Le GSPC se déploierait-il en France ? La police française soupçonne la cellule Bourada, démantelée ces derniers jours à Trappes, puis à Montargis, d'être en lien avec le groupe terroriste algérien. Les deux Français convertis à l'Islam interpellés lundi à Montargis (Loiret) ont été mis en examen vendredi pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » et « financement du terrorisme ». Stéphane, 36 ans, ex-braqueur, et Manuel, 31 ans, chauffeur au chômage, appartiendraient au groupe islamiste radical fondé par Safé Bourada. La DST a découvert chez l'un des convertis des documents « relatifs à des produits toxiques », des formulaires de demande de visa pour le Liban, mais pas de matériel permettant la fabrication d'explosifs. Les deux suspects de Montargis auraient révélé aux policiers qu'ils s'initiaient à la fabrication de systèmes de mise à feu à partir de téléphones portables. Ils devaient d'ailleurs se rendre également au Liban pour perfectionner leurs connaissances en la matière. Le juge antiterroriste Jean-Louis Bruguières affirmait dans un récent entretien au Figaro que « les convertis sont indéniablement les plus durs. Les conversions sont aujourd'hui plus rapides et l'engagement plus radical. Les jeunes recrues sont souvent dépêchées elles aussi sur les théâtres d'opérations, comme en Irak. Des femmes également se convertissent pour la cause, avec un intérêt non négligeable pour les djihadistes venus constituer ou réactiver une cellule : un mariage avec un ressortissant français, c'est l'assurance pour le futur conjoint étranger en situation irrégulière de pouvoir circuler avec des papiers en règle ». L'opération de lundi dernier dans le Loiret est la poursuite de l'enquête sur le démantèlement de la cellule Bourada à Trappes (Yvelines) et Evreux (Eure) du 26 septembre, avait confirmé le ministre de l'Intérieur Nicolas Sarkozy. Questionné sur RTL sur l'imminence d'attentats, le ministre de l'Intérieur avait assuré que les hommes écroués n'étaient « pas sur le point » d'agir mais « qu'ils avaient des mauvaises intentions ». Outre Safé Bourada, condamné en 1998 à dix ans de prison pour son soutien logistique aux attentats de 1995, Djamel Badaoui, Achour Ouarab et Kaci Ouarab, interpellés le 26 septembre à Trappes, ont été mis en examen pour « association de malfaiteurs en relation avec une entreprise terroriste » et « financement du terrorisme ». Tous fréquentaient la même mosquée de Trappes. Le 9 septembre, M'Hamed Benyamina, boucher à Trappes, a été arrêté à l'aéroport d'Oran. Selon une source proche du dossier, il aurait affirmé aux policiers algériens que son groupe envisageait des attentats contre le métro parisien, le siège parisien de la DST et l'aéroport d'Orly. Ces projets n'ont pas été confirmés en garde à vue par les quatre hommes et les PV d'audition en Algérie de Benyamina ne figurent pas au dossier, ont indiqué leurs avocats selon qui ils ont revendiqué leur engagement religieux, mais contesté leur appartenance à un groupe terroriste. jonction GSPC-AL QAÎDA Bourada a rédigé à sa sortie de prison en février 2003 le document fondateur du groupe Ansar al-Fath (les partisans de l'Islam) auquel il attribue une vocation religieuse et combattante, explique un proche du dossier. Mais selon son avocat, Me Alexandre Duval-Stalla, « ce n'était que du discours, il n'avait aucun projet ». « Safé Bourada revendique la position de leader charismatique, mais n'a eu aucune velléité d'action concrète contre la France car aucune autorité religieuse n'a décrété le jihad contre la France. » Les enquêteurs soupçonnent la cellule d'être liée au Groupe salafiste pour la prédication et le combat (GSPC). « Ce n'est plus Al Qaîda, mais les groupes qui lui sont associés », qui constituent la principale menace pour l'Europe, affirmait Rohan Gunaratna, responsable du département de lutte antiterroriste à l'Institut de défense et de stratégie de Singapour, dans les colonnes du Figaro, fin 2004. « Les gouvernements se focalisent sur Al Qaîda, alors que la menace s'est déplacée Les GSPC de Hattab, groupe salafiste algérien, et certains mouvements islamistes nord-africains sont sans doute plus dangereux pour l'Europe que ne l'est Al Qaîda. » Dans les colonnes d'El Watan (édition du 15 novembre 2004), Roland Jacquard, président de l'Observatoire international du terrorisme et du Centre d'études des menaces contemporaines, tenait des propos similaires, soulignant que le GSPC « avec sa nouvelle organisation veut nouer des contacts avec Al Qaîda et lui fournir des hommes en Europe ».