Une douzaine de soldats rwandais de la force de protection de l'Union africaine (UA) ont quitté hier Kigali pour le Darfour. Cette région est le théâtre d'un conflit qui oppose, depuis février 2003, l'armée soudanaise à deux mouvements rebelles : le Mouvement pour la justice et l'égalité (MEJ) et l'Armée de libération du Soudan (ALS). Les combats ont provoqué, selon l'ONU, le déplacement d'environ 1,2 million de personnes et la mort de 30 000 à 50 000 autres. Au total, 150 soldats rwandais sont attendus au Darfour dans le cadre de cette force. Celle-ci comprend 300 hommes, dont 150 soldats nigérians. La force de protection de l'UA a pour mandat de protéger les 120 observateurs de l'Union africaine chargés de superviser le cessez-le-feu signé en avril dernier entre le gouvernement soudanais et les rebelles. Elle peut également, dans la mesure de ses capacités, protéger les populations civiles, principales victimes du conflit. L'Arabie Saoudite a décidé, de son côté, d'ouvrir un pont aérien pour acheminer une aide humanitaire d'urgence au profit des réfugiés du Darfour. Constituée notamment de vivres et de médicaments, cette assistance sera acheminée à partir de Ryadh à bord de deux avions. Une équipe médicale saoudienne ralliera également la région. En réponse aux doutes formulés par certains membres du Conseil de sécurité de l'ONU quant à l'incapacité de Khartoum de mettre fin à la crise du Darfour, le président Omar Hassan Al Béchir a affirmé hier que le gouvernement soudanais était capable « de mettre fin à la sédition, restaurer la sécurité et la paix sociale et de préserver l'unité et la souveraineté du pays ». Dans son discours prononcé à l'occasion du jubilée d'or des forces armées soudanaises, il a accusé les « ennemis du Soudan d'attiser la sédition au Darfour afin de brader les accords de paix, d'empêcher le Soudan de cueillir les fruits de la paix et de le priver de la contribution de la communauté internationale au développement des régions affectées par la guerre ». l'ultimatum de l'onu Pour montrer la volonté de son gouvernement de parvenir au règlement définitif de la crise du Darfour, le ministre adjoint soudanais pour les Affaires étrangères, Nadjib Al Kheir Abd El Wahab, a déclaré vendredi dernier que le Soudan était prêt à reprendre les négociations avec les rebelles au Darfour sous les auspices de l'UA le 23 août prochain à Abuja. Le Conseil de sécurité de l'Onu a, rappelle-t-on, donné un mois à Khartoum, le 30 juillet dernier, pour reprendre le contrôle de la situation au Darfour. Cette reprise en main doit passer, selon l'ONU, par le désarmement des « milices pro-gouvernementales djandjawids ». Celles-ci sont accusées d'être « responsables d'exactions contre les populations d'origine africaine ». Dans le cas contraire, ce pays pourrait tomber sous le coup de sanctions. L'ultimatum de l'ONU reste toutefois fragile dans la mesure où il apparaît ne pas faire l'unanimité au sein de la communauté internationale. Le gouvernement saoudien s'est, à ce propos, montré opposé la semaine dernière à toute intervention militaire au Darfour et à toutes sanctions contre le Soudan. Moins tranchants, les Etats-Unis estiment pour leur part que les priorités définies par l'ONU, pour résoudre la crise du Darfour, ne sont pas les plus urgentes en raison de la nature du conflit. Dans un entretien accordé hier au quotidien soudanais Al Sahafa, le chargé d'affaires américain à Khartoum, Gerard Gallucci, a rejeté la thèse présentant la crise du Darfour comme un conflit racial. Le diplomate américain a affirmé que la guerre dans l'ouest du Soudan « n'est pas une guerre entre Arabes et Africains ». « Il n'y a rien de cela. Le terme djandjawids couvre les tribus qui ont rejoint les rangs du gouvernement pour défaire les rebelles », a déclaré M. Gallucci. Et d'ajouter : « Le gouvernement a armé des milices appartenant à des tribus arabes, et c'est la raison pour laquelle nous pouvons dire que la guerre n'oppose pas Arabes et Africains, mais le gouvernement aux rebelles. » La tâche urgente du gouvernement soudanais, a-t-il poursuivi, est l'arrêt des attaques contre les civils et non le désarmement des djandjawids. M. Gallucci a démenti, par ailleurs, l'information selon laquelle les Etats-Unis préparaient une intervention militaire au Soudan. A l'occasion, le diplomate américain a appelé Khartoum à accepter le plan de l'UA de déploiement d'une force de maintien de la paix au Darfour.