Portoroz, en Slovénie, a accueilli du 8 au 11 novembre la 14e réunion des parties contractantes à la Convention sur la protection du milieu marin et du littoral de la Méditerranée. On y compte des représentants des 21 pays riverains de la Méditerranée qui vont tenter, ensemble, de trouver des moyens de lutter contre la pollution marine. L'Algérie compte huit importantes villes côtières (Alger, Oran, Annaba, Ghazaouet, Mostaganem, Arzew, Béjaïa, Skikda) qui connaissent de graves problèmes de pollution, notamment une pollution par les hydrocarbures importante due au fort trafic pétrolier qui passe au large des côtes algériennes. On estime que plus de 50 millions de tonnes de pétrole et de produits pétroliers sont exportés annuellement à partir des ports algériens et tunisiens. Un des meilleurs observatoires de la question est le Centre régional méditerranéen pour l'intervention d'urgence contre la pollution marine accidentelle (Rempec). A l'occasion de la réunion de Portoroz, son directeur, le contre-amiral Roberto Patruno, revient sur les actions et les défis du Rempec. Qu'est-ce-que le Rempec ? C'est un centre régional des Nations unies qui a été établi en 1976 dans le cadre du Plan d'action pour la Méditerranée (PAM). Il est basé à Malte et administré par l'Organisation maritime internationale (OMI). Seules 18 personnes y travaillent, mais nous faisons appel à de nombreux consultants. Quelles sont ses prérogatives ? Entre 1976 et 2000, nous avons eu une première phase d'étude et de préparation. Depuis 2002, et surtout 2004, nous avons une attitude beaucoup plus active. Nous lançons des activités et mettons en place des programmes pour prévenir la pollution marine et éviter de graves accidents. En cas de pollution marine, ce sont les autorités du pays touché qui doivent prendre des mesures. Le Rempec les aide à développer et à renforcer leurs capacités de lutte, et offre assistance et formation. Nous avons déjà formé 2600 personnes parmi les autorités des pays. Nous facilitons aussi la coopération entre les pays, avec la mise en place de systèmes bilatéraux et/ou sous-régionaux de préparation à la lutte et de lutte contre la pollution accidentelle en milieu marin. Par exemple ? Un groupe de pays bien préparés réagira mieux et plus vite. Trois Plans d'urgence sous-régionaux ont été établis entre des pays frontaliers, à leur demande. Entre Chypre, Israël et l'Egypte en 1995 et en juin dernier entre l'Algérie, la Tunisie et le Maroc. Pendant la réunion de Portoroz, la Slovénie, la Croatie et l'Italie doivent en signer un. Avez-vous déjà eu à gérer un grave accident ? Les grands déversements accidentels d'hydrocarbures, les marées noires, sont ceux qui attirent le plus l'attention des médias et du public. Mais ils sont relativement rares, heureusement, et n'affectent que des zones relativement réduites ! La plupart se produisent en dehors de la Méditerranée, et le dernier pour la région remonte à 1991 dans le golfe de Gênes. Il ne sera jamais possible d'éliminer totalement la pollution marine accidentelle, mais notre objectif est de réduire au maximum le risque d'accidents en rendant plus sûre la navigation. Chaque année, nous organisons une simulation d'accident pour rester vigilants ! N'y a-t-il pas un fossé entre le nord et le sud de la Méditerranée, en ce qui concerne les moyens de réaction et de prévention des risques ? En 1976, aucun pays méditerranéen n'était préparé à réagir à un accident important. La situation s'est beaucoup améliorée. Même si les équipements portuaires ne sont souvent pas à la hauteur du trafic, les Etats se sont dotés de législation, de ressources, de matériel et de personnels. Si les Etats ont du mal à faire face à une situation d'urgence, ils peuvent demander l'assistance du Rempec ou d'autres pays. Le Rempec est à même de mobiliser l'assistance méditerranéenne grâce à l'Unité d'assistance méditerranéenne (UAM) qui n'offre pas d'équipement, mais une expertise. Nous avons maintenant tous les instruments de lutte à notre portée, mais nous devons effectivement renforcer la coopération Nord-Sud. La navigation est-elle la principale source de pollution marine méditerranéenne ? Non, des études ont montré que la plus grande partie de la pollution marine était générée à partir de la terre. De plus, la voie maritime reste le moyen le plus sûr, le moins onéreux et le plus respectueux de l'environnement sur de longues distances... Mais la pollution générée par le trafic maritime ne doit pas être sous-estimée. La navigation en Méditerranée est devenue très complexe ces 20 dernières années. La région compte plus de 300 ports et 30% du volume commercial maritime international y transite. 20 à 25% du trafic maritime mondial d'hydrocarbures passent par la Méditerranée et 250 à 300 pétroliers y naviguent en permanence ! La ligne pétrolière la plus importante, avec environ 90% du trafic pétrolier total de la région, relie le Canal de Suez en Egypte avec Gibraltar. Elle passe par la Sicile et Malte, puis suit les côtes tunisiennes, algériennes et marocaines. Propos recueillis par notre journaliste à Portoroz (Slovénie).