Je m'appelle Catherine Poncin et je suis photographe... » Besoin d'en savoir davantage, il fallait aller découvrir son exposition intitulée « Palimpseste » au CCF de Constantine. Les tableaux de Catherine Poncin sont accrochés à la galerie du centre depuis son inauguration le 30 mai dernier et ce sont bien des tableaux car, dit-elle « je fais de la photographie plasticienne ». Son œuvre se définit, en effet, à l'opposé du photo reportage et exploite les vertus du numérique pour renforcer la prétention picturale. L'art de Poncin est puisé essentiellement dans la mémoire. La mémoire des lieux, des choses ou sa propre mémoire. Il tente d'associer très souvent des photos reprises ou bien repêchées dans des archives ayant un lien avec un sujet particulier qu'elle associe à des photos in situ. « Palimpseste » est un travail en rapport avec Voltaire. Ces clichés, composés telles des musiques à quatre temps ou à quatre tons, reflètent une partie de la vie et quelques bribes de la raison d'être de cet immense philosophe des Lumières. Une visite imagée dans le château où il a vécu ses vingt dernières années, devenu aujourd'hui un musée poussiéreux mais qui fait toujours la notoriété de la petite ville de Ferney. En couleurs, Poncin a fixé les gravures et les portraits composés pour le personnage ainsi que certains détails importants tels que sa robe de chambre, sa plume et le jardin qu'il a lui-même conçu. « Et puis, raconte l'artiste, il y avait un étage dans le château qui a été abandonné pendant plus d'un siècle avec fenêtres et volets fermés. » Symboliquement, Poncin a rouvert l'une de ces fenêtres avant de l'immortaliser en noir et blanc comme pour rappeler que Voltaire appartenait à ces siècles de lumière et qu'il voulait que de ce château, cette petite auberge de l'Europe, rayonnent toute une culture, des élans et de l'énergie qui partent de là et provoquent des polémiques, des discussions sur les idées, la littérature, le théâtre, enfin, tout ce qui l'avait animé. Le parti pris de la composition quaternaire est complété par des photos de presse qui renvoient au présent et font le lien avec les thèmes de la pensée voltairienne comme la justice, le clergé (photos du pape et de l'Eglise qu'il a combattue) et de la lutte sociale. Esthétiquement, l'œuvre de Poncin s'émancipe sous l'effet de la lumière et se suffit à elle-même dans un narcissisme scrupuleux. En somme, une photographie élégante et sociale qui se passe des formules d'école pour raconter la condition humaine et l'espoir du genre humain et ses princes de l'esprit tel le célèbre locataire de Ferney.