La rencontre de la secrétaire d'Etat américaine, Condoleezza Rice, avec ses homologues européens, mercredi soir à Bruxelles, et sa réunion avec ses vis-à-vis jeudi matin au siège de l'Otan ont débouché sur un compromis politique qui a permis aux Européens, comme aux Américains, de sortir, aux yeux de leurs opinions publiques, convenablement de l'embrouille diplomatique au sujet des prisons secrètes utilisées par la CIA. En revanche, nous ne savons toujours pas quels sont, précisément, les pays européens qui ont accepté de mettre à la disposition de la CIA des prisons secrètes, depuis quand et surtout si cette collaboration existe toujours et si elle va se poursuivre à l'avenir. Mme Rice a rappelé aux Européens que « les USA ne pratiquent pas la torture, ne l'acceptent pas et ne s'attendent pas à ce que leurs employés s'y livrent ». Poussant l'exercice de la transparence dans la communication, elle a répondu lors de la conférence de presse tenue à l'Otan : « Il est possible qu'il y ait eu des abus par certains agents. Dans ce cas, des enquêtes sont ouvertes et les coupables sont punis. » Le secrétaire général de l'Otan, Jaap de Hoop Scheffer, a fait savoir qu'il n'y a aucun malentendu sur ces questions entre tous les alliés, et que « les propos et les explications de Mme Rice à ses homologues européens ont permis de lever les équivoques ». Et jusqu'au ministre néerlandais des Affaires étrangères, Ben Bot, qui a déclaré mardi dernier qu'il serait sans concession et qu'il attendait des explications claires sur le sujet, est revenu à la raison. « Je suis très satisfait par les explications de la secrétaire d'Etat », a-il affirmé à l'issue du dîner de mercredi soir. De l'avis des observateurs politiques, il est probable que la polémique sur ces fameuses prisons se poursuive à travers des médias, mais elle n'aura aucune incidence majeure sur les relations transatlantiques. L'impératif de la lutte mondiale et concertée contre le terrorisme international ne peut éviter la coopération tous azimuts, judiciaire, policière... des Etats démocratiques, devenus première cible de l'international terroriste. Au-delà de cette évidence rappelée par Mme Rice à ses partenaires européens, il faut lui reconnaître sa subtilité diplomatique et politique. Venue pour subir un interrogatoire sur les « sites noirs » de la CIA en Europe, elle a mis au pied du mur les Européens quant à leur engagement et leur devoir de solidarité dans la lutte antiterroriste. Et puis, ces prisons secrètes ont-elles été ouvertes sans l'accord des gouvernants européens concernés ?