L'école El Moustaqbel, qui est à l'origine l'ancienne résidence personnelle de l'une des filles du dey Hussein (1819-1830), a été versée comme patrimoine mis au service du ministère de l'Education nationale. En 1995, ce monument est détourné de sa vocation originelle pour qu'il soit partiellement transformé, contre toute attente, en... supérette ! Cet établissement scolaire, situé au Carroubier, attenant au lycée Ahmed Zabana, a fait l'objet, en 1995, d'une cession douteuse au profit de deux cadres de l'Inspection académique d'Alger, plus précisément ceux de la direction de la programmation et du suivi située à Mohammadia. A cet effet, une commission d'enquête, dépêchée en 2004 par les services de la wilaya d'Alger, s'est, selon notre source, déplacée au siège de l'APC d'Hussein Dey pour s'instruire davantage sur les tenants et les aboutissants de cette affaire aussi suspecte que contestée. D'après la même source, cette cession dubitative a été « orchestrée » en 1995 par la Délégation exécutive communale (DEC) d'Hussein Dey. « La cession de ce bien a été approuvée suite à une délibération portant référence 15208, en date du 1er avril 1995. Juste après, une commission constituée d'un représentant de la daïra d'Hussein Dey, du DEC et d'un inspecteur des Domaines a siégé pour établir une décision favorisant le transfert du bien précité », a précisé la même source. Pour de plus amples informations, nous avons tenté de contacter le P/APC et le directeur de l'Urbanisme. Ceux-ci ont évité l'entretien en présentant quelques prétextes. Entre-temps, le vice-président chargé de l'Urbanisme a accepté de nous accueillir, mais il a contourné les questions ciblant la transaction au moyen de pirouettes. « La cession a été arrangée par le P/APC relevant de l'ex-parti dissous », s'est-il contenté d'avancer. Le seul ex-élu qui a été coopératif est Yahia Aïssa, président de l'assemblée sortante. D'obédience FFS, cet ancien haut cadre dans le secteur des travaux publics a, d'une manière jugée appréciable par certains habitants, dirigé la commune d'Hussein Dey de 1997 à 2002. « Les classes de l'école Trotier, donnant sur la rue Boudjemâa Moghni (ex- Parnet), ont été également cédées au profit de particuliers pour les transformer en locaux commerciaux. J'ai bataillé pour récupérer ces classes. Finalement, elles ont été restituées à la commune », a-t-il déclaré. Concernant la résidence de la fille du dey, l'ex-élu a affirmé qu'il avait entrepris des démarches auprès des services de la wilaya pour la réhabiliter. « Mon mandat s'est expiré sans pouvoir, hélas, la récupérer. Aucun responsable de la wilaya n'a daigné apporter son soutien. Néanmoins, l'école El Moustaqbel, qui est en même temps une résidence ottomane, est un monument relevant du patrimoine national. Personne n'a le droit de se l'approprier. Cela fait partie de notre personnalité nationale », a-t-il martelé. En abordant un cadre de l'Agence nationale d'archéologie et de la préservation des sites et monuments historiques au sujet des résidences ottomanes, celui-ci a, d'emblée, confirmé que le dey Hussein a assumé une tâche importante avant qu'il ne soit nommé « dey » par la Porte Sublime. « Il a assuré la fonction de Khodjet El Kheil, l'équivalent du poste du ministre des Domaines et des Haras. C'est ce qui lui a permis de localiser les domaines aux terres fertiles et d'en attribuer quelques parcelles, situées dans la localité qui porte son nom, à ses deux filles », a expliqué M. Benmedour, chercheur de l'ANA. Toutefois, après avoir exposé une photo souvenir datant de 1963, qui représente l'école El Moustaqbel, le chercheur a illico presto attesté que la façade de l'édifice est authentique. « Les trois arceaux sculptés sur la fenêtre de l'édifice représentent des signes ornementaux, mais révèlent aussi que la résidence est celle d'un proche du dey. S'il y en a deux, il s'agit de la résidence d'un vizir et s'il n'y en a qu'une seule, c'est celle du sultan lui-même », a-t-il expliqué. La même photo a été présentée à un médecin, qui est un ancien élève de cette école, tout en lui relatant le fait blâmable. Celui-ci n'a pas trouvé mieux que de s'exclamer : « Le système colonial avec toutes ses affres a préservé cette résidence. Il en a fait une école sans toucher ni à la structure ni à l'architecture. Alors que des cadres du système éducatif l'ont transformé en supérette. De quoi devenir la risée de nos voisins ! » Par ailleurs, la même tentative aurait été organisée par certains fonctionnaires véreux du secteur de l'éducation pour détourner une autre résidence. Il s'agit en effet de la résidence de la seconde fille du dey Hussein, située actuellement à l'intérieur du lycée Boulkine, sis en face du bureau de poste d'Hussein Dey. « Prétextant que le lycée Boulkine ne pouvait plus accueillir les élèves, certains responsables frauduleux ont tenté de biffer ce lycée de la carte scolaire. Ainsi, ils pourraient s'approprier tous ces espaces. Néanmoins, si la tentative malhonnête a été déjouée, le lycée a longtemps fait l'objet d'une convoitise », a relaté un ancien cadre du même secteur. « Encore une fois, l'avoir emporté sur l'être. Ainsi s'esquissent des actes frauduleux, tissés par d'obscures fonctionnaires promus sans raison évidente au rang de cadres. L'esprit mercantile aidant, ces derniers ont semé les germes de l'ignorance, quitte à faire disparaître une structure éducative », conclut cet ancien élève. Au demeurant, les résultats de l'enquête diligentée par les services de la wilaya d'Alger n'ont pas été divulgués jusqu'à présent. L. B., N. K.