Fatalement et en l'absence de solution, l'occupation israélienne du Liban-Sud revient sur le devant de la scène internationale comme pour rappeler son existence à une opinion délibérément induite en erreur, depuis quelques années. Et ce n'est pas la résolution du Conseil de sécurité de l'ONU de septembre 2004, demandant le désarmement des groupes armés au Liban qui y contribuera, ou aidera aussi bien à établir les faits, qu'à y trouver la solution adéquate. Seule l'ONU, gardienne de la légalité internationale et des cartes qui l'accompagnent, persiste dans son attitude, soutenant de fait la revendication libanaise de restitution de la zone des fermes de Chabaâ, un territoire libanais d'une vingtaine de km2 pris aux Syriens par les Israéliens en 1967. C'est donc la guerre, bien que plongée dans l'oubli. De violents affrontements ont opposé lundi le mouvement de la résistance libanaise Hezbollah à l'armée israélienne. Commencés en début d'après-midi, les échanges d'artillerie entre les deux camps ont duré plusieurs heures, à la veille de la fête de l'Indépendance libanaise. Il s'agit des plus violents combats à s'être déroulés depuis plusieurs mois dans cette zone qui connaît des embrasements à intervalles irréguliers. Comme souvent, les deux parties se sont renvoyé la responsabilité de l'ouverture des hostilités. Le Hezbollah a dit avoir engagé le combat après qu'une patrouille israélienne eut violé la ligne de démarcation, et Israël a dit n'avoir fait que riposter à des bombardements massifs de l'artillerie du mouvement chiite. Le Hezbollah a annoncé que quatre de ses combattants avaient été tués. L'armée israélienne a annoncé qu'onze de ses soldats avaient été blessés, dont deux grièvement, dans le secteur des Fermes de Chebaâ occupé par Israël. La police libanaise a indiqué qu'au plus fort des combats, le Hezbollah avait tiré environ 300 obus en une heure. L'armée israélienne est en état d'alerte à la lisière nord depuis début novembre, de crainte que le Hezbollah ne tente de capturer des soldats. Alors que les combats avaient lieu à terre, notamment dans la localité de Ghajar, dont chacun des deux camps contrôle une partie, des chasseurs-bombardiers et des hélicoptères israéliens ont survolé de manière intense une grande partie du Liban-Sud, bien au-delà de la zone des affrontements, tirant des roquettes. Selon la police libanaise, des appareils israéliens ont été observés jusque dans les environs de Saïda, à une soixantaine de kilomètres de la frontière. Les derniers accrochages, limités, entre le Hezbollah et Israël autour des Fermes de Chebaâ remontaient au 3 novembre. Les combats de lundi ont eu lieu alors que le Liban s'apprête à célébrer sa première fête nationale sans troupes syriennes depuis 30 ans, ces dernières ayant quitté le pays en avril. Dans un discours télévisé, le président libanais, Emile Lahoud, a mis en avant lundi soir « l'exigence d'entamer un dialogue national qui porterait sur toutes les questions qui préoccupent les Libanais », au rang desquelles figure le désarmement du Hezbollah, exigé par les Occidentaux. Selon une source gouvernementale libanaise, le Premier ministre, Fouad Siniora, a discuté avec les ambassadeurs des Etats-Unis et de France à Beyrouth, ainsi qu'avec le Hezbollah et des représentants de l'ONU pour tenter de calmer la situation. A Washington, le département d'Etat a condamné « les attaques menées par le Hezbollah » et a appelé l'Etat hébreu à la retenue. Se plaçant en situation d'agressé, Israël a affirmé hier vouloir éviter une escalade militaire au Liban. Ce qui suit est encore plus exquis comme mensonge et déformation de la réalité, avec ce droit à la légitime défense que certains Etats ont même reconnu à ce dernier contre tout bon sens. « La solution n'est pas militaire, elle passe par l'application dans son intégralité de la résolution 1559 du Conseil de sécurité de l'ONU », a indiqué un responsable. « Cette résolution qui prévoit le désarmement de toutes les milices, notamment de la plus importante d'entre elles, le Hezbollah, n'a pas été appliquée, rien ne s'est produit », a rappelé le porte-parole, oubliant le fait que les Libanais eux-mêmes considèrent le Hezbollah comme un mouvement de résistance, et si cela est considéré, c'est forcément par rapport à une situation, c'est-à-dire l'occupation israélienne. Et comme si ce travail de mystification ne suffisait pas, et là, la question de la provocation de tels actes se pose d'elle-même, le directeur général du ministre des Affaires étrangères Ron Prosor a affirmé qu'Israël allait lancer une campagne diplomatique « pour faire cesser tout contact entre le ministre du Hezbollah au sein du gouvernement libanais (Mohammad Fneich, ministre de l'Energie et des Ressources hydrauliques, NDLR) et des représentants de pays étrangers ». Selon la radio israélienne, le chef de la diplomatie Sylvan Shalom va tenter de nouveau de convaincre l'Union européenne d'inscrire le Hezbollah dans sa liste noire des organisations terroristes. Le Hezbollah est visé indirectement par cette liste à travers un de ses dirigeants nommément cité. Cela rappelle étrangement la position israélienne à l'égard du mouvement palestinien Hamas qu'Israël entend interdire de participation aux élections législatives palestiniennes de janvier prochain. Trop d'enchevêtrements, et c'est toute la complexité - voulue - du dossier du Proche-Orient.