Le secteur de la santé demeure le maillon faible du service public dans la wilaya de Tizi Ouzou. La réforme opérée par le gouvernement ces dernières années n'arrive toujours pas à profiter au citoyen dans cette région. Manque de médicaments, absence de médecins et autre personnel spécialisé ou paramédical, tels sont globalement les déboires qui font le menu quotidien au sein de ces établissements. Les incohérences enregistrées diffèrent d'une région à une autre. A Aïn El Hammam, il est ainsi constaté que les moyens de bord existants sont exploités au maximum. Le directeur du secteur sanitaire de l'ex-Michelet, Madjid Hammad, d'emblée, soulève l'éternelle problématique du manque en matière de personnel spécialisé et des auxiliaires. « L'absence de spécialistes dans nos structures rend impossibles certaines interventions, comme la gynéco-obstétrique », dira M. Hammad. Pour venir à bout de cette lacune, le ministre de la Santé « a été saisi dans l'espoir de débloquer les affectations vers nos structures mais, pour l'heure, rien n'est fait », dira le responsable en question. Et « faute d'une prise en charge au niveau local, ajoutera-t-il, nous sommes, chaque fois, dans la contrainte de procéder à des évacuations vers le CHU de Tizi Ouzou ». Les transferts, eux aussi, sont loin de se faire d'une manière aisée. En effet, eu égard au relief montagneux de la région (plus de 1000 m d'altitude) et de son éloignement (près de 50 km du chef-lieu de wilaya), l'évacuation des malades doit emprunter inévitablement un parcours semé d'embûches. La tâche devient encore plus pénible pendant la saison hivernale lorsque les neiges mettent la région en quarantaine. Dans de telles situations, le secteur sanitaire compte beaucoup sur les ambulances à sa disposition. M. Hammad fait savoir que son secteur compte, au total, 14 ambulances en état de marche, dont 5 nouvellement acquises sur le budget de la wilaya. Appréhension à l'approche de l'hiver Pour le transport des malades en période hivernale, le même responsable estime que l'unique alternative sont les véhicules tout-terrains (le secteur vient d'être doté d'une ambulance de ce type). « L'année dernière, rappelle-t-il, grâce à cette ambulance, nous avons sauvé la vie d'un malade dans un état critique et dont le cas nécessitait une évacuation vers le CHU de Tizi Ouzou au moment où la circulation était quasi impossible à cause de la neige. » Globalement, le secteur sanitaire de Aïn El Hammam gère une soixantaine de structures périphériques qui sont censés couvrir les besoins d'une population de 150 000 habitants relevant de 12 communes des daïras de Aïn El Hammam, Iferhounen, Ath Yenni et Ouacifs. Devant cet état de fait, l'hôpital de la petite ville de montagne, d'une capacité de 200 lits, trop sollicité de surcroît, tente d'assurer une meilleure prise en charge des malades. L'hôpital de Aïn El Hammam, dont la récente restauration a coûté 3,5 milliards de dinars, vient d'être doté de nouveaux équipements et d'un service de chirurgie qui sera opérationnel au début 2006. Pour ce qui est des médicaments et d'autres produits de base, M. Hammad affirme que les approvisionnements, assurés actuellement par la Pharmacie centrale des hôpitaux (PCH) en attendant la mise en application des nouvelles dispositions ouvrant le champ aux opérateurs privés, sont réguliers et leur disponibilité est de 85% en moyenne. De leur côté, certains patients rencontrés sur les lieux regrettent, à l'unanimité, que la structure hospitalière ne réponde pas à tous les besoins. « Souvent, les patients ne trouvent pas une prise en charge au niveau de l'hôpital surtout pour ce qui est des femmes souffrant de maladies spécifiques », déclare une quadragénaire sur place. Manque de personnel Si l'on excepte les structures implantées au niveau des chefs-lieux de daïra, c'est la détresse dans les zones rurales. Dans la commune d'Aït Yahia, l'établissement destiné à servir de polyclinique à sa réalisation est finalement réduit à un simple centre de santé faute de moyens adéquats et l'absence de spécialités médicales, quoique la structure vient d'être dotée récemment d'un service de radiologie. Le personnel qualifié se fait toujours rare, hormis un médecin généraliste et un dentiste qui y exercent. Le personnel affecté à ce genre d'établissement lui aussi n'est pas mieux loti. « Je fais la navette quotidienne entre Tizi Ouzou, où j'habite, et Aït Yahia pour rejoindre mon travail », nous déclare un infirmier exerçant dans ce centre de santé. Un peu plus loin, au village d'Igoufaf, on évoque une salle de soins qui a été squattée par un particulier pour y élire domicile depuis plus de cinq ans. Cet acte a contraint le centre de santé d'Aït Yahia à récupérer les équipements qui y ont été affectés en attendant le verdict de la justice prenant actuellement l'affaire en main. Dans la daïra de Draâ El Mizan, le secteur de la santé est plus houspillé par rapport aux autres régions. Mis à part l'hôpital qui tente de maintenir son fonctionnement à un rythme régulier, la situation qui prévaut dans les centres de santé et les salles de soins dans les villages et hameaux de la daïra est loin d'être enviable. La commune d' Aït Yahia Moussa illustre ces carences. Que ce soit en matière de structures médicales existantes ou de la qualité des services fournis, les défaillances sont accrues. Au total, un centre sanitaire au chef-lieu communal et six unités de soins implantées dans les principaux villages sont destinées à couvrir les besoins d'une population qui dépasse les 22 000 habitants. Plus regrettable encore est la situation qui plane à l'intérieur de ces établissements. A l'éternel problème de manque de médicaments, les citoyens de ces localités se plaignent souvent de la dégradation de la qualité de service. Les critiques sont acerbes à l'endroit des responsables des établissements de santé dans ces localités. Quoi de plus désolant que des établissements sans personnel ? Au village d'Iâllalen, entre autres, la situation s'est dégradée au point d'inciter le comité du village à saisir les autorités locales depuis des mois, en vain. Dans ce village, c'est la réfection de la structure qui est exigée ainsi que la présence d'un médecin pour des consultations régulières. Pour ce qui est du manque de médicaments, c'est l'insécurité persistant qui empêche l'approvisionnement dans les villages, étant donné que la région d'Aït Yahia Moussa souffre jusqu'à présent de la menace terroriste.