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La perception des recettes douanières et non douanières et l'exercice de certains contrôles fiscaux pour le compte du fisc Fiscalité et parafiscalité du commerce extérieur
Aux termes de l'article 6 bis du code des douanes, «indépendamment des autres droits et taxes prévus par des textes particuliers, les marchandises importées ou exportées sont passibles, selon le cas, des droits de douane d'importation ou d'exportation les concernant inscrits au tarif des douanes». Idir Ksouri (*) Les impositions fiscales et parafiscales précitées sont recouvrées par l'administration des douanes en vertu de l'article 234 du code des douanes. Cet article dispose : «A l'importation et à l'exportation, l'administration des douanes est chargée de percevoir les droits et taxes institués par la législation en vigueur pour le compte du Trésor public, des collectivités territoriales ou locales et des établissements publics. Ces droits et taxes sont recouvrés et les infractions constatées, poursuivies et réprimées comme en matière douanière, sauf dispositions contraires du texte institutif.» Il s'ensuit que l'administration des douanes a pour mission, notamment, de percevoir les droits, taxes et redevances dont sont passibles les marchandises importées ou exportées, ainsi que les produits des amendes et confiscations infligées aux contrevenants pour violation ou tentative de violation de la législation douanière(1). Il importe de noter que conformément à l'article 122 de la Constitution, la création, l'assiette et le taux des impôts, contributions, taxes et droits de toute nature sont de la compétence ratione materiae du Parlement. Par conséquent, aucun droit, ni taxe ou redevance ne peut être liquidé et recouvré par les services des douanes s'il n'a pas été institué par la loi ! Par ailleurs, tout paiement effectué par un redevable de l'administration des douanes entre les mains d'un agent des douanes habilité doit donner lieu à la délivrance par ce dernier d'une quittance établie en bonne et due forme (Cf. art. 105 du code des douanes). Pour se faire une idée sur la mission fiscale et parafiscale de l'administration des douanes, il convient d'examiner succinctement les bases légales et l'étendue de cette mission, c'est-à-dire les différents prélèvements fiscaux et parafiscaux que les services des douanes sont autorisés à opérer lors du dédouanement(2) des marchandises importées ou exportées. Préalablement, quelques notions générales sur les missions de l'administration des douanes en général ne seraient pas sans intérêt pour tous ceux que le commerce extérieur intéresse directement ou indirectement : apprenants, formateurs, importateurs, exportateurs, transporteurs, commissionnaires en douane, consignataires du navire, consignataires de la cargaison, avocats, experts, ainsi que les fonctionnaires habilités par le code de procédure pénale et le code des douanes à rechercher et à constater les infractions à la législation douanière : douaniers, gendarmes, policiers, agents du service national des gardes-côtes, agents des impôts, agents chargés des enquêtes économiques, de la concurrence, des prix, de la qualité et de la répression des fraudes. I. DE QUELQUES NOTIONS GéNéRALES SUR LES MISSIONS DE L'ADMINISTRATION DES DOUANES Il ressort de la lecture de l'article 3 du code des douanes, que la mission de l'administration des douanes est une mission polyvalente, ce qui signifie que cette administration exerce de multiples missions qu'on peut classer en trois catégories. Dans la première catégorie figure la «mission fiscale» consistant dans le recouvrement des droits, taxes et redevances dont sont passibles les marchandises importées ou exportées et dans l'exercice de certains contrôles fiscaux pour le compte du fisc, comme par exemple le contrôle des objets en métaux précieux importés. Dans la deuxième catégorie, on trouve la «mission économique» résidant, après l'abrogation de la loi sur le monopole du commerce extérieur, dans la mise en place d'une politique douanière nouvelle visant deux objectifs : • la réduction, voire la suppression des obstacles tarifaires et non tarifaires ; et • l'aide à apporter aux entreprises de droit algérien tournées vers l'extérieur, en mettant à leur disposition, notamment, un éventail de régimes douaniers économiques leur permettant de créer des richesses et des emplois et aussi de