Les villageois d'Aït Boumahdi, dans la daïra des Ouacifs, ont pu rompre avec le climat de morosité des journées chaudes de l'été en réussissant à organiser, du 15 au 20 août, une semaine culturelle en hommage aux héros de la révolution. Cette manifestation s'est voulu être un redémarrage de l'activité culturelle, en hibernation depuis l'été 1997, date de l'organisation du dernier festival dans le village. En collaboration avec le comité de village, les membres de l'association culturelle Tafsut n'80 ont concocté un programme d'activités très riche malgré le peu de moyens dont ils disposent et l'apport presque inexistant des autorités locales. L'organisation était parfaite et tous les villageois y ont participé. Les jeunes, les plus sages, ont été chargés de la sécurité et de l'accueil des invités. Les femmes se sont consacrées à la préparation de l'offrande. Du couscous et de la viande. Contrairement aux habitudes dans la plupart des villages kabyles, les jeunes filles ont fait partie des membres organisateurs et elles ont su assumer leurs tâches. « Les mentalités ont changé au mieux. La femme a aujourd'hui sa place dans la gestion de la vie au sein de la communauté », nous déclare Mouloud, un organisateur. A ce propos, le code de la famille et les droits de la femme dans notre société ont fait l'objet d'une conférence durant les festivités. Autre fait marquant de cette semaine culturelle, qui a vu affluer beaucoup de monde, l'invitation de tous les enfants du village d'Aït Boumahdi résidant dans les autres wilayas du pays. « Nous voulons créer, à travers notre geste, un trait d'union entre l'ancienne et la nouvelle génération afin de garder les liens de fraternité entre tous les villageois », explique Lamara Hafid, président de l'association Tafsut n'80. « Nous avons des femmes et des hommes instruits que nous voulons associer à la réorganisation de la vie dans notre village, mais qui habitent ailleurs. Je suis convaincu qu'ils seront d'un apport considérable pour nos jeunes chômeurs qui sont à la recherche d'un emploi ou d'une formation, pouvant les éloigner du chemin de l'alcool et de la drogue », ajoute-t-il confiant. Pour ceux qui ont quitté le village depuis des années, l'occasion était pour se remémorer les meilleurs souvenirs de leur jeunesse. Cette semaine culturelle leur a permis de se revoir, après des années de séparation. « J'ai des amis que je n'ai pas revu depuis 40 ans. Aujourd'hui, j'ai eu les larmes aux yeux de les revoir et de me rappeler les années passées à l'école primaire, nos disputes d'enfants et les moments de joie que nous avions partagés ensembles », nous dira Rachid, la cinquantaine. Des artistes du village ont, eux aussi, répondu à l'appel de leurs concitoyens. Des femmes travaillant dans la tapisserie et la conception des robes kabyles ont exposé leurs travaux qui ont attiré beaucoup de visiteurs. Les bijoutiers d'Ath Yenni et les potiers de Tahachat dans la commune d'Aït Toudert ont participé également à une exposition qui a duré tout le long de la semaine. Outre ses expositions, des ventes dédicaces de la poétesse Lynda Koudache, une enfant du village d'Aït Boumahdi, ont eu lieu. Elle a été accompagnée par sa sœur Ouiza, elle aussi artiste dans le domaine de la photographie, la sculpture et la peinture. Des pièces théâtrales, traitant des problèmes actuels des jeunes et de la vie politique en Algérie, ont été présentées par la troupe théâtrale de l'association locale. Pour permettre à la génération postindépendance de connaître son histoire, une conférence sur l'architecte de la révolution, Abane Ramdane, a été animée par son frère Ali à la veille du 20 août, date du 49e anniversaire de la tenue du Congrès de la Soummam. Elle a été suivie par un long métrage sur la guerre d'Algérie. Afin de faire durer la joie, une circoncision d'une dizaine d'enfants a été organisée pour l'ensemble des enfants de la région des Ouacifs. Un gala artistique s'en est suivi pour clôturer les festivités qui ont fait oublier, pendant une semaine, les chaudes journées de l'été et permis à tous les villageois de s'unir pour s'entendre sur un avenir meilleur pour leurs enfants.