La Jordanie peut compter sur l'expertise israélienne pour la construction d'un réacteur nucléaire dont l'entrée en service est prévue en 2013. La révélation est contenue dans un câble de l'ambassade américaine à Tel-Aviv et repris sur le site WikiLeaks relatant la visite, en 2009, de la sous-secrétaire d'Etat en charge du Contrôle de l'armement et de la Sécurité internationale, Ellen Tausher. Israël est favorable à cette construction, mais a estimé que des inquiétudes existent sur «la sûreté biologique» et «la pollution de l'eau» dans la région. Tel-Aviv soutient les pressions de Washington sur Amman pour signer 123 accords relatifs à l'utilisation de ce réacteur. Les Etats-Unis considèrent la demande égyptienne de créer au Moyen-Orient «une zone débarrassée du nucléaire» (la fameuse Nuclear-weapon-free zone ou NWFZ) comme un moyen de transférer l'attention de l'Iran vers Israël. Tel-Aviv qualifie la position égyptienne d'obsessionnelle. «Les Etats-Unis n'entreprendront aucune action qui compromettra la sécurité d'Israël», a répondu Ellen Tausher. Pour elle, lier le potentiel nucléaire israélien à celui de l'Iran «n'aide pas l'Egypte». Aux yeux de Tel-Aviv, Le Caire veut se mettre à l'abri des critiques régionales en évoquant le potentiel nucléaire israélien au même niveau que celui de l'Iran. Pour le général Amos Gilad, responsable des questions politiques et de sécurité au ministère de la Défense israélien, le président égyptien, Hosni Moubarak, ne fait pas confiance à son ministre des Affaires étrangères, Ahmed Abou Al Gheit, sur ce dossier. «L'Egypte a des craintes sur la situation interne post-Moubarak», a-t-il estimé. Dans le même câble, on apprend qu'Israël considère le Traité de non-prolifération nucléaire (TNP) comme insuffisant et qu'il doit être «renforcé». Pourtant, Israël est parmi les rares pays qui n'ont pas encore signé ce traité ni celui sur l'interdiction de la production de matières fissiles (FMCT) ! Israël estime que le FMCT a une valeur ajoutée faible. «Quelle est la véritable cible du FMCT, l'Inde, le Pakistan ou Israël ?» s'est interrogé, le général David Danieli, sous-directeur de l'Israel Atomic Energy Commission. Amos Gilad a révélé que la Russie a proposé d'arrêter son projet de vente de systèmes de défense antiaériens S300 à l'Iran contre l'achat, pour 1 milliard de dollars, de la dernière technologie de drones israéliens. «Nous avons refusé de vendre cette technologie de peur qu'elle tombe entre les mains des Chinois», a-t-il dit. Si Israël est en état d'alerte permanent en raison de «la menace iranienne», Amos Gilad a confié n'être pas sûr que l'Iran ait décidé de se doter d'«une arme nucléaire, mais est déterminé d'avoir une option d'en fabriquer une». Et le rédacteur du câble de souligner que Gilad «voit dans une boule de cristal» ! Obtenir l'accord avec la Chine et la Russie, et réaliser «le consensus» au sein de l'Union européenne est, pour Israël, le meilleur moyen de contrer le programme atomique iranien. Dans un autre câble, il est souligné que Tel-Aviv est inquiet à cause de l'éloignement de la Turquie dans ses relations avec l'Etat hébreu. «La Turquie a pris une direction islamique dans le but de devenir une superpuissance régionale», est-il estimé. L'armée, selon la même source, a perdu la capacité d'influencer le gouvernement sur les choix stratégiques. «Nous avons un mauvais sentiment», est-il noté. Hier à Washington, Ahmet Davutoglu, ministre turc des Affaires étrangères, a déclaré que la Turquie ne veut rien reprendre à l'histoire. Un câble de l'ambassade d'Ankara a rapporté que le chef de la diplomatie turque, qui vient de publier un livre sur le rôle futur de son pays, aspire à redonner à l'Asie mineure la force de l'Empire ottoman. La Turquie a exprimé le souhait, lors d'une visite du secrétaire à la Défense américain, Robert Gates, en février 2010, de participer davantage au programme de fabrication d'un avion de combat JSF (Joint Strike Fighter). L'Australie, le Canada et le Danemark sont déjà partie prenante dans ce programme chapeauté par Lockheed Martin et qui doit aboutir à la construction d'un avion superpuissant, le F35. Robert Gates a estimé que les Européens «sous-estiment» trop la Turquie en tant qu'allié. Dans un télégramme datant de 2006, l'ambassade US à Ankara a observé que les membres du corps diplomatique turc sont biens formés, mais certains sont «trop islamo-centriques». Dans un message du département d'Etat, qui remonte à février 2010, il est révélé que Washington suit de près les transactions entre des firmes turques et l'Iran relatives à des équipements militaires. Il est noté que ces échanges violent la résolution 1747 de l'ONU.