Le 13 février 1960, la France a fait exploser sa première bombe atomique, trois fois plus puissante que la bombe A lancée sur Hiroshima en 1945, à Hamoudia, à une quarantaine de kilomètres de Reggane, dans le grand Sud algérien. Entre 1960 et 1966, la France a effectué quatre essais atmosphériques et treize souterrains, dont un, celui dit du Béryl (nom de code du tir) en mai 1962 à In Ekker au Hoggar, qui se termina en grave accident : un nuage radioactif s'échappe de la galerie souterraine et contamine les alentours. « Le premier essai, Gerboise bleue du 13 février 1960, ainsi que les trois suivants : Gerboise blanche du 1er avril 1960, Gerboise rouge du 27 décembre 1960 et Gerboise verte du 25 avril 1961, ont été effectués à partir d'une tour. Selon certaines indications, en particulier celles du physicien Yves Rocard qui assistait à ces expériences, les explosions ‘'eurent lieu à 100 m d'altitude, la moitié supérieure de la boule de feu orientée vers l'air libre et la moitié inférieure vers le sol tout proche''. S'ils ont bien été réalisés dans ces conditions, les quatre essais aériens de Reggane ont été à l'évidence très polluants », indique un rapport du Sénat français. El Watan a rapporté, en février 2004, le témoignage d'une ancienne assistante sociale dans le cadre de la coopération militaire française dans la région de la Saoura (Sud-Ouest) qui s'étend sur 500 km de Reggane aux frontières avec le Mali. Elle avait constaté de nombreux cas de malformation de membres supérieurs et inférieurs ainsi que des cas de cécité chez les enfants âgés entre un et quinze ans dans la région du Touat. Elle a également recensé à Zouiet Kunta des cas de femmes présentant soit une puberté tardive, soit une ménopause précoce (à 35 ans). Mais certaines sources vont encore plus loin évoquant « un acte de génocide » perpétré en 1961 contre 150 prisonniers algériens qui ont été attachés à un kilomètre du lieu d'un essai nucléaire à Reggane. En France, plusieurs actions en justice sont menées par d'anciens soldats, représentés par l'Association des vétérans des essais nucléaires (AVEN) - www.aven.org - qui s'estiment victimes de ces essais au Sahara et en Polynésie française. La presse française a révélé qu'en 1960 et 1961, l'armée française a profité des essais nucléaires dans le Sahara algérien pour organiser des manœuvres en milieu radioactif. « Les appelés cobayes n'ont jamais entendu parler d'indemnisation », a indiqué Le Point en 2002. Certains vétérans ont réussi à faire reconnaître à la justice française « l'exposition au risque nucléaire » comme cause déterminante de leur infirmité. Dans le texte de la plainte contre X déposée le 28 novembre 2003 par l'AVEN et l'association Moruroa e Tatou, on apprend que même le démantèlement des installations de tir a été réalisé de « façon sommaire », le matériel ayant été enfoui. Dans la région du Tan Affla, les tribus éloignées par les militaires français sont revenues avec leur cheptel sur le site des tirs nucléaires sans qu'elles soient prévenues. Mohamed Bendjebbar, chargé en mai 1967 de prendre en charge les infrastructures du site de Reggane, découvre un amas de pièces métalliques à côté du campement de Français qui prétendent travailler pour une société pétrolière. Ces pièces se sont avérées radioactives et Mohamed Bendjebbar, aujourd'hui président de l'Association des victimes algériennes, s'est retrouvé, quatre ans après cet incident, déclaré 100% invalide pour sigmoïdité chronique avec rectorargie, stéatose micro-vasculaire du foie, stérilité temporaire, raideur de l'épaule gauche, irradiation par métal radioactif n°688. Ses enfants ont aussi eu de sérieuses maladies. Dans le texte de la plainte, on signale que l'adjoint de Bendjebbar, l'adjudant Ahmed Kharout qui récupérait des pièces métalliques de même nature, est décédé en 1973 à 31 ans d'une fulgurante maladie. L'Etat algérien n'a pas demandé réparation.