Au quatrième jour d'émeute, le régime commence à sortir de son silence et à admettre qu'il y a quelque chose qui ne va pas dans le pays, terre pourtant prospère où l'inflation a officiellement été ramenée à 5% et le chômage à 10, selon les récents chiffres de Ouyahia. En mode vibreur pendant deux jours, il a donné dans un premier temps ordre aux médias lourds d'expliquer cette révolte qui touche pas moins de 20 villes du pays par des «casseurs isolés», des espèces de Wisigoths sortis de nulle part pour en finir avec l'Algérie. Peu après, il a sommé l'APS, agence officielle gouvernementale, d'admettre des «mouvements de protestation», pesant soigneusement ses mots, comme un kilo de farine. Entre temps, le Premier ministre, premier concerné et patron du RND par ailleurs, était trop occupé à compter ses réserves de change et c'est Seddik Chiheb, vice-président du RND à l'APN, qui a parlé. Pour lui, ce sont des lobbys qui ont fait ça. Ce ne sont donc plus des casseurs isolés ou des protestataires, mais des groupes d'intérêt qui sont en train de mettre le pays à feu et à sang. Quel est ce lobby capable de faire sortir dans la rue tout un pays ? L'honorable officiel ne le dit pas, tout comme Hachemi Djiar, ministre, qui parle de «manipulation». Mais devant l'embrasement général, tout le monde commence à se poser des questions, à tort ou à raison, sur une colère spontanée ou un coup de main pour pousser les jeunes dans la rue. Seul réconfort, le régime, pour l'instant, n'a pas encore osé parler de la main de l'étranger, ce qui constitue indéniablement un gros progrès. En tout état de cause, la révolte est là et au vu des conditions socioéconomiques, du coût de la vie et de la fermeture de tous les canaux d'expression de débat, l'Algérie n'a besoin de personne pour s'énerver. Que va-t-il se passer ? Personne ne le sait vraiment, la situation est devenue incontrôlable. Mais ceux qui ont ruiné ce pays doivent partir ou s'amender, arrêter le sucre ou boire de l'huile bouillante en public, qu'ils soient du clan Bouteflika, Toufik ou cheb Tchoutchou.