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Les démocrates au pied du mur
Publié dans El Watan le 06 - 11 - 2005

L'initiative de Ali Yahia Abdenour, aussi noble soit-elle, de vouloir relancer le pôle démocratique, et surtout de rapprocher le RCD et le FFS dans cette perspective, ressemble-t-elle à une gageure au moment où la Kabylie traverse, avec les partielles, une étape cruciale sur le plan politique ?
On se demande, en effet, comment est-il possible de matérialiser un projet aussi sensible alors que la société civile et les partis se réclamant de ce courant paraissent aujourd'hui éparpillés, déconnectés et donc difficilement enclins à la mobilisation. Depuis un certain nombre d'années déjà, plus précisément depuis la venue de Bouteflika à la tête de l'Etat, ceux qu'on appelle les « démocrates » par opposition aux islamistes et aux conservateurs se sont retrouvés sur une pente raide. Face à un pouvoir qui ne leur a fait aucune concession, qui a en revanche - c'est de bonne guerre - tout fait pour réduire leur influence à sa plus simple expression, ces derniers n'ont jamais pu trouver la cohésion nécessaire pour réagir efficacement. De surcroît, rongés souvent par des luttes intestines, ces partis n'ont fait que tourner en rond, laissant le terrain libre à leurs adversaires qui ne se sont pas fait prier pour s'y installer. C'est ainsi que les islamistes, qui étaient pourtant considérablement discrédités au sortir d'une décennie sanglante dans laquelle leur implication n'a jamais fait l'objet du moindre doute, et les conservateurs représentés principalement par le FLN, eux aussi longtemps « banalisés », ont repris langue avec la société, se permettant même le luxe, pour l'ex-parti unique, de revenir au premier plan et devenir la première force politique du pays. Il est évident que sans la bénédiction du pouvoir, ce renversement de situation au profit exclusif des partis qui s'alignent avec les thèses du sérail n'aurait pas eu autant de chance pour se réaliser. Mais les faiblesses des démocrates sont à rechercher dans leur propre camp. Cultivant un égocentrisme ravageur, reproduisant dans bien des cas les mêmes schémas de direction que ceux appliqués par le parti unique au temps où il était seul maître à bord, le zaïmisme en plus, les partis démocratiques, dont certains ont carrément changé de cap, se sont fourvoyés dans des débats stériles, doctrinaires, oubliant l'essentiel de leur mission à savoir l'action continue sur le terrain. Résultat : la vie politique nationale est tombée en désuétude en raison de la démission - forcée ou volontaire - des démocrates qui donnent de plus en plus l'impression d'éprouver les pires difficultés pour retrouver leurs marques. C'est donc dans cette atmosphère de confusion que le plan de Ali Yahia Abdenour intervient. Un plan qui a besoin des deux locomotives que sont le FFS et le RCD pour s'ébranler, mais qui rencontre déjà un accroc de taille avec le désaveu poli du parti d'Aït Ahmed. C'est dans la tradition. Dès qu'on tente de rapprocher les démocrates, il y a quelque part une volonté qui prend le contre-pied. Contrairement à l'autre camp où, même si les idéologies sont diamétralement opposées, on arrive à s'arranger sur le minimum pour défendre ses intérêts, à l'image des partis de la coalition gouvernementale qui se s'embarrasse pas de fioritures pour occuper d'abord la scène. Se mettre en retrait, c'est peut-être le grand défaut des démocrates qui ne prennent visiblement pas conscience que derrière leurs petits calculs, c'est toute l'opposition démocratique qui en pâtit. La Kabylie, bastion de la résistance démocratique, est en butte à un enjeu capital : elle risque de virer FLN. Que restera-t-il pour les deux grands partis qui ont toujours représenté la région ?

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