Un vibrant hommage a été rendu hier à la Bibliothèque nationale d'Algérie (BN), à Alger, à l'écrivaine Nadjia Abeer (patronyme Benzeggouta), décédée le 22 octobre dernier à Alger. La cérémonie a été marquée, entre autres, par deux conférences animées respectivement par Mme Fatiha Nesrine, écrivaine et pédagogue, amie de la disparue, et l'écrivain et journaliste Rachid Mokhtari. Dans son intervention, Mme Fatiha Nesrine a relevé les qualités artistiques de l'écrivaine qui joue aussi du piano, peint, comme elle a de bonnes aptitudes pour le théâtre. Elle indique que l'écrivaine « a toujours eu un sens aigu de la liberté, une liberté néanmoins à conquérir. D'où les reproches exprimés à l'égard de l'environnement social ». Qui de par ses traditions et normes ne fait que « surveiller, contrôler et épier ». De son côté, Rachid Mokhtari constate que, durant la décennie 1990, « on a assisté à une production littéraire algérienne marquée par un ras-de-marée de témoignages sur la tragédie que vit le pays ». Littérature qu'il qualifie d'« écriture d'urgence ». Laquelle « a changé de discours avec la perception de la littérature algérienne précédant cette période ». Notamment celle de la première génération représentée, entre autres, par Mouloud Mammeri, Mouloud Feraoun, Kateb Yacine, Mohammed Dib et Malek Haddad. L'écriture d'urgence est caractérisée par la priorité donnée au témoignage, lequel l'emporte sur l'imaginaire et l'esthétique. Après l'année 2000, apparaît une littérature en rupture avec l'écriture d'urgence. Elle est amorcée par des écrivains, à l'exemple de Nadjia Abeer. Ses trois œuvres, Constantine et les moineaux de la murette (2003), L'Albatros (2004) et Bab El Kentra (2005), constituent, selon le même intervenant, une trilogie autobiographique. Cependant, l'œuvre « n'est pas passéiste. Le passé est pénétré avec un regard du présent et sans nostalgie. L'écriture est sensitive, linéaire et simple. Elle dégage une volonté esthétique. Constantine est revisitée non comme une ville effective, mais affective ».Notons que Nadjia Abeer est née le 16 septembre 1948 à Constantine. Après des études à l'Ecole normale d'institutrices de sa ville natale, elle entame des études aux Etats-Unis ; elle enseigne au Moyen-Orient puis en Algérie. Spécialisée en littérature américaine, elle enseigne de 1984 à 1988 l'anglais à l'Ecole normale supérieure d'Alger, option littérature américaine. Elle prend sa retraite en 2002. A titre posthume, seront publiées ses nouvelles, Comme l'hirondelle, Quand l'amour n'y est pas. Ainsi que ses conférences « Tendresse de l'enfance ou le refus de grandir » et « Les symboles et les signes dans l'Albatros ». Conférences animées respectivement en avril et mai derniers.