Sans même attendre les conclusions de la mission d'enquête sur l'assassinat de l'ancien Premier ministre libanais Rafic Hariri, les Etats-Unis et la France, apprenait-on dès mercredi, s'apprêtent à proposer, la semaine prochaine, au Conseil de sécurité des Nations unies une résolution condamnant la Syrie pour ses interventions au Liban. L'information rapportée le jour même par le quotidien américain le Washington Post, soit avant même que ne soient rendues publiques les conclusions de l'enquête sur l'assassinat de Rafic Hariri, n'a pas été démentie. Ce qui laisserait alors penser qu'une action coordonnée avec un timing précis est menée contre ce pays qui vient d'être mis en cause dans cette affaire d'assassinat. On sait que le chapitre 7 de la charte de l'ONU n'a pas été évoqué lors de la mise en place de cette commission - la première dans les annales internationales -, mais selon des sources proches des discussions, ces textes seraient les plus sévères jamais proposés à l'encontre de la Syrie, et pourraient être présentés dès mardi prochain, date retenue pour une réunion du Conseil de sécurité afin d'examiner les suites à donner à ce rapport qui ne sera pas l'unique au sujet du Liban. L'envoyé spécial de l'ONU, Terje Roed-Larsen, doit également rendre compte cette semaine à M. Annan des progrès sur la résolution 1559 du Conseil de sécurité sur le départ des troupes syriennes du Liban, qui prévoit également la fin de l'influence de la Syrie au Liban. Très officiellement, il n'y a plus de présence militaire syrienne depuis le mois d'avril dernier. Mais des pressions sont exercées pour aller bien au-delà. C'est en ce sens certainement que s'inscrit le bref détour mardi par Paris de Condoleezza Rice a aussi rencontré mardi matin M. Annan pour des discussions qui ont porté essentiellement sur la Syrie, ont indiqué au journal des responsables américains. Washington veut que la résolution condamne fermement la Syrie pour son soutien aux groupes armés, mais de telle façon qu'elle permette également de faire pression sur Damas pour son aide aux extrémistes en Irak, toujours selon ces sources. Des accusations que la Syrie n'a cessé de récuser. Reste alors sa position par rapport aux organisations palestiniennes dites de l'opposition, et libanaise comme le Hezbollah. La première question a été soulevée et traitée de manière plutôt réaliste par le président palestinien Mahmoud Abbas avec le Premier ministre libanais Fouad Siniora, à Paris, une de ses escales alors qu'il se rendait aux Etats-Unis. Quant à la seconde, les Libanais entendent eux-mêmes en faire une question d'ordre strictement intérieur. Dans les deux cas, relève-t-on, il s'agit de l'application de la résolution 1559 adoptée par le Conseil de sécurité le 2 septembre 2004, soit près de cinq mois et demi avant l'assassinat de Rafic Hariri. Mais comment y aller quand cette organisation qui mène la résistance contre l'ocupant israélien, présente au Parlement libanais, est qualifiée d'organisation terroriste ? Le désarmement du Hezbollah deviendrait-il une question internationale si Israël n'était pas visé ? On considère que cette organisation remet sur le devant de la scène, chaque fois qu'il lui semble nécessaire, la question de l'occupation israélienne occultée de manière délibérée. Depuis quelques années, et probablement depuis le début des années 1990, il est question de briser le statu quo actuel. Ainsi en est-il d'Israël toujours en quête d'un accord séparé avec le Liban, ce qui lui permettrait de négocier l'accès aux ressources hydrauliques de ce pays. La dernière tentative remonte à 1983. Damas l'avait mise en échec. Et c'est cette même Syrie qui entend apparaître comme un élément au moins important du processus de paix au Proche-Orient si jamais celui-ci venait à être relancé. Damas et Beyrouth ne cessaient d'affirmer que les deux dossiers étaient liés. Avant même la création d'Israël en novembre 1947, les dirigeants du mouvement sioniste, demandaient aux vainqueurs de la Première Guerre mondiale réunis à Versailles en 1919, de repousser d'une vingtaine de kilomètres les frontières septentrionales du territoire qu'ils allaient accaparer par la force. Une distance suffisante pour s'emparer du réservoir en eau libanais. Des scénarios catastrophes, mais bien réels puisqu'ils impliquent jusqu'à une révision de frontières, ne sont pas exclus.