Vingt-trois bénéficiaires de concessions agricoles, pour la plupart des universitaires qui étaient au chômage et qui ont tenté l'aventure du travail de la terre, menacent de se donner la mort, de se mettre en travers des rails, de recourir à une grève de la faim et bien entendu d'abandonner purement et simplement leurs concessions. La cause : ils sont victimes d'une monumentale escroquerie. On leur a fourgué 160 000 plants des plans de vigne de cuve au lieu de plants de vigne de table. Un préjudice estimé à plus de 7 milliards de centimes qui place la Générale des concessions agricoles (GCA) et son fournisseur la société Agro-Seddik de Sougueur (Tiaret) au cœur d'une arnaque sans pareille qui pourrait s'étendre à Aïn El Assel, El Frin, Aïn Karma et à d'autres régions du pays. « Nous avons perdu cinq ans de travail acharné et de mille et un sacrifices », se plaint Djamel Benabbès, président de l'Association du périmètre des concessions agricoles de Chefchoufi de Dréan large de 762 ha concédé en 2001 à 76 jeunes universitaires au chômage. 23 d'entre eux ont planté, en 2003, 53 ha de ce qu'ils croyaient être de la vigne de table et 3 ha d'une variété de prunier. « Au lieu de raisin de table, c'est du raisin de cuve qu'on a obtenu et les prunes ressemblent à tout sauf à des prunes », nous dit encore Djamel Benabbès. Les concessionnaires ont décidé d'alerter la presse car, disent-ils, la commission de wilaya qui a été la première à constater les dommages n'a pas donné suite à leurs doléances. Samedi, c'est une autre commission d'un niveau plus élevé qui a eu à constater l'ampleur des dommages. Les représentants de GCA (nationaux et locaux), l'entreprise réalisatrice, de l'Institut technique d'agriculture fruitière (ITAF Skikda), des services agricoles, ont relevé qu'au lieu de se faire livrer les variétés Dattier de Beyrouth, Cardinal et Alphonse Lavalée, ce sont les variétés de raisin de cuve Cabernet Sauvignon, Syrah et Pinot que leur a livrées la GCA qui s'approvisionne auprès d'Agro-Seddik qui a importé d'Italie des plants dûment certifiés par le Centre national de contrôle et de certification (CNCC). Les membres de cette commission ont proposé, pour pallier cette situation et réduire l'ampleur des dégâts, de greffer, à partir d'avril prochain, ces variétés par des variétés de table que l'ITAF se propose de fournir dans les délais. Reste le préjudice financier qui est énorme pour ces jeunes agriculteurs qui ont tout misé dans leur entreprise. Une première estimation chiffre les dégâts à plus de 7 milliards de centimes. Ils menacent de recourir au pire si on ne trouve pas de solution. Bien entendu, la justice sera saisie dès que la commission se sera prononcée définitivement et officiellement sur les responsabilités des uns et des autres. « Mais la justice, c'est long et il n'est pas question, menacent encore des membres de l'association, de revenir au chômage par la faute de magouilles faites sur notre dos. » Alors que les parties impliquées se sont refusées à toute déclaration, le président de la Chambre d'agriculture d'El Tarf nous a indiqué que l'Etat a également contribué pour une large part dans cet investissement et qu'il faut attendre les conclusions des expertises avant de tenter quoi que ce soit et qu'il est fort probable que puisse se dégager une solution à l'amiable avant de recourir aux tribunaux qui, il est vrai, sont une alternative qui prend plus de temps.