Les greffiers ont entamé, hier, un mouvement de grève illimitée, créant une paralysie des activités au niveau de nombreux tribunaux, cours et administrations judiciaires de plusieurs wilayas dont Biskra, Guelma, Bordj Bou Arréridj, Tébessa, Batna, Boumerdès, Alger, et Blida. Spontané, ce débrayage, qui a surpris plus d'un, a été déclenché pour protester contre les conditions socioprofessionnelles, qualifiées «d'indignes» par les greffiers. Rassemblés à la sortie entre autres des tribunaux de Sidi M'hamed, El Harrach, Hussein Dey, Baïnem, mais également au hall de la cour d'Alger, ils réclament tous «un salaire décent», «un statut à la hauteur» de leur mission, et «l'amélioration du cadre de vie» et le «respect» de leur fonction, et surtout le départ des responsables du syndicat des greffiers, jugés «inactif». Des revendications qu'ils estiment «vitales» et pour lesquelles ils comptent «aller jusqu'au bout». C'est en tout cas les avis que nous avons récoltés hier, auprès de bon nombre d'entre eux rencontrés sur leurs lieux de travail. «Après 32 ans de service, mon salaire ne dépasse pas les 22 000 DA, alors que les magistrats ont été augmentés à trois reprises. Pourtant, il y a une quinzaine d'années, la différence entre les deux catégories ne dépassait pas les 2000 DA. Ce sont les greffiers qui font la procédure. Sans nous aucun procès ne peut avoir lieu», déclare une greffière du tribunal de Sidi M'hamed, qui dit être à quelques années de la retraite. Plus jeunes, ses collègues d'autres juridictions abondent dans le même sens, tout en dénonçant le contenu du projet de statut actuellement en niveau du ministère. «Il n'y a que des sanctions qui nous attendent. Nous n'avons pas droit à l'erreur et le volume de travail que nous faisons dépasse largement celui des magistrats. Pourtant, il y a un monde qui sépare nos salaires et ceux des magistrats. Nous voulons réhabiliter notre profession à travers une fiche de paie décente et à la hauteur de notre mission…», souligne un greffier de la cour d'Alger. Un autre s'insurge contre le fait que les salaires de cette catégorie professionnelle soient les seuls à ne pas avoir connu de hausse, alors que «les enseignants, les policiers, les militaires, les médecins, les professeurs d'université, etc., ont tous été augmentés. Nous touchons à peine 16 000 DA et les plus anciens d'entre nous ne dépassent pas les 22 000 DA. Est-ce digne d'une corporation aussi importante que la nôtre ? Nous interpellons publiquement le président de la République, en tant que premier magistrat, pour qu'il mette un terme à cette injustice. Les promesses, c'est fini, nous n'y croyons plus…», lance un greffier de la cour d'Alger. Un de ses collègues enchaîne : «Cela fait 30 ans que je suis toujours un commis-greffier. Les promotions nous ne les connaissons pas. Nous stagnons à la même catégorie durant toute notre carrière. Nous voulons un statut digne de la profession.» La colère monte d'un cran, lorsque un émissaire du procureur général, près la cour d'Alger, vient leur annoncer la nouvelle. «Le procureur général vous demande de désigner six représentants pour vous annoncer ce que le ministre s'est engagé à faire», leur dit-il. «Nous remercions le procureur général, mais nous ne voulons plus de promesses. Nous ne reprendrons le travail qu'après avoir reçu du concret…», répondent-ils. Ils affirment que leur mouvement de protestation «se poursuivra» et «touchera toutes les autres juridictions» au niveau national jusqu'à ce que leurs revendications soient prises en charge.