La toute nouvelle collection de haute couture du styliste Karim Kadid s'est caractérisée par une profusion de broderie traditionnelle, de pierres semi-précieuses, de perles de Muano et de cristal de Swaroski. Karim Kadid est désormais un nom qui a su s'imposer dans l'univers de la mode algérienne. Sa maison de couture à Alger et son atelier à Miliana sont devenus, au fil du temps, le carrefour incontesté du professionnalisme. Ses seize années d'expérience, dans ce domaine, lui ont permis de s'affirmer davantage et de percer certains secrets de la broderie. Se remettant tout le temps en cause, Karim Kadid est un jeune créateur perfectionniste qui accorde une importance capitale à la création et à la recherche. En effet, Karim ne se limite pas seulement à poser un dessin sur un papier ou encore à couper un patron, il se plaît continuellement à effectuer des recherches en allant feuilleter d'anciennes reliques poussiéreuses. Façon singulière de mettre au parfum du jour certaines broderies millénaires algériennes. Une incursion dans le dressing de Karim Kadid a été mis à l'honneur, jeudi soir dernier, au niveau de l'Auditorium du palais de la culture de Kouba, à travers un somptueux défilé de mode de quarante tenues traditionnelles. Ainsi, les nombreux convives ont pu admirer avec un réel plaisir sa dernière collection, regorgeant de fines broderies et de pierres précieuses. Le défilé était scindé en trois tableaux distincts. La première partie a dévoilé des tenues typiquement algéroises. Une femme, sapée à l'ancienne fait son entrée sur scène sous des salves d'applaudissements et de youyous nourris. Encensoir en laiton en main, le mannequin à la démarche gracieuse fait glisser progressivement son «haïk» en soie sur son épaule, laissant entrevoir un «seroual medouar» et un karakou où la broderie s'affiche à outrance. L'odeur de l'encens emmène plus d'un dans des souvenirs lointains immémoriaux. L'heure est à la nostalgie et aux souvenirs. Suivront d'autres mannequins à la démarche altière et à la taille filiforme portant des tenues rivalisant de raffinement et de finesse. En témoigne cette tenue de couleur turquoise, composée d'un «seroual chelka» réhaussé d'une tunique brodée sans manches, où des pierres écrues pendillent légèrement. La tête est recouverte d'un tissu en tulle écru, qui retombe vers le bas de la taille où un grand nœud papillon se laisse deviner. Place à la deuxième partie du défilé consacré cette fois aux caftans marocains avec une touche algérienne. Mousseline, soie, satin, rodia sont autant de tissus luxueux que le styliste a utilisés. Le caftan n'est pas conventionnel chez Karim, il se porte avec son fond de robe et sa longue liquette. Il est soit rehaussé de pierres précieuses, de cristal de swaroski, d'écailles de poissons, ou encore de divers points de broderies. Karim Kadid explique que l'originalité de cette collection est de personnaliser les broderies dans ses caftans. Il a d'ailleurs utilisé, pour les besoins de cette collection, 52 points de broderies différents, issues de Milana et d'Alger. Le dernier tableau de la collection a présenté une mise en scène réussie de la cérémonie de la nuit du henné «El Henna», confiée à l'un des maîtres du Ballet national algérien, en l'occurrence, L'hadi Cherif. Une mariée enroulée dans son «kouiette» et son burnous blanc fait son entrée sur scène. L'époux rejoint sa dulcinée dans une tenue typiquement traditionnelle. Cette dernière est composée d'un seroual légèrement plissé, d'un gilet et d'une veste courte en lin. La chéchia et les babouches agrémentent la tenue finale. La chanteuse Dalila Naïma a, pour sa part, accompagné le couple dans une «taâlila» irréprochable. Comme le veut l'usage, à la fin du défilé de mode, le styliste a remercié timidement la nombreuse assistance pour sa présence et n'a pas manqué de souligner que son travail s'inscrit dans la recherche et dans la sauvegarde du patrimoine ancestral. Pour rappel, Karim Kadid a été bercé au sein d'une famille de métier. Son grand père était tisserand. Après une formation de deux ans en dessin de bâtiment, Karim décide de changer de filière. Il ouvre une modeste boutique à Miliana. Très vite, Karim décide de suivre un cursus dans un centre de formation professionnel agréé. Après un stage de 18 mois, il ressort avec un diplôme en prêt-à-porter. Voulant davantage connaître tous les rouages de ce métier, il transite durant trois ans dans une école privée de stylisme. Chemin faisant, il enchaîne défilé sur défilé. Sa grande fierté, confie-t-il, est sans conteste l'ouverture d'une école spécialisée dans la broderie à Miliana en 2002. Après la fermeture de la célèbre école de broderie dans sa ville, il fut dans l'obligation de sauvegarder ce patrimoine inestimable. Il a ainsi récupéré l'ensemble des ouvrières. L'école en question était spécialisée dans la broderie main, dans la reproduction et la restauration de vieilles pièces. Se considérant comme un styliste de haute couture, Karim estime que la broderie n'a fait que compléter son savoir-faire. Après avoir découvert les arcanes de la mode et de la publicité, Karim compte bien se faire un nom dans le cinéma. Il veut personnaliser l'image de l'Algérie à travers la richesse de ses costumes. «Je voudrais coudre et faire du sur-mesure pour les comédiens».