Les résidents en médecine ont entamé, hier, le premier jour d'une grève nationale illimitée. Le débrayage, initié par le Collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra), a connu un franc succès puisque le taux de suivi était, selon les estimations de fin de matinée, de plus de 90%. «Les résidents ont massivement répondu à l'appel et la grève est quasi totale dans l'ensemble des dix facultés de médecine de par le territoire national. Ce qui atteste au mieux de la justesse de nos revendications», affirme Mohamed Toufik Yelles, délégué et porte-parole du Camra. Ils étaient ainsi plus d'une centaine à observer un piquet de grève dans l'enceinte du centre hospitalier universitaire Mustapha Pacha où exercent quelque 600 résidents. Assis ou debout, des grappes de blouses blanches discutaient, l'air grave. Sur la placette intérieure du CHU Mustapha, des banderoles sont accrochées de part et d'autre de la stèle centrale. L'on peut y lire les revendications des grévistes. La scène est d'ailleurs devenue quasi coutumière des lieux, tant les résidents enchaînent et diversifient, depuis quelques semaines, les actions de contestation. Des sit-in et des rassemblements, puis des grèves cycliques de trois jours. Mais en vain. La radicalisation du mouvement semblait ainsi inévitable. «Il y a absence de réponse de la part des autorités compétentes, à savoir le ministère de la Santé, et un mépris affiché par les responsables du secteur sanitaire», déplore le Dr Yelles. «Sur la forme, il y a une hésitation palpable du ministère à ouvrir réellement et de manière efficiente le dialogue», ajoute-t-il. Et cette ambiguïté se traduit notamment, considère le porte-parole, dans l'hésitation du staff ministériel à contacter officiellement les délégués du Camra. «Contrairement à ce qui a été déclaré par le ministère, nous n'avons reçu aucune invitation à une quelconque réunion», affirme le Dr Yelles. Mais ce qui aura aussi mis le feu aux poudres est la note administrative envoyée, la semaine dernière, par le secrétaire général du ministère de tutelle à toutes les structures hospitalières universitaires et EHS. Y est formellement signifié aux directeurs des établissements de procéder à des défalcations sur salaire pour tous les jours de grève des résidents. De même, certaines déclarations de Djamel Ould Abbès, ministre de la Santé, ont été accueillies par les résidents avec la plus grande stupéfaction. «Le service civil ne relève pas du ministère de la Santé ? Alors, à nous de poser la question : de qui relève ce problème ?» s'interroge, ironiquement, le délégué. «Ils poussent au pourrissement. Mais nous sommes déterminés à aller jusqu'au bout, jusqu'à satisfaction totale de nos revendications», assurent, implacables, les grévistes.
Ils sont décidés à aller jusqu'au bout pour obtenir une réponse à leurs revendications. Après plusieurs mouvements de protestation, organisés dans l'enceinte du CHU Ben Badis de Constantine, des centaines de médecins résidents ont entamé, hier, à l'instar de leurs collègues à l'échelle nationale, une grève illimitée par la tenue d'un important sit-in devant le siège de la direction générale de l'établissement hospitalier qui emploie près de 700 praticiens, toutes spécialités confondues. Nous saurons, par ailleurs, qu'ils étaient près de 1000 médecins résidents exerçant au niveau des différents secteurs sanitaires de la wilaya qui ont pris part à ce mouvement. «Nous avons tenu quand même à assurer le service minimum au niveau de toutes les structures au même titre que les gardes qui seront maintenues durant ce débrayage illimité», a annoncé Mouna H., porte-parole du Collectif autonome des médecins résidents pour la région de Constantine. «Nous poursuivons nos études et nous assurons des soins hospitaliers comme tous les autres médecins, mais notre statut demeure ambigu ; on ne sait pas encore si nous sommes des étudiants ou des praticiens», a-t-elle rappelé. Lors d'une rencontre avec le directeur général du CHU de Constantine et le doyen de la faculté de médecine, les représentants des grévistes ont remis sur la table les principales revendications de la corporation. «Il s'agit de nous assurer les meilleures conditions de formation pour qu'on puisse à notre tour dispenser des soins de qualité ; et nous réclamons une réévaluation de notre rémunération, pour un salaire digne de notre formation et des efforts que nous déployons», ajoutera la déléguée des médecins résidents. Cette dernière ne manquera pas de rappeler que les concernés exercent encore dans des conditions difficiles, assurant des gardes avec exposition au risque de contagion, sans pour autant percevoir la moindre prime. Tout en réclamant l'abrogation du service civil, devenu caduque, selon les grévistes, ces derniers ont affirmé, hier, leur abnégation à poursuivre ce mouvement face au mutisme et à l'indifférence totale affichés par la tutelle. «C'est une question de dignité, avant tout», clament-ils.