Le projet de loi de finances 2011 qui a été présenté et débattu la semaine dernière au niveau de l'assemblée populaire nationale (APN) n'a pas réussi à susciter le débat, à l'inverse des dernières lois de finances complémentaires (LFC), de l'avis même des députés. D'ailleurs, la commission des finances et du budget de l'APN l'a bien fait remarquer dans son rapport préliminaire en notant que le texte présenté par le gouvernement «ne comporte pas de dispositions importantes puisque un bon nombre de mesures à dimension économique et sociale a déjà été pris en charge dans la LFC 2010». Il faut savoir que depuis l'année 2005, le gouvernement a eu systématiquement recours à des lois de finances complémentaires, soit 6 en autant d'exercices fiscaux. Or le recours à une LFC doit être «une exception et non pas la règle», note M. Abdelmadjid Ait Habouche, professeur d'économie à l'université des sciences économiques d'Oran. «Etablir un budget suppose de prévoir plus au moins correctement les évolutions du marché» et dans ce cas, ce qui est mis en cause, c'est «l'insuffisance de la de la prévision et d'une évaluation qui permette de déterminer de la manière la plus proche possible les tendances du marché» de la part du gouvernement, explique notre interlocuteur. Cette carence peut être comblée par le biais d'une «organisation à mettre en place à travers des structures de prévisions et d'observation. C'est un investissement qui doit être inclus dans l'optique globale du développement». Compte tenu de cette réalité, la commission des finances de l'assemblée a estimé que «le contenu du projet de loi ne répond pas au préoccupations des députés». Le fait est, a-t-on noté, que l'essentiel des mesures des articles porte sur la modification, l'adaptation, la suppression ou la reformulation des articles de lois déjà existantes. Cette situation a eu pour effet de brider les débats, les députés se contentant souvent de plaider la cause de leurs régions respectives. Par ailleurs, le peu d'intérêt suscité par ce texte a été tel que l'essentiel des amendements proposés par la commission des finances de l'APN a porté sur la forme et non sur le fond des articles. Pourtant ladite commission a bien tenté d'interpeller le gouvernement sur certaines questions qu'elle juge cruciales comme la situation des comptes du Trésor, insistant sur la transparence en la matière et sur l'importance d'une loi de règlement budgétaire. Cette dernière a maintes fois été réclamées par l'APN, mais jusqu'à récemment encore (approbation par le conseil des ministre de la loi de règlement budgétaire pour l'exercice 2008) été ignorée par le gouvernement, bien que la démarche soit anti-constitutionnelle étant donnée que l'article 160 de la constitution stipule que «le Gouvernement rend compte, à chaque chambre du Parlement, de l'utilisation des crédits budgétaires qu'elle lui a votés pour chaque exercice budgétaire». Même avec la présentation de la loi de règlement budgétaire 2008, les députés savent très bien que leur préoccupation en matière de transparence et de contrôle sera difficilement pris en charge. Ils avouent clairement leur impuissance, surtout quand le gouvernement et à sa tête le premier ministre se montrent très généreux en matière de chiffres communiqués.«Nous n'avons aucun moyen de savoir si les chiffres que le gouvernement nous donne sont réels ou pas, mais comme nous ne pouvons pas le vérifier, nous les prenons pour argent comptant», nous a déclaré un député. L'efficacité de la dépense en question En matière de chiffres, il faut noter justement que le projet de loi de finances 2011 a prévu un rythme de dépense publique (6618 milliards de dinars) similaire à celui de l'exercice précédant, alors même que les recettes attendues ne sont guère plus conséquentes (2992 milliards de dinars). L'exercice 2011 qui est basé sur un baril de référence de 37 dollars sera donc assorti d'un déficit public de quelques 3 600 milliards de dinars couvert par les ressources du fonds de régulation des recettes qui comptait plus de 4300 milliards de dinars récemment. Un prix de référence à 37 dollars, alors que les prix du pétrole sont à plus de 80 dollars, c'est là «une mesure de prudence liée au caractère aléatoire du marché pétrolier», souligne M. Ait Habouche. La prudence n'a pourtant pas poussé le gouvernement à réduire l'envergure de ses dépenses. Mais sur ce point, le professeur d'économie estime que «la nécessité d'une dépense est liée à l'objectif du développement qui nécessite un gros effort». Ce qui importe dans ce cas, ce n'est pas tant l'ampleur de l'investissement public que «l'efficacité de cette dépense et l'évaluation de ses effets sur les autres secteurs et sur le développement de l'économie». M. Ait Habouche considère que « la question de l'efficacité de la dépense est un des moteurs de la croissance» et le souci pour l'Algérie c'est qu'il y a «un problème à l'amont d'insuffisance d'évaluation au niveau des effets de la dépenses». Il est à relever enfin que sur l'aspect fiscal, le projet de loi de finances 2011 a prévu des mesures d'encouragement pour la filière lait avec l'exonération de lRG et de l'IBS pour les activités portant sur le lait cru. Des exonérations entre 3 ans et 10 ans sont prévus pour respectivement les agences de tourisme et de voyage et les entreprises touristiques nationales et étrangers. D'autre part et afin d'encourager les exportations hors hydrocarbures, le texte a prévu une exonération permanente pour les prestations de services et les opérations de vente destinées à l'exportation. Il y est question aussi d'une exemption de la vignette pour les véhicules roulant au GPL.