De culture camerounaise et française, Sandra Nkaké mêle jazz, soul et R&B avec un talent et une inventivité sans pareil. Chanteuse à textes, elle slame et clame. Elle a donné hier un concert à la salle Cosmos de Riadh El Feth (Alger). - Quel était votre parcours ? Vous sentiez-vous destinée à une carrière artistique ? J'ai toujours voulu faire un métier en rapport avec l'échange. Médecin, journaliste puis professeur ont été mes motivations. Après un DEUG d'anglais à la faculté de la Sorbonne, j'ai rencontré des comédiens et des musiciens avec qui j'ai très rapidement commencé à monter des projets : pièces de théâtre, collaborations chantées… Avant ça, je chantais comme tout le monde, sous ma douche et un peu partout en fait et un peu tout le temps. Je suis autodidacte et ai appris au contact de mes multiples partenaires artistiques. - Aujourd'hui, le live représente une part considérable de votre univers. Pourquoi ce choix ? C'est une évidence et c'est par la scène que j'ai débuté ! J'aime ces instants qui sont de continuelles premières fois, j'aime la sensation réelle de m'adresser à des êtres et de sentir qu'en leur contant des histoires, en véhiculant des émotions par le biais de la musique, on peut créer un espace de dialogue, d'échange. Je souhaite ouvrir des fenêtres sur des ailleurs intérieurs. - Vous avez une expérience au théâtre et à la télévision. Pouvez-vous nous en parler ? La première fois que j'ai foulé une scène de manière professionnelle, c'était en tant que comédienne dans Les Sorcières de Salem mis en scène par Thomas Ledouarec, puis j'ai fait plusieurs spectacles dont le point commun était de mêler musique et théâtre. J'ai participé à un beau spectacle, Zig-Zag, créé par Phillis Roome avec Afida Tahri. Il parlait de ce qu'était être une femme d'ailleurs ici (Afida est d'origine marocaine, Phyllis, anglaise et moi d'origine camerounaise). Nous avons mis en scène des récits de vie et chanté des chants de partout dans le monde : traditionnels, berbères, arméniens, allemands, anglais, espagnols et bien sûr français. J'ai adoré aussi travailler avec Praline Gay-Para, une conteuse dont la poésie me bouleverse. Nous avons crée ensemble Un aller pas si simple qui s'articulait autour du besoin de donner une autre voix à la diaspora issue de la traite négrière : nous avons adapté des contes, des nouvelles (Chester Himes) entre autres et chanté (Toto Bissainthe, Nina Simone….). C'était un spectacle où la voix était nue : pas d'amplification et la scène nue ! - Pourquoi chanter exclusivement en anglais ? Parce que j'aime la musique de cette langue et j'aime aller au plus près de ce qui est juste pour moi, mais je chante aussi en français (La mauvaise réputation, Souffles), en espagnol, aussi parfois en d'autres langues même si je ne les comprends pas, mais parce que j'en aime la «musique». Je pense qu'il est très important de ne pas se fixer de barrière de langues mais toujours avoir comme objectif la première pulsion ! - Vous êtes en tournée mondiale jusqu'au mois de décembre, pourquoi aujourd'hui ? Mon premier album, Mansaadi, est sorti en 2008 et nous avons beaucoup tourné en France bien sûr, mais aussi en Amérique latine (Mexique, Brésil), en Suisse, en Afrique (Malawi, Zimbabwe, Mayotte, Burundi, Namibie...). Ce sera notre premier voyage dans le nord de l'Afrique et nous sommes tous très impatients de faire ce voyage ! - Quels sont les thèmes abordés dans vos chansons ? La confiance en soi, l'amour (fraternel, amical, maternel), la dimension politique de chacune de nos actions quotidiennes. J'avais envie avec ce premier album de donner de la joie et de dire qu'il est possible de construire un «chez-soi» artistique en restant soi-même ! - Des projets en cours ? Je travaille en parallèle avec un groupe d'amis, Push Up, dont l'album, The Grand Day Of Quincy Brown, est sorti en juin dernier : nous avons beaucoup de concerts et nous préparons le deuxième album. Ce projet raconte la vie d'un ami devenu le personnage central de notre histoire : Quincy Brown. Un homme qui élève seul ses enfants et qui se demande chaque jour s'il a fait les bons choix dans sa vie. Nous avions envie d'apporter une réponse collective aux questions d'un individu, envie de dire qu'à plusieurs, on est plus fort et que chacun peut être un «héros» à son niveau… Par ailleurs, je travaille aussi sur mon deuxième album qui devrait sortir en fin d'année prochaine, Push Up. Pour en savoir plus : www.myspace.com/thegranddayof