Les travaux du Symposium sur les migrations organisé par le Cread ont été entamés hier à Tipasa. L'Afrique a été la plus grande perdante de ce phénomène contemporain en constatant sans pouvoir réagir la fuite de son élite vers le Nord. Les travaux du Symposium international sur la migration organisé par le Centre de recherche en économie appliquée pour le développement (Cread) à Tipasa ont été entamés, hier, au centre Grand Bleu de Chenoua (Tipasa) pour s'achever par des recommandations, demain vendredi. D'emblée, le directeur du Cread a tenu à préciser que la migration, qui avait longtemps été occultée, est devenue actuellement un phénomène qui préoccupe les sociétés. Si l'Afrique tient une place privilégiée au niveau géostratégique, il n'en demeure pas moins qu'un effort important devra être fait pour porter sa voix sur la scène internationale. Farfara Mohamed Yacine, directeur du Cread, s'est interrogé sur le coût réel de la migration vers le Nord : «L'Afrique perd beaucoup dans ce phénomène avec le départ de ses élites. Si la police des frontières et les douanes enregistrent et estiment le coût des marchandises qui transitent par leurs frontières, les pays africains sont dans l'impossibilité d'évaluer la perte de leurs compétences qui migrent vers le Nord.» Lui succédant, le maître de la recherche, Musette Mohamed Saïb, a articulé son intervention autour de la définition des trois concepts de la migration migrant, diaspora, transnationaux, les flux migratoires dans le monde, les migrations africaines, le continent africain face aux défis du XXIe siècle et les axes stratégiques d'observation. L'orateur estime que les pays africains sont suffisamment outillés à présent pour non seulement analyser le phénomène, mais surtout agir dans la perspective d'une intégration des migrants. «L'avenir sera encore difficile, observe-t-il, avec les menaces des migrations climatiques dues aux changementsclimatiques.» M. Musette a reconnu que la migration vers le Nord est en baisse en raison des mesures prises par les pays d'accueil. «Pourquoi ne médiatise-t-on pas les 2 millions de migrants en situation irrégulière qui se trouvent en Afrique du Sud, plus d'un million de migrants en situation irrégulière en Côte-d'Ivoire ou encore plus d'un million en situation irrégulière qui vivent en Libye ?», interroge-t-il. L'Amérique du Nord, l'Australie, l'Europe, les pays du Golfe sont les destinations préférées des migrants. Les statistiques annoncées par le conférencier sont plus édifiantes, quand il déclare que sur les 16 pays qui captent les 22 millions de migrants africains, les 5 premiers se trouvent dans le continent africain et reçoivent plus de 53% des 22 millions de migrants, alors que le continent européen en reçoit environ 29%, tandis que 13% optent pour les pays d'Asie et 5% des migrants africains partent vers l'Amérique du Nord (Canada, USA). La migration féminine africaine demeure invisible, pourtant aujourd'hui, les Africaines migrent toutes seules. En ce qui concerne le transfert de fonds, là aussi, M. Musette révèle que 10 pays interceptent leurs transferts financiers à partir de la migration dans les pays africains, un apport financier non négligeable pour l'équilibre du budget de ces pays pauvres. Si les USA utilisent la carte verte (Green Card) pour attirer les élites africaines depuis des décennies,l'Europe s'est mise à la recherche des matières grises des pays africains en proposant à son tour la carte bleue (Blue Card) dans le cadre de la migration. Autant d'informations qui incitent les pays africains à riposter pour remettre dans son véritable contexte le phénomène de la migration. L'orateur n'a pas omis de rappeler les conséquences néfastes du phénomène de la migration du Nord vers le Sud (colonisation, esclavage), un rappel historique qui mérite le détour.