Abdelaziz Belkhadem, ministre d'Etat et représentant personnel du président Bouteflika, trouve « infondées » les accusations du royaume chérifien portant sur la situation critique d'immigrants clandestins, coincés entre la frontière algéro-marocaine. « Nous ne voulons pas polémiquer avec nos frères marocains. Mais le Maroc est un pays de transit. L'Algérie aussi. Quotidiennement, nous avons des Africains qui entrent au pays avec l'espoir de quitter un jour l'Algérie pour aller vers l'Europe », a-t-il déclaré, hier, à « Question de l'heure », une émission hebdomadaire diffusée par la Chaîne III de la Radio algérienne. Selon lui, ces immigrants se sédentarisent s'ils arrivent à décrocher un travail. « Nous sommes donc un pays à la fois de destination et de transit », a-t-il souligné. M. Belkhadem regrette que de telles accusations « viennent de bouches très officielles, comme celles de ministres ou de responsables marocains ». L'ex-ministre des Affaires étrangères rappelle, à cet effet, les propositions algériennes au gouvernement marocain relatives à la gestion du dossier de l'immigration clandestine. « Nous avons dit à nos frères marocains, soit dans le cadre de nos relations bilatérales, soit dans le cadre maghrébin, soit dans le cadre des 5+5, que nous sommes disposés à discuter ensemble de la question de l'immigration clandestine afin de résoudre ce problème, qui est un drame humanitaire. Aussi, chercher comment préserver la dignité de ces citoyens africains auxquels nous appartenons et comment surveiller des frontières interminables », a-t-il précisé. Selon lui, l'un des épineux problèmes, c'est la surveillance des frontières Sud. « Si nous mettons toute l'Armée algérienne sur nos frontières Sud, nous n'arriverons pas à les contrôler entièrement. C'est le cas de tous les pays qui reçoivent l'immigration clandestine », a-t-il argumenté. Pour lui, dire que l'Algérie ne fait rien et encourage les immigrés africains à passer la frontière marocaine relève de l'exagération. « ça suffit de faire porter la responsabilité à l'Algérie. Lorsqu'il s'agit du Sahara-Occidental, c'est l'Algérie », a-t-il dénoncé, et d'ajouter : « A chaque fois que nos frères marocains ont des problèmes, ils accusent l'Algérie. » M. Belkhadem dit que les pays maghrébins devraient arriver à une « réponse commune » pour contrer le phénomène. « Certains pays maghrébins ont accepté l'idée européenne de créer des centres de transit. L'Algérie a refusé, car elle voulait préserver la dignité africaine », a-t-il expliqué. Le ministre d'Etat justifie ce refus de centre de transit aussi par le fait que l'Algérie refuse d'être « la police de l'Europe ». M. Belkhadem estime qu'il faut que Européens, Marocains et Algériens se mettent autour d'une table pour discuter de ces problèmes dans le but de « trouver une parade commune à ce phénomène. Car il s'agit d'une tragédie ». Pour lui, il faut aussi que les Européens « mettent la main à la poche pour essayer de fixer ces populations chez elles ». Le ministre d'Etat précise, en outre, que les immigrés clandestins ne traversent pas forcément l'Algérie pour passer au Maroc. « Ils passent par le Sahara-Occidental, par les îles Canaries. Comme il y a ceux qui prennent la destination de Casablanca pour s'y installer ensuite », a-t-il souligné. Au chapitre relatif au traité d'amitié, M. Belkhadem espère qu'il sera signé avant la fin de l'année. A une question selon laquelle la signature de ce traité va être conditionnée par la reconnaissance de l'Etat français de ses crimes coloniaux perpétrés en Algérie, le représentant personnel du président Bouteflika estime qu'« il y aura forcément, dans le traité, une clause qui parle du devoir de mémoire ».