Safé Bourada. Ce lundi, il est devenu malgré lui la personne la plus médiatisée de France. Il serait le chef d'une cellule du Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC) installée en France, qui aurait fait allégeance à Al Zarkaoui. Neuf personnes ont été interpellées, hier dans la matinée, lors d'une opération visant des islamistes installés dans l'Eure et dans les Yvelines, en région parisienne. Sept d'entre elles avaient été placées sous surveillance depuis plusieurs mois par les services du renseignement, direction centrale des renseignements généraux (DCRG) et direction de la surveillance du territoire (DST), dans le cadre d'une enquête judiciaire menée par le juge antiterroriste à Paris, Jean-Louis Bruguière. Elles ont toutes été conduites au siège de la DST après leur arrestation. Les islamistes ont été interpellés dans deux quartiers sensibles de Trappes (Yvelines) et Evreux (Eure), les cités des Merisiers et de La Madeleine. Ils sont soupçonnés d'avoir envisagé de commettre des attentats sur le territoire français. Preuve de l'importance de l'opération : un camion équipé contre le risque nucléaire, radiologique, bactériologique et chimique avait été dépêché sur les lieux. L'enquête avait commencé en février 2003 par la surveillance de Safé Bourada, 35 ans, qui venait de sortir de prison. Il avait été condamné en février 1998, avec quarante autres personnes, après le démantèlement du groupe islamiste de Chasse-sur-Rhône (Isère). Il avait été présenté comme le « sergent-recruteur » du groupe qui revendiquait le rôle de soutien logistique au maquis islamiste algérien, et était suspecté par la justice de préparer des attentats en France. Ancien adhérent du Parti socialiste converti à l'islam au début des années 1990, ex-étudiant en histoire et en philosophie, Safé Bourada avait admis à son procès son adhésion à l'idéologie islamiste. Il avait avoué avoir recruté en 1994, pour le compte du GIA, Khaled Kelkal et Karim Koussa, impliqués dans les attentats qui ont frappé Paris en 1995. Le premier a été tué par la police en septembre 1995, le second est en prison. Son témoignage avait permis en 1996 aux enquêteurs français de mettre le nom d'Ali Touchent sur le pseudonyme de Tarek, qui semblait avoir été au cœur de tous les attentats du GIA en Europe au milieu des années 1990. Ali Touchent n'a jamais été arrêté et a été donné pour mort en 1998 en Algérie. Il serait aussi une connaissance de Rachid Ramda, le financier des attentats, actuellement emprisonné au Royaume-Uni, dont la France réclame en vain l'extradition depuis plusieurs années. Depuis la découverte de documents démontrant l'allégeance du GSPC à l'organisation d'Oussama ben Laden, les autorités françaises n'ont jamais minimisé publiquement les risques d'attentat sur le sol français. En juillet, le directeur général de la police nationale, Michel Gaudin, avait estimé que le danger pouvait venir du GSPC, qui aurait passé à l'automne 2004 une alliance avec Abou Moussab Al Zarkaoui afin de frapper la France. Ces arrestations interviennent alors que le gouvernement français se prépare à durcir la législation antiterroriste. Les peines encourues pour « association de malfaiteurs terroristes » pourraient passer de 10 à 20 ans, la durée maximale de la garde à vue de quatre à six jours.