En colère contre les enseignants et les professeurs qui ont bafoué les instructions de son département, le ministre de l'Education nationale passe à l'acte. Il ordonne une ponction sur salaire de trois jours contre tous les enseignants qui se sont absentés, jeudi, troisième jour de l'Aïd. Faut-il rappeler qu'à la veille de la fête de l'Aïd, les services du ministère de l'Education ont adressé une note à tous les établissements scolaires, sommant les enseignants de reprendre les cours jeudi, faute de quoi, ils seront sanctionnés. Le département de Benbouzid avait même refusé la proposition des syndicats de l'éducation concernant la prolongation du congé contre le rattrapage des cours. Aujourd'hui, le ministère se dit étonné du comportement des éducateurs qui n'ont pas respecté la directive de la tutelle. «Il existe un Etat dans ce pays. Les travailleurs ont été avisés via une instruction, la moindre des choses est de la respecter. Faire semblant de l'ignorer est un manque de respect à nos institutions», a soutenu un responsable au niveau du ministère. A leur tour, les syndicats s'étonnent de l'entêtement de la tutelle qui décide de punir uniquement les enseignants, alors que, selon eux, la responsabilité est partagée entre les enseignants, les élèves et les chefs d'établissement. M. Meriane du Syndicat national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Snapest) qualifie de discriminatoire les mesures prises par le ministère à l'égard des enseignants. «Le ministère l'Education doit appliquer la sanction à tout le monde. Pourquoi les membres de l'administration, entre autres les directeurs des établissements, ne sont pas touchés par la directive», pense M. Meriane qui explique que dans l'intérêt de l'élève, le ministère aurait dû adopter la proposition des syndicats. «La journée de jeudi était intercalée entre la fête de l'Aïd et le week-end. Il aurait été préférable de sacrifier cette journée et rattraper par la suite les cours durant les après-midi de samedi et mardi, que d'obliger les enseignants à reprendre les cours», notent les syndicalistes qui estiment que le ministère aurait dû faire preuve de souplesse au lieu de prôner des menaces, et ce, dans l'intérêt de l'élève. A l'unanimité, les syndicats pensent que la réaction de la tutelle relève de la provocation. «Si l'on tient compte de nos traditions et coutumes, les gens passent la fête de l'Aïd avec la grande famille. Pourquoi le ministère n'a pas prévu à l'avance un pont, ainsi il aurait évité toute polémique et spéculation autour d'un fait anodin», font remarquer les syndicalistes. «Nous connaissons toutes les lois, la défalcation de trois jours pour les enseignants n'arrange pas en premier lieu les élèves», a soutenu Meriane. Pour sa part, M. Boudiba du Conseil national autonome des professeurs de l'enseignement secondaire et technique (Cnapest) récuse les accusations du ministère qu'il qualifie de provocatrices. «Nous ne nions pas que certains enseignants, notamment ceux habitant les régions éloignées, n'ont pu rejoindre leurs établissements faute de disponibilité de transport. Les enseignants ne sont pas tous véhiculés. Le ministère devrait tenir compte de tous ces aléas avant de prendre une quelconque décision», a soutenu Boudiba qui note que beaucoup d'enseignants ont défié Benbouzid qui a utilisé la menace à la place du dialogue. «Certains enseignants assument pleinement leur geste. Ils ont préféré s'absenter que de rattraper les cours, car le ministère a refusé leur proposition qui était plus juste», a souligné notre interlocuteur. En outre, les syndicats rejettent la responsabilité sur les élèves qui n'ont pas jugé utile de se rendre à l'école le troisième jour de l'Aïd. «Le taux d'absentéisme chez les élèves était plus important que celui des enseignants. Face à cette situation, ces derniers ont été obligés de rebrousser chemin pendant que d'autres ont donné des cours à cinq ou six élèves présents dans une classe. Que faut-il faire aujourd'hui ?» s'est interrogé un enseignant. Faut-il refaire le cours aux élèves qui ont séché ? «Nous connaissons parfaitement les lois qui régissent le secteur de l'éducation. Ces lois protègent l'intérêt de l'élève. Avant de rédiger des instructions, le ministère aurait dû étudier tous les cas de figure et agir ensuite en fonction de la situation», a répliqué Boudiba. Imperturbable, le ministère ne compte pas faire marche arrière…