faire bouger d'autres activités, tels que par exemple les transports, les assurances, les banques, l'entreposage, la manutention, le pilotage, le remorquage, la consignation maritime, le courtage, l'expertise, la commission, etc. Dans la troisième catégorie, il y a les nombreuses «missions particulières» visant, entre autres, la sécurité publique, la santé, les règles d'origine, la propriété intellectuelle, l'information, les télécommunications, la normalisation, la métrologie, l'environnement, le patrimoine culturel et artistique, la consignation maritime, la colombophilie civile, etc. Comme on le constate, la protection douanière est une protection multiple touchant quasiment à tout ce qui a trait au commerce international ; elle ne réside pas uniquement, comme on a tendance à le croire, dans le contrôle des voyageurs et leurs bagages et véhicules. D'où l'importance de cette administration en tant que rempart de l'économie nationale, partenaire des entreprises et pourvoyeuse indéniable du Trésor public en ressources budgétaires appréciables. II. DES BASES LéGALES DE LA MISSION FISCALE DE L'AD-MINISTRATION DES DOUANES Les principaux textes constituant les bases légales de la mission fiscale de l'administration des douanes sont : • le code des douanes, notamment ses articles 3, 5, 6 à 9, 16, 19, 102 à 106 et 234 à 240; • l'ordonnance n° 01-02 du 20 août 2001 instituant un nouveau tarif des douanes ; • le code des taxes sur le chiffre d'affaires, notamment ses articles 1, 2, 8 à 13, 19, 23, 25, 28, 28 bis, 28 octiès et 42 ; • le code des impôts indirects, notamment ses articles 2, 41 à 48, 176, 340, 367 à 379, 446 à 468, 485 bis à 485 quater ; et • les lois de finances pour 1985, 2000, 2002, 2004, 2006, 2007. III. DE L'éTENDUE DE LA MISSION FISCALE DE L'ADMINISTRATION DES DOUANES La mission fiscale de l'administration des douanes - qui consiste comme on le sait dans la perception sur tout le territoire douanier, uniformément et sans égard à la qualité des personnes des droits, taxes et redevances dont sont passibles les marchandises importées ou exportées - englobe toutes les impositions, douanières et non douanières, relatives aux transactions commerciales internationales. Autrement dit, la mission fiscale de l'administration des douanes porte sur toute la fiscalité et la parafiscalité du commerce extérieur, sauf dispositions contraires du texte instituant le droit, la taxe ou la redevance dont il s'agit.. Selon le docteur en Droit Raymond Barraine(3), on entend par : • Fiscalité : l'«ensemble du système de perception des impôts, des lois qui s'y rapportent, des moyens qui y conduisent». • Parafiscalité : «Ce qui touche aux redevances de la nature des impôts ou taxes, sans en porter le nom». • Commerce extérieur : les «Transactions commerciales avec l'étranger». Conformément aux textes visés au titre II ci-dessus, les différents prélèvements fiscaux et parafiscaux que les services des douanes sont autorisés à opérer sont(4) : • Droits de douane ; • Droit de circulation sur les alcools, les vins et produits assimilés ; • Droit sur les piles électriques ; • Droit de garantie ; • Droit spécifique sur les appareils de radiodiffusion combinés ou non combinés, les appareils récepteurs de télévision combinés ou non combinés et les appareils de démodulation, de décryptage et de décodage ; • Taxe sur la valeur ajoutée ; • Taxe intérieure de consommation ; • Taxe sur les produits pétroliers ; • Taxe sur les céréales et les légumes secs ; • Taxe sur les carburants ; • Taxe additionnelle sur les produits tabagiques ; • Taxe sanitaire sur les viandes ; • Taxe sur les pneus neufs ; • Taxe sur les huiles, lubrifiants et préparations lubrifiantes ; • Taxe spécifique sur les sacs plastiques ; • Redevance pour prestations de service ; • Redevance sur le changement de résidence ; et • Redevance d'utilisation de l'infrastructure routière. Parallèlement, l'administration des douanes est également autorisée, en vertu des dispositions de l'article 156 de la loi n° 84-21 du 24 décembre 1984, modifiée et complétée, portant loi de finances pour 1985, à permettre le dédouanement en dispense des formalités du commerce extérieur et des changes des marchandises neuves importées sans paiement et dont le prix FOB ne dépasse pas 100 000 DA et à les taxer forfaitairement. Pour calculer le montant de chacun des dix neuf (19) prélèvements visés ci-dessus et d'autres encore que nous avons omis sciemment par manque d'informations, les mêmes services recourent, selon le cas: • soit à une «taxation ad valorem», impliquant pour calculer par exemple le montant des droits de douane exigibles, le choix, dans le cadre d'une opération de multiplication, d'un taux de droit de douane parmi ceux figurant au tarif des douanes, soit 5, 15 ou 30%, et d'une valeur, soit la valeur transactionnelle de la marchandise à taxer, augmentée, le cas échéant, de certains éléments prévus par le code des douanes ; • soit à une «taxation spécifique», exigeant, toujours dans le cadre d'une opération de multiplication, la prise en considération de la valeur de la quotité fixée et, selon le cas, un aspect physique de la marchandise à taxer : le poids, la longueur ou le volume ; • soit à une «taxation mixte», autorisant l'utilisation combinatoire des deux taxations précitées, ad valorem et spécifique; • soit à une «taxation forfaitaire», signifiant que la valeur en douane de la marchandise à taxer est fixée forfaitairement par l'administration des douanes conformément au code des douanes. IV. DES STATISTIQUES DES RECETTES DOUANIèRES ET NON DOUANIèRES RECOUVRéES PAR LES SERVICES DES DOUANES DURANT L'ANNEE 2009 ET LE PREMIER SEMESTRE 2010 Pour la pertinence et la crédibilité de cette modeste contribution, il importe de l'agrémenter de quelques données chiffrées relatives aux recettes budgétaires recouvrées par les services des douanes durant l'année 2009 et le premier semestre 2010. Il convient de préciser tout de suite que le site internet des douanes algériennes(5) sensé renseigner, à l'ère de la douane sans papier (e-customs), les internautes sur les différents aspects de l'activité matérielle et juridique des services des douanes ne nous a été d'aucun secours dans l'élaboration de cette étude! Selon certains quotidiens nationaux d'information citant le Centre national de l'informatique et des statistiques des douanes, les services des douanes ont recouvré durant l'année 2009 et le premier trimestre 2010, respectivement 460 et 254 milliards de dinars de recettes budgétaires, soit au total 714 milliards de dinars en l'espace de 18 mois, ce qui est insignifiant par rapport aux années antérieures(6). Cette évolution baissière est imputable, d'après la même source, à la diminution des importations engendrée par les mesures d'encadrement du commerce extérieur prises par les pouvoirs publics. Pour notre part, nous dirions que la baisse des recettes budgétaires est à chercher également du côté de l'Accord d'association signé avec la Communauté européenne et de celui passé avec la Zone arabe de libre-échange. CONCLUSION En dépit de cet amenuisement des recettes budgétaires indépendant de la volonté des services des douanes, et pour rester sur une note d'optimisme, il faut quand même admettre que ces services, malgré le peu de moyens dont ils disposent, font entrer journellement beaucoup d'argent dans les caisses du Trésor public. Par conséquent, il importe d'aider l'administration des douanes à se mettre au diapason de ses pairs, modernes celles-là, en lui donnant tous les moyens indispensables à l'exercice de sa mission polyvalente ! (*) Fonctionnaire des douanes en retraite, auteur et enseignant à l'INSIM de Béjaïa. -(1) On entend par «législation douanière», tous les textes législatifs et réglementaires, y compris les textes à caractère fiscal, dont la charge de l'application incombe à l'administration des douanes. -(2) Dédouaner une marchandise, c'est la faire sortir de la douane en payant les droits et taxes exigibles. -(3) R. Barraine, nouveau dictionnaire de droit et de sciences économiques, LG.D.J., 1974, pp. 109, 221 et 340. -(4) Pour connaître comment les services des douanes procèdent pour asseoir et liquider ces prélèvements, il conviendrait de consulter l'ouvrage technique de M. Idir Ksouri, intitulé «Techniques douanières et fiscales», Grand-Alger Livres Editions, 2010. -(5) L'auteur s'est fait déjà publier par El Watan Economie n° 219 du lundi 16 au dimanche 22 novembre 2009 un point de vue intitulé : «Le site internet des douanes algériennes : une coquille vide». -(6) Dans les années 1970, l'administration des douanes, dirigée alors par l'ex directeur national des douanes, feu Si Moussa Mohamed, que Dieu ait son âme, a recouvré, malgré l'insignifiance de ses moyens, l'équivalent des crédits inscrits au budget de fonctionnement de l'Algérie.