C'est l'histoire d'un peuple qui attend le métro depuis plus de trois décennies. Sans cesse différé depuis 1982, le plus ancien chantier d'Algérie offre une parfaite illustration du mode de fonctionnement du pays. A son arrivée au pouvoir, Abdelaziz Bouteflika avait fait du projet du métro d'Alger un symbole du développement du pays. «Je ne peux pas attendre dix ans, a-t-il tonné en avril 2006. Ou je suis décidé à faire le métro ou je ne le suis pas et je ferme boutique.» Deux mandats sont passés sans que le président ne mette la clef sous le paillasson. En dix ans, de nombreux ministres se sont succédé au département des Transports, dont l'un n'a pas survécu à la fin des travaux. Comme ses prédécesseurs, Amar Tou persiste à affirmer que les chantiers avancent bien. A l'en croire, toutes les stations sont achevées, l'ensemble des équipements opérationnels, la totalité des rames de voitures réceptionnée et les essais dynamiques sont en cours. Tel Sisyphe, les ministres des Transports successifs semblent avoir été condamnés à un éternel recommencement. Selon la dernière promesse de Amar Tou, l'ouverture des stations du métro est prévue pour le début de l'année 2011. L'enthousiasme du responsable des transports ferait presque oublier l'accumulation des couacs : les travaux de la première ligne du métro sont, dit-on, à l'arrêt à cause du différend entre le groupement chargé de la réalisation et l'Entreprise du métro d'Alger (EMA) sur les surcoûts. Le projet du métro d'Alger aurait coûté 90 milliards de DA (1,2 milliard de dollars) sans les travaux d'extension. Le coût total du projet serait de l'ordre de 139 milliards DA (1,85 milliard de dollars). Une partie des dépenses est assurée par les citoyens par le biais de la taxe automobile instituée dans une précédente loi de finances. Même s'ils n'auront jamais à prendre le métro, certains ont ainsi été contraints de participer à son financement. Aux chantiers du métro se sont ajoutés ceux du tramway, dont les citoyens ne connaissent, pour l'heure, que les désagréments. Dans sa déclaration de politique générale, le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, a affirmé que «le transport par tramway s'étendra à un total de 17 villes». «Une unité d'assemblage, a-t-il souligné, de cet équipement est en cours de lancement à Annaba, pour une production incluant une intégration locale appréciable.» Là encore, les fausses notes se multiplient : le groupement en charge de la réalisation du tramway de la capitale aurait «refusé» de s'engager sur un délai pour livrer la totalité du projet. Pendant ce temps-là, les Algériens attendent, chaque jour un peu plus désabusés, que leurs gouvernants tiennent enfin leurs promesses.