Les agents de l'immigration interpellent les usagers du métro qui parlent avec un accent « étranger ». Des milliers de passagers sont ainsi arrêtés à la sortie du métro, dans une opération que la police a voulu garder secrète, mais qui a été dévoilée par la presse. La police utilise des méthodes qui sont strictement interdites par la loi pour arrêter des personnes dont l'apparence ou l'accent les distinguent comme des étrangers et leur demander de prouver qu'elles ont le droit de résider légalement en Grande-Bretagne. L'objectif, selon le ministère de l'Intérieur, est d'arrêter les demandeurs d'asile dont la requête a été rejetée. Le porte-parole du Parti démocrate libéral a écrit au ministre de l'Intérieur, David Blunkett, pour lui fournir des explications sur cette initiative décrite par les organisations de défense des droits de l'homme comme « staliniste ». L'initiative a commencé au début du mois de mai de l'année dernière dans le cadre d'un programme de lutte contre l'immigration clandestine qui a déjà abouti à l'arrestation de plus d'un millier de personnes. Lors d'une opération au cours de laquelle le correspondant d'El Watan a été témoin, un certain nombre de gens à une station dans un quartier du nord de Londres ont été interpellés par des officiers équipés de gilets pare-balles et de menottes parce qu'elles avaient un accent étranger et ils leur posaient la question suivante : « Vous permettez qu'on vous demande de quelle nationalité vous êtes, et avez-vous un passeport pour le prouver ? » Un officier chargé de mener l'opération en question, Emma Cromack, a déclaré à un journal du soir, The Standard : « Si on entend quelqu'un parler dans une langue autre qu'européenne, nous l'approchons et lui demandons sa nationalité. Si la personne refuse de répondre ou agit de manière suspecte, nous demandons à la police d'aider à l'identification de la personne en question. » Certains des usagers de la station de métro dans le nord de Londres étaient choqués et ont même essayé de prévenir la police de ne pas procéder à ce genre d'interpellations. « Etat policier », a lancé à l'adresse des officiers de l'immigration un jeune homme. La presse s'est violemment attaquée au ministère de l'Intérieur, car la loi interdit formellement aux policiers d'interpeller des gens à cause de leur accent ou de leur apparence physique. « C'est un pas de trop », a indiqué à ce sujet Mark Oaten, le responsable des affaires intérieures du Parti démocrate libéral. De son côté, Barry Hill, un des responsables de l'organisation des droits civils, Liberty, a estimé que la procédure « ressemble aux pratiques utilisées par les anciens régimes communistes ». Keith Best, président de Immigration Advisory Service, qui prodigue des conseils aux demandeurs d'asile, note que l'initiative « est révoltante et ne manquera pas d'être perçue comme un manque de respect de la part de citoyens honnêtes ». La nouvelle s'est répandue comme une traînée de poudre dans les milieux des Algériens « harragas ». « Cela fait des mois que nous avons découvert l'opération, bien avant la presse », déclare à ce sujet Omar. Dans un café de Soho, plusieurs Algériens parlent de l'opération coup-de-poing et échangent des informations sur d'éventuelles arrestations de leurs copains. « De toute manière, on ne voyage plus en métro depuis la découverte de l'opération. On va à pied au boulot quand on habite près, ou alors on prend le bus, ou encore mieux un taxi clandestin qui coûte nettement moins cher que les taxis officiels. En plus, on connaît de nombreux chauffeurs qui sont eux-mêmes des clandestins et qui nous font payer la moitié de la course », commente Ali de Constantine. « Qu'ils le veuillent ou non, hna imoute Kaci », lance Omar.