texan d'avoir triché en utilisant des produits interdits, chose que le concerné nie farouchement. Accusé de dopage, il rejette tout en bloc Pourtant, lors du Tour de France 2000, France 2 a diffusé un reportage dans lequel on voit des personnels de l'US Postal jeter des seringues et des boîtes de médicaments, ce qui n'est pas une preuve de dopage en soi. L'année suivante, Armstrong précise consulter, depuis 1995, le docteur Ferrari, aujourd'hui condamné pour fraude sportive et exercice abusif de la profession de pharmacien. Puis en 2004, deux journalistes David Walsh et Pierre Ballester accumulent des révélations de sa masseuse et d'anciens coureurs, dont Greg LeMond, et d'anciens coéquipiers d'Armstrong. Convaincu du dopage de l'Américain, l'assureur texan SCA Promotions refuse de lui verser la prime promise de 5 millions de dollars pour sa sixième victoire. Le procès est encore en cours. L'entourage d'Armstrong a toujours plaidé son innocence et minimisé l'importance du dopage dans le cyclisme, mettant les accusations sur le compte de la jalousie. Pourtant, pour l'actuel tour et afin de prévenir toute tentation de dopage, des mesures de contrôle draconiennes avaient été prises. Armstrong n'a pas été épinglé et a survolé comme d'habitude l'épreuve qui s'annonçait pourtant difficile. En effet, le tour qui vient de s'achever n'a pas fait la part belle aux étapes alpines. Une façon de contrarier les projets de Lance de conquérir un 7e titre avant sa retraite ? Sur le papier, le tracé concocté par les organisateurs du tour a été pensé pour ne favoriser aucun style de coureur et laisser du suspens le plus longtemps possible. Hélas, il n'y a pas eu beaucoup d'émotions tant Armstrong a ravi la vedette à tous ses concurrents, qui sont rentrés dans les rangs dès le départ. Et lorsqu'il n'y a pas d'émotion et de surprise, la compétition perd de son charme et c'est peut-être pour cela que la retraite d'Armstrong a du bon, même si la silhouette de ce dernier planera longtemps sur les parcours traversés. Bon joueur, Armstrong, qui n'est nullement ingrat, a reconnu que son exceptionnelle réussite était une espèce de don de Dieu. « Je dois reconnaître que je suis béni d'avoir pu disputer autant de courses dans ma vie, je suis béni d'avoir remporté les championnats du monde et sept Tours de France. » Radieux après plus de deux semaines de courses éprouvantes, l'Américain a lancé : « C'était un défi que je m'étais fixé et je suis content de finir de la sorte. En tant que sportif, j'avais envie de me retirer en étant au sommet. » Déjà la veille, rayonnant après avoir distancé tous ses adversaires, il déclarait : « Gagner une étape n'était pas essentiel, mais je voulais prouver que je méritais ce maillot jaune. Nous avons toujours eu le même protocole dans le tour. Une attaque en montagne et deux bons chronos. Nous nous y sommes tenus cette année et cela a encore marché. » Le Texan va jouir d'une retraite bien méritée, en faisant un clin d'œil à ses pairs. « Il est important qu'il y ait de nouveaux visages, de nouveaux noms et de nouveaux champions, a-t-il précisé. Les gens oublient vite les champions du passé. » Mais Armstrong est plus qu'un champion exceptionnel. C'est un seigneur. Parcours Lance Armstrong est né le 18 septembre 1971 à Plano au Texas. Elevé seul par sa mère Linda, il grandit à Dallas. A l'âge de 13 ans, il commence à participer à des triathlons et devient pro à l'âge de 16 ans. Ensuite, il intégrera l'équipe cycliste Cofidis, mais celle-ci le décevra. En effet, en apprenant que Lance est atteint d'un cancer, les dirigeants refusent de l'aider. Il affrontera donc son cancer seul, soutenu par sa mère. Après beaucoup de souffrances et de courage, il retrouve une équipe et revient au meilleur niveau. Agé aujourd'hui de 33 ans, il a 7 tours de France à son actif, un record dans l'histoire de cette épreuve. Lance a aussi 3 enfants adorables (un petit garçon et de magnifiques jumelles) qu'il a eus avec Kristine, son ex-femme, puisqu'il vit maintenant avec Sheryl Crow. En bref, Lance est un homme courageux et déterminé.