Tout ou presque a été dit sur l'actuelle administration américaine rattrapée par sa stratégie sur l'Irak développée dès l'automne 2002, les arguments auxquels elle a cru bon de recourir, et surtout les hommes qui avaient porté ce discours auprès de l'opinion américaine d'abord, et internationale ensuite. La première y a adhéré et même fortement, mais il se trouve que cette adhésion s'effrite au point d'être remise en cause pour les raisons les plus diverses, comme la durée de la guerre, ses morts américains, et l'absence de sortie de crise. Un constat que fait le commun des Américains et que l'on retrouve dans les sondages. Le taux d'approbation du président Bush continue, en effet, de baisser dans les sondages et le président entraîne les républicains dans sa chute, selon un sondage Gallup publié récemment. Seules 42% des personnes interrogées disent approuver l'action du président contre 55% qui la désapprouvent. A un an du renouvellement partiel du Congrès, contrôlé par les républicains depuis 1994, 54% des sondés disent qu'ils voteront plutôt pour un candidat opposé au président, tandis que 39% affirment qu'ils choisiront un candidat républicain. Si Bush se présentait à la présidence cette année, 55% des personnes interrogées disent qu'elles voteraient plutôt pour le candidat démocrate tandis que 40% seulement le choisiraient. L'an dernier, M. Bush a battu le démocrate John Kerry par 51% contre 48% des voix. Concernant la guerre en Irak, les Américains interrogés sont divisés à égalité (49/49) pour dire que c'était une bonne chose ou une erreur. Mais 57% estiment que la situation empire sur le terrain, alors que le seuil symbolique des 2000 morts américains a été dépassé en Irak. Ces chiffres ne prennent pas en compte la nouvelle réalité politique née de l'inculpation d'un membre de l'entourage de Bush au point que son Administration soit ébranlée par l'affaire Valerie Plame. Il doit procéder à un remaniement à la Maison-Blanche s'il ne veut pas que la fin de son mandat tourne à l'aigre, estiment des sénateurs démocrates et républicains. La classe politique appelle notamment Bush à enquêter sur le bureau du vice-président Dick Cheney, dont le directeur de cabinet, Lewis Libby, a été inculpé vendredi pour parjure, faux témoignage et entrave à la justice. Charles Schumer, sénateur démocrate de New York, a ainsi déclaré sur CBS que « le président doit mener sa propre enquête interne sur le bureau du vice-président, voir ce qui s'est passé, fixer certaines normes et, si besoin, mettre le vice-président au placard ». Après plus de deux ans d'enquête dirigée dans la plus grande discrétion par le procureur spécial Patrick Fitzgerald, l'affaire de la divulgation de l'identité de l'agent secret de la CIA Valerie Plame va entrer dans une nouvelle phase, publique celle-là, où Cheney devrait jouer un rôle central. D'après des avocats proches du dossier, le vice-président et d'autres hauts responsables de la Maison-Blanche pourraient être appelés à la barre en tant que témoins, dévoilant au grand jour certaines pratiques des hautes sphères du pays, notamment dans la phase de préparation de la guerre en Irak. Les commentaires des représentants se concentrent également sur Karl Rove, le secrétaire général adjoint de la Maison-Blanche, qui fait toujours l'objet d'une enquête. L'ancien ambassadeur américain Joseph Wilson, époux de l'agente de la CIA, dont le nom avait été jeté en pâture à la presse, a réclamé lundi son licenciement. Opposant à la guerre en Irak, M. Wilson, a estimé que ce conseiller, Karl Rove, devrait rendre des comptes pour le rôle qu'il aurait joué dans des révélations sur l'identité de son épouse, Valerie Plame. Dévoiler en connaissance de cause le nom d'agents clandestins des services de renseignement est un crime aux Etats-Unis. « Les Américains (...) devraient tous être révoltés d'une telle conduite aux plus hauts échelons du gouvernement », a déclaré M. Wilson devant la presse, à Washington. « Je ne crois pas que M. Rove devrait être autorisé à présenter sa démission. Je crois qu'il devrait être licencié », a ajouté l'ancien diplomate. Depuis que cette affaire a éclaté en 2003, M. Wilson soutient que l'identité de sa femme a été délibérément révélée par la Maison-Blanche, pour le discréditer. Il avait révélé que certains des arguments avancés par M. Bush pour justifier la guerre en Irak étaient infondés. Le procureur spécial chargé d'enquêter sur les fuites, Patrick Fitzgerald, n'a retenu pour le moment aucune charge contre M. Rove, l'enquête se poursuivant pour déterminer s'il a enfreint la loi. Selon Harry Reid, sénateur démocrate du Nevada, Rove pourrait devenir le fusible de l'Administration Bush. Libby, qui a démissionné vendredi sitôt connue son inculpation, devrait faire sa première apparition devant un tribunal dans le courant de la semaine pour la lecture de l'acte d'accusation. Le procès se concentrera en partie sur la conversation qu'aurait eue Libby avec Cheney le 12 juin 2003 sur les activités du diplomate Joseph Wilson et de sa femme Valerie Plame, un mois avant que l'identité de l'agent secret ne soit révélée par le journaliste Robert Novak. Libby a indiqué lors de ses interrogatoires qu'il avait été informé de l'identité de Plame par des journalistes et non par le vice-président, comme le pense au contraire le grand jury. Selon un avocat, ce point crucial du procès pourrait causer « des dégâts politiques ». « Que faisaient-ils exactement dans ce bureau lors de leurs discussions sur Wilson ? », interroge-t-il. Lewis « Scooter » Libby est accusé d'avoir menti à des agents du FBI au cours de deux interrogatoires le 14 octobre et le 26 novembre 2003. Il est également poursuivi pour parjure alors qu'il témoignait sous serment devant le grand jury le 5 mars 2004, et d'entrave à la justice. “Scooter” Libby risque gros, mais l'Administration qu'il a servi n'en sera pas épargnée. Et tout mène vers le centre de décision pour redresser une situation qui le dessert surtout si lui sont ajoutés les problème d'ordre strictement intérieur comme la flambée des prix des produits pétroliers, l'inflation et autres dépenses sociales.