Aussi bien l'Elysée que le Quai d'Orsay s'efforcent-ils de minimiser la portée de la loi du 23 février 2005. Le ministre des Affaires étrangères, M. Douste-Blazy, a prôné, le 26 juillet dernier, la création d'une commission d'historiens franco-algériens chargée d'évaluer cette loi. « Je souhaite qu'il y ait une commission d'historiens mixte, algériens et français, qui puissent se réunir, travailler ensemble, en toute indépendance, pour, justement, nous faire une proposition sur cela », a déclaré le ministre lors d'une conférence de presse, en réponse à une question sur cette loi. « Il n'y aura jamais d'histoire officielle en France », a par ailleurs assuré M. Douste-Blazy qui avait lui-même soutenu cette loi signée le 23 février. Comment seront choisis ces historiens ? Qui les désignera ? A cela, les principaux concernés répliquent, par le biais du collectif d'historiens qui s'est constitué en réaction à la loi dès sa promulgation, qu'« ils ne sont pas juges, avocats, ni procureurs : leur fonction est de comprendre (ce qui ne veut pas dire approuver) et d'expliquer les phénomènes historiques. Ils n'ont donc pas à évaluer les éléments positifs ou les éléments négatifs des réalités qu'ils étudient ». Ils soulignent aussi que « la condition essentielle de l'exercice de leur métier de chercheur et d'enseignant est leur indépendance de tout pouvoir politique. Ils peuvent et doivent non pas être nommés par les gouvernements, mais désignés par la profession, qui dispose de ses moyens de concertation et de désignation ». « A partir de ces éléments, il sera possible de travailler dans des conditions normales à un partage de passés qui passent mal entre les sociétés impliquées dans la situation coloniale, à un partage de leur devenir par les diverses populations que cette histoire a conduites en France. » Le collectif d'historiens considère, par ailleurs, qu'il revient aux parlementaires de « défaire ce qu'ils ont mal fait » et indique que deux propositions de loi ont été déposées pour demander l'abrogation de l'article 4. A rappeler que l'appel des historiens pour l'abrogation de cet article 4, réunis en collectif qui a recueilli plusieurs centaines de signatures en trois semaines, a été repris par l'Association des professeurs d'histoire et géographie, forte de 11 000 adhérents, puis les inspecteurs généraux. La protestation a engagé les syndicats enseignants et la LDH, la Ligue de l'enseignement, le MRAP... Le collectif d'historiens s'est associé également aux dénonciations de la multiplication des commémorations en hommage à l'OAS. Des députés et des sénateurs ont interpellé le gouvernement. Les syndicats et les parents d'élèves sont intervenus auprès du ministre de l'Education nationale, Gilles de Robien.