Quelques jours après la polémique ouverte par Marine Le Pen sur le parallèle entre les prières de musulmans dans des espaces publics, des «assises contre l'islamisation de l'Europe» devaient se tenir hier à Paris. S'agit-il réellement de défense de la laïcité ? De quelle laïcité ? Ou de prétexte à une nouvelle campagne de stigmatisation des «musulmans», ceux qu'on appelait, il n'y a pas si longtemps, les «étrangers», les «immigrés» ou encore les «Arabes» ? L'organisation de ce colloque par le mouvement d'extrême droite «Bloc identitaire et Riposte laïque» a suscité les protestations d'une vingtaine d'associations et de partis de gauche qui ont appelé à une manifestation pacifique. En réaction à ces assises dont l'objet «n'a strictement rien à voir avec la laïcité, mais à l'inverse, les idées véhiculées ne sont porteuses que d'un discours haineux et potentiellement violent contre une partie de nos concitoyens, sous le prétexte de leurs convictions religieuses», le PCF, le NPA, le PRG, Europe Ecologie-Les Verts et le PG du XIIe arrondissement de Paris ont appelé à une manifestation pacifique à laquelle des centaines de personnes ont répondu. La Ligue des droits de l'homme (LDH), Attac, RESF, le syndicat SUD-Rail se sont associés à cet appel «à se rassembler symboliquement et pacifiquement», à partir de 11h, à proximité de l'espace Charenton (XIIe). Dans un autre communiqué, SOS Racisme a aussi appelé à manifester à la même heure à proximité, place des Fonds Verts. «Nous ne devons pas accepter cette provocation raciste», avertit l'association. Par ailleurs, dans un courrier, le maire (PS) de Paris, Bertrand Delanoë, avait demandé au préfet de police «de bien vouloir prendre toutes les mesures nécessaires» pour que la réunion «ne puisse avoir lieu», car elle «ne peut qu'engendrer haine, xénophobie et trouble à l'ordre public». Le maire de Paris rappelle que le Bloc identitaire «multiplie depuis des années les provocations, organisant à Paris ou à Nice des ‘‘soupes au cochon'' pour les sans-abri ou l'‘‘apéro saucisson-pinard'' en juin à la Goutte d'Or». Le Mouvement contre le racisme et pour l'amitié entre les peuples (MRAP) a également demandé l'interdiction de ce «congrès raciste», disant craindre «des troubles à l'ordre public, des agressions et des débordements». Le préfet de police a mis «solennellement en garde» les organisateurs et les participants des «Assises contre l'islamisation de l'Europe», les menaçant de poursuites en cas de dérapage. Il n'a, en revanche, pas fait annuler le meeting. Rappelant en effet qu'«elle ne peut interdire la tenue d'une réunion que s'il s'agit du seul moyen d'assurer l'ordre public», la préfecture a lancé cet avertissement aux «responsables de la réunion publique» et aux «orateurs qui y prendront la parole». «En cas d'infraction, leur responsabilité sera recherchée devant les tribunaux». La tonalité des Assises sur l'islamisation est claire. Face à «l'Islam [qui] nous a déclaré la guerre» (thème de l'une des interventions programmées), il faut «défendre notre identité et notre civilisation» (thème d'une autre intervention). Oskar Freysinger—l'un des élus de l'Union démocratique du centre (UDC), qui est à l'origine des votations suisses sur l'interdiction d'édification des minarets et sur l'expulsion des délinquants étrangers—ou encore Tommy Robinson—de son vrai nom Stephen Yaxley-Lennon—, le chef de l'English Defence League, mouvement très prisé des hooligans d'extrême droite et des nationalistes autonomes